mardi 28 juin 2022

Mes brèves de comptoir... À la fête, entre les jardins, la pharmacie et mon cardiologue...


Le chat bien caché 

À la fête d'un quartier :

Au pied de ma tour, fin prête pour aller à la fête d'un quartier de ma ville, j'ai remarqué, dans le carré de pelouse qui nous sert de jardin de poupée, le chat qui se cachait de la chaleur. Bien au frais sous les feuilles, il ne s'est pas sauvé en me voyant, il était collé au sol, personne ne l'aurait dérangé... En poursuivant mon chemin, par la cité pavillonnaire juste en face de chez moi, j'ai rencontré l'abricotier, plein jusqu'aux dents d'abricots que je ne goûterai pas, puisque la maison est à vendre, tout le monde est parti, seuls les abricots s'accrochent aux branches... Pendant le confinement, j'ai eu le plaisir de les goûter, car la propriétaire m'en avait donné une belle poignée, ils étaient beaucoup moins bons que ceux de notre abricotier de l'immeuble, incomparables, premiers de la classe !

Les abricots à vendre...

Mon cœur s'est un peu serré en voyant la pancarte "À Vendre". La propriétaire de cette maison y vivait seule, son fils s'occupait de tout, le ramassage des fruits, c'était lui... La cité passe la main, les nouveaux acquéreurs sont plus jeunes, plus fortunés... Ainsi va la vie..."Ceux qui arrivent sont parisiens, ils ont vendu tellement cher leur bien qu'il leur reste assez d'argent pour faire les travaux", les anciens qui sont là depuis plus de quarante ans regardent ces changements en se posant des questions de proximité : vont-ils participer à notre vie associative ? Vont-ils mettre des guirlandes à leur porte à Noël, la prochain vide-grenier aura-t-il lieu ? Va-t-on retrouver cette convivialité acquise de haute lutte dans ce quartier ? Pour l'instant, tout va bien, la dame continue d'installer son linge sur le séchoir du petit jardin, tout en suivant d'une oreille discrète, la discussion entre son mari et moi, quelquefois, elle y met son grain de sel, toujours avec le sourire, en approuvant tout ce que dit son homme... Un couple soudé !


La sublime bignone a été arrachée depuis le passage de témoin à un autre propriétaire (2020)

La rombière de service, la casse-pied intégrale, celle qui prend la cité pavillonnaire pour un champ de blé ondulant sous le soleil, c'est moi ! Il faudrait que rien ne bouge par ici, maintenant que j'ai tout répertorié pendant le confinement de la population. Il faut que je refasse connaissance avec l'habitant nouveau, comment faire sans reconfinement ? Un très gros dossier en perspective ! Je vais préparer ma lettre pour l'UNESCO... Inscrivez le quartier au Patrimoine Mondial, j'ai trop de travail, je n'arrive pas à suivre le changement !

Me voilà à la fête, musique, bavardages et rondes d'enfants, la palette des diversités humaines est bien représentée, notre petit chœur (auquel j'appartiens depuis des dizaines d'années, avec interruption momentanée) démarre avec des chants du 16e siècle, vous imaginez comme le tout le monde s'en moque, sauf notre micro public habituel. Puis nos chants du monde font lever quelques têtes, mais vivement la fin car les enfants ont envahi la pelouse a grands cris, c'est trop long... Je suis bien assise sur un banc en ferraille, bien bas, confortable, je suis là pour un bon moment, une jeune femme derrière moi me confie son sac en tissu, bien lourd, à mes pieds il sera bien gardé, pas de souci, vous pouvez allez vous promener... Notre chœur est très applaudi au final, sans doute bien aidé par l'animateur de la fête au commande d'un micro puissant :  public, je vous demande de "faire un maximum de bordel" pour les applaudir et crier, plus fort, plus fort ! Après notre petit chœur, on peut admirer une belle danse indienne, les danseuses sont belles, les robes magnifiques, la musique entrainante, Bollywood est sur la place, les enceintes tremblent, attention aux oreilles, ça tourbillonne... Vient ensuite une jeune chanteuse amateur du quartier, belle voix et pas de style, puis un chanteur lui succède, même style et pas beaucoup de voix, les enfants s'y mettent, et moi j'ai toujours le sac de la dame entre les pattes... Au moment de partir, je ne veux pas l'abandonner au premier prédateur venu, un gros risque, elle me l'avait confié, j'en avait fait l'inventaire pour trouver une adresse, un n° de téléphone, rien ! Si j'étais Prévert, je pourrais même en faire un beau poème : un ordinateur Apple Air extra plat, un téléphone tout neuf, une trousse de maquillage qui pesait son pesant de cacahouètes, des mouchoirs... et un raton laveur ! Que faire ? Comment  le restituer à la dépositaire trop légère, disparue ?  Ah, la voilà ! Merci, merci, vraiment, je n'avais pas vu le temps passer, et je suis un peu trop confiante avec mes affaires... Totalement hors-sol, la jeune femme imaginait que son sac pouvait rester seul, sans surveillance, sur un banc, à l'attendre au milieu de la foule... Avec tout ce qu'il y avait dedans ! Vingt-cinq fois elle me remercia, de rien, de rien, de rien... Son cas d'inconscience me dépassait largement pour lui faire des recommandations d'ancêtre... Bonne soirée, je suis vraiment contente que vous ayez pu retrouver vos affaires... La fête est finie pour moi, je pouvais repartir délivrée, la conscience tranquille...

