vendredi 25 juin 2021

Manon (artiste suisse) et Karle Dunér (artiste suédois) ont croisé mon chemin !

 


Au fond du passage, rue des Francs-Bourgeois, Paris 3e

Le souvenir de Michèle Gleizer :

En sortant du musée Carnavalet, je me suis retrouvée nez à nez avec le Centre Culturel Suisse que je connais depuis des décennies, dans sa petite impasse, il reste encore tranquille aujourd'hui... En 2002, 20 ans déjà ! J'y avais vu une exposition qui m'avait renversée, celle d'une brodeuse incroyable, Michèle Gleizer, décédée en 2017. 

Au gré de son temps libre, entre les tournages ou les engagements de théâtre... Elle brodait uniquement au point compté, appelé point de croix... Elle mettait dans sa broderie l'imagination, la sensibilité, la poésie, le talent, pour créer à l'aiguille de la beauté, comme d'aucuns se servent de pinceaux, de mots, de matières les plus diverses, pour fabriquer des œuvres extraordinaires. Les œuvres "textiles", elles aussi, ne cesseront jamais de nous émerveiller... Chaque point de son œuvre a toujours compté, pour moi, comme un modèle inatteignable, j'en parlais déjà dans mon post de 2010 (cliquer ici).  


Michèle Gleizer

Manon  (Rosemarie Küng, née le 26 juin 1940 à Berne -Suisse) :

Le Centre Culturel Suisse présente très souvent des artistes exceptionnels, aujourd'hui : Manon ("Depuis le milieu des années 1970, l’artiste suisse Manon ne cesse d’interpeller par son sens radical de la performance, de la mise en scène et de l’installation. De manière subversive, elle aborde la transformation sociétale, le féminisme et la révolution sexuelle, s’inscrivant ainsi dans le débat actuel sur les relations de domination ou les notions d’identité et de genre"). C'est justement son art de l'installation qui m'a énormément plu, une œuvre où l'accumulation des objet, sous une yourte, forme un tableau aussi pointu et beau qu'un tableau de Bruegel, qu'il faut regarder au plus près pour en saisir tous les sens, sans jamais y parvenir. Dans l'accumulation de l'artiste, il y a forcément quelque chose que vous reconnaissez, qui vous appartient, que vous auriez voulu posséder, l'artiste vous transforme illico en voyeur "volontaire"... J'étais toute seule dans cette grande salle, j'ai d'abord tourné autour de la yourte, et dès que j'ai aperçu la lumière de l'entrée, ça été la jubilation : comme c'est beau, j'en ai encore les larmes aux yeux !


Le boudoir rose saumon - 1974 - Manon (1940)

J'ai sorti aussitôt mon appareil photo comme font les touristes auprès de la Tour Eiffel, et très vite je me suis ravisée : regarde, au lieu de prendre des photos, tu auras bien le temps après... Je n'aurais jamais assez de temps pour tout voir, je ne verrais pas tout ! Bien sûr, tu ne verras pas tout...
La beauté de cette installation était fulgurante, "tout" était à sa place, quelle place ? Un par un les objets, les intentions, les mélanges, les couleurs jouaient tous avec l'intimité de l'artiste, la nôtre ? Dans un sens ou dans un autre, il faut partir de zéro, continuellement vous cherchez, quoi ? De plus en plus beau... Du théâtre ? De la réalité ? Allez savoir... Cet univers bondé de bibelots, de parures, d’objets fétiches, explosion d’une hyperféminité luxuriante, était sa chambre à coucher personnelle. 


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À l'entrée de la yourte, ce sont les couleurs éclatantes qui font boum ! Puis après, un moment après, la curiosité du détail est à l'œuvre, Manon raconte sa vie... Chaque objet est un mot, on apprend vite à lire dans son boudoir...



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Quelle beauté ! Merci, Manon, d'avoir tout gardé, jamais je n'arriverais à tout regarder, le mystère demeurera sur chaque étagère, secret de polichinelle ? Avec les miroirs, le boudoir prend des dimensions felliniennes... Je me fiche totalement de ne pas trouver le fin mot de l'histoire, l'ordonnancement me va, un par un les tableaux que je choisis s'éclairent seulement de leurs formes et de leurs couleurs... Quartier libre pour le spectateur, je m'en donne à cœur joie ! L'émotion est forte !


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Tout ici retient son souffle, luxe, art et volupté, secrets d'alcôve géniale... Les peintres de la Renaissance n'auraient pas mieux peint...

Karle Dunér (né en 1963 à Dramaten -Suède) :

Le Centre Culturel Suédois, derrière le musée Carnavalet, discret dans une petite rue peu passante, me surprend avec Karle Dunér (metteur en scène et artiste plasticien). La salle d'exposition est sans lumière du jour, dans la pénombre, sur un grand plateau noir 9 personnages qui ressemblent à des moines intriguent tout de suite, ils se meuvent imperceptiblement, l'un bouge légèrement la tête, un autre se lève, un cœur bat sous l'habit (je pense), ce qui fait que si vous passez rapidement, vous ne voyez rien qui bouge. Je me suis assise (sur un petit escabeau disposé autour de la "scène") un long moment devant cet étrange spectacle, il faut demeurer un long moment pour voir les mouvements (réglés sans doute de façon aléatoire), tout ici respire la méditation, la solitude, l'isolement, il faudrait être aveugle pour ne pas le ressentir... Je me suis tenue là, émue par le silence, la lenteur et la beauté... Sans décoller de mon siège, fascinée, regrettant même le passage de quelques visiteurs, comme moi, qui venaient troubler ma méditation, dans ce si petit théâtre !


Les Îles - Karl Dunér


Les Îles (le personnage central se redresse très lentement)


Mouvement ralenti, répétitif, sans fin...

Je n'avais pas envie de partir, je voulais assister au moindre geste, au moindre déplacement, et cette attente faisait naître un sentiments de bien-être ! Il suffisait d'être là, de regarder et d'attendre, de penser uniquement à cette installation, oublier l'extérieur, le monde, rester sur cette Île finalement suffisait pour avoir le désir de revoir les mouvements venir, et revenir... Rien d'autre, le pari était gagné s'il correspondait à la "pause" du spectateur, voulue par l'artiste !

Finalement, les deux installations, l'une, saturée de couleurs, d'accumulation, d'informations, et l'autre, minimaliste, "presque" statique, grise et brune, toute en retenue, en totale opposition apparente, provoquaient à leur manière le même besoin, la réflexion intérieure, l'interrogation sur le sens de la vie. De ma vie ! Leur beauté m'a touchée profondément. Leur vision s'est prolongée pour moi pendant des jours et des jours...


À très vite les amis, les visiteurs de la toile... J'ai des envies de promenades, j'en ai encore une qui trépigne dans mes pages !

6 commentaires:

siu a dit…

De la broderie de Michèle Gleizer j'aime bien ces éléments florissants qui brisent la (barbante) texture géométrique, mais pas trop les couleurs.

Les 9 moines m'attirent, me donnent envie d'attendre et puis suivre, dans la pénombre et le silence, leurs mouvements imperceptibles ou presque...

Alors que le boudoir rose saumon, non non non... je ne l'aime pas du tout ;-)))
Je ne l'aime pas dans son ensemble, et mème en cherchant dans ce bazar je ne trouve vraiment rien qui m'attire.
En plus il représente pour moi une espèce de sacrilège, car la yourte c'est quelque chose que j'adore: la vraie yourte, les paysages dont elle est généralement entourée, la façon de vivre qu'y est liée, etc.

J'espère que je serai pardonnée... :-))

Je t'embrasse de l'après-midi et te souhaite un beau week-end!!

Danielle a dit…

Mais bien sûr chère Siu tu es archi pardonnée !! Pour la (barbante) texture, les couleurs et la fausse yourte !

les 9 moines rien à dire, ça passe partout :-)) mais j'aime beaucoup !

Siu, pas de soucis, on se retrouvera !

Toi aussi passe un bon WE, tout gris ici, avec de la pluie !!

Je t'embrasse fort la pardonnée !

Marie Claude a dit…

En sortant de Carnavalet encore de belles découvertes!
Brodeuse de talent Michèle Gleizer, superbe création au point compté que tu connais bien...
Intriguée par ces moines une expo que j'aurais voulu voir "en vrai" et pouvoir ressentir leurs mouvements imperceptibles.
Quand au boudoir dans cette yourte surprenant ,tout comme Siu pas vraiment "emballée" ...les goûts et les couleurs ne se discutent pas dit-on!
Joli W.E à toi avec des bisous du soir.

Danielle a dit…

Oui de belle découvertes pour moi, et le musée Carnavalet me paraissais plus fade !

Si, chère Marie Claude, je pense que les goûts et les couleurs peuvent se discuter,, différemment, mais assurément... Ce qui compte c'est le bonheur que ça donne !

Bien sûr beau WE à toi, à très vite entre mots et photos. Je t'embrasse fort.

Unknown a dit…

HI, and thank you for posting some pictures and comments about this show - glad you liked it!
May I just correct Manon's year of birth? She was born in 1940 not 1946.... a mistake that has been made since the 80s :-)
thank you for correcting it
best wishes
Sacha
manon.ch

Danielle a dit…

Voilà, j'ai corrigé la date de naissance de Manon, en vérifiant sur le journal culturel suisse, qui la confirme, il faudrait faire changer cette date sur Wikipedia ? :-)

Merci à vous de cette précision.

cordialement