À la pharmacie :

Vous savez, ici, nous prenons soin des gens comme s'ils étaient nos pères et mères ou nos cousins... On ne vous laissera pas sans médicaments, même si votre ordonnance n'est plus valide pour l'instant... Le monsieur est reparti rassuré, ses médocs dans un petit sac ! Dans cette pharmacie, toutes les femmes sont voilées des pieds à la tête, ce qui fait fuir les uns et venir les autres, au gré des convictions... Elles prennent le temps de parler avec chacun, c'est très utile, et moi je me fiche totalement de la façon dont elles sont habillées...

Au fil du temps, malgré les changements de propriétaire, elle est restée ma pharmacie... Le quatrième rappel, par ici madame, et hop je pique, puis j'attends mon petit quart d'heure, confortablement installée dans un fauteuil rembourré... Toujours le sourire, prenant le temps, ça me va !

Dans le quartier, les pharmaciennes ont fait parler d'elles : dis-donc, à la pharmacie, t'as vu, elles sont toutes voilées ! Ah oui... En fait, dans le quartier il n'y a aucune femme aux comptoirs des commerces, dans les restos, elles sont en cuisine, dans les épiceries, toujours des hommes, cherchez l'erreur !

Mon cardiologue :

Depuis des années, nous nous voyons régulièrement, tout va bien pour moi... L'autre jour, je lui retourne la question : et vous monsieur, comment allez vous ? Il m'a regardé en souriant : ça va, merci. Je l'asticote : vous avez eu le Covid ?  Oui, et pas qu'un peu, j'ai été malade comme un chien, au bord de la réanimation. Pas possible ! Alors là, c'était parti pour la parlote... Vous avez été fatigué longtemps ? Oui bien sûr, j'ai du m'arrêter plusieurs semaines, presque tous les médecins de la clinique sont tombés comme des mouches... Au début de l'épidémie, on a trinqué ! Vous avez remarqué que mon fils et ma belle-fille étaient venus vous voir ? Il se précipite sur son ordinateur : mais bien sûr ! Pour la pratique du vélo, eux qui font beaucoup de sport, c'est bien de se faire suivre, et je continue : je leur ai dit que vous étiez un bon cardiologue, mais pas bavard. Comment ça, pas bavard ? Nous parlons toujours de Venise quand vous venez ! Oui, oui, mais je leur ai dit que vous étiez sympa mais un peu taiseux. Vous exagérez, en fait vous avez raison, je ne suis pas sympa c'est vrai, mais très attentif à mes malades, si je vous racontais toutes les sortes de malades que je vois, ceux qui veulent se soigner, ceux qui ne veulent pas, malgré leur état grave, ceux qui viennent en retard, les grincheux, les soucieux, les anxieux... Bien sûr, lui dis-je, c'est la vie des gens... Oui, vous avez raison, c'est la vie des gens ! Nous avions compris tous les deux que le genre humain lui en faisait voir de toutes les couleurs, et que c'était normal !

Mon cardiologue est un humain... En partant, il me dit : bonnes vacances ! Mon cardiologue n'aime pas les discours, il a l'œil et le bon, sur ses appareils de contrôle... Nous, ses malades, nous avons beaucoup de chance !

Le Père-Lachaise :

Souvent, mes promenades finissent au Père-Lachaise, il y a toujours quelque chose de beau à voir,  je suis dans un paysage que je connais bien, pas trop loin de chez moi, je prends mon temps, je regarde les arbres remarquables, les allées pleines d'herbe, les oiseaux, pas de bruit de voiture, c'est la campagne de la ville... Je trouve toujours une tombe qui n'est plus à personne, tellement elle est vieille et abandonnée, et qui me sert de siège... Je reste toujours un bon moment à scruter l'horizon... Aujourd'hui, j'ai revu l'ange ! En sortant, j'ai vu aussi, la très belle cour, juste derrière le cimetière...




L'ange du Père-Lachaise


La petite cour dans une rue derrière le Père-Lachaise

Mes amis, mes passagers, la prochaine fois je vous raconte ma visite dans la petite église orthodoxe russe du 19e arrondissement, bien cachée aux yeux du monde ! Portez-vous bien... La contamination remonte, restons prudents. Je vous embrasse...

jeudi 23 juin 2022

L'ouverture de l'atelier perles !!! Mes brèves de comptoir...


Réouverture de l'atelier perles - pompon ancien au premier plan, pour retrouver les techniques, et pompon "work in progress" au deuxième plan...

Voilà un bon nombre d'années que je n'avais fabriqué un "pompon" avec mes perles de rocailles et les autres, il suffit d'enfiler des perles et de les compter, comme des point de croix... J'avais fait don, vers Noël, de la plus grande partie de mon fond de perles à une amie qui les utilise dans les animations qu'elle met en place dans les maisons de retraites, les associations, auprès des enfants... Mon fils m'avait dit : Ben maman, pourquoi tu veux te débarrasser de cette belle boîte à couture, elle est vraiment belle ! Pourquoi tu ne fais plus de perles ? Moi, j'aime bien tes pompons... Et voilà pourquoi je me suis remise au travail. Comme pour la broderie, abandonnée des années, il faut retrouver les gestes, les petites astuces, le choix des couleurs, les vieux réflexes, la minutie... Finalement, pourquoi pas, j'ai remis la boîte à sa place, c'est une bonne idée de s'y remettre, un petit challenge. J'ai terminé la broderie, en attendant de relire Montaigne, enfilons des perles...


La boite à couture des années 60/70 achetée en brocante, elle était pleine à ras bord de perles en tous genres, énormément de perles de Murano, quasiment vide aujourd'hui...


Le travail de broderie terminé

Il me reste juste quatre torchons (en haut) à repasser... En fait, le challenge des perles tiendra au fait que le choix des couleurs est considérablement réduit après le don à mon amie, il faudra jongler avec" les restes" et faire quand même de belles pièces, au travail ! On verra bien... J'avais un peu le trac !

Mes brèves de comptoir : Un euro vingt pour un conseil avisé !

Ne traînons pas, il va faire chaud, je vais faire mes courses place d'Aligre, mon nouveau QG "vite fait bien fait", promis juré, après, je reste chez moi à l'abri des 30° ambiants, rien de bien difficile à supporter, je trouve...

Donc, place d'Aligre, l'idée me vient, en voyant deux magnifiques lauriers roses épanouis autour d'une petite terrasse de café, d'aller demander un conseil d'arrosage au patron. Un petit café bien allongé, s'il vous plait ! Monsieur, s'il vous plait, vos laurier sont magnifiques, comment faites-vous pour l'arrosage ? Madame, il suffit de poser la question, je vous réponds ! Nous y étions, un partageur... : je leur mets deux litres d'eau tous les jours. Tous les jours ? Oui, il fait chaud, mais attention, le soir surtout, quand il fait quasi nuit. La dame qui sirotait son petit café à côté de moi au comptoir entra dans notre conversation : oui, oui, vous les arrosez quand vous allez vous coucher (oui, mais du coup, c'est quand que je dois aller me coucher ?) Et elle s'égara sur le remembrement des années 1960, elle avait vécu à la campagne et l'arrosage des lauriers, entre autres, ça la connaissait... Comme dans la vraie vie, chacun y allait de son petit couplet : plutôt le soir, à nuit, à la tombée de la nuit, un litre d'eau, deux litres, pas trop, juste assez... Parfait, ce soir, à la fraîche très fraîche, j'arrose, comme mes pots sont plus petits, je vais mettre en mettre un litre à chacun, j'ai tout calculé, mesuré, un litre, pas plus... L'arrosage est une énorme affaire, que de larmes versées dans les foyers pour trouver le remède parfait pour les fleurs, les arbustes, les grimpants, les herbes aromatiques de tout premier plan sur les balcons, j'ai même rencontré un voisin qui avait installé un goutte à goutte, arrosage automatique sur son balcon ! Pas possible ! Si, si, ça marche très bien... Je n'en revenais pas, il avait le plus beau balcon fleuri de toute la tour, n'avait aucun rival à quatre lieux à la ronde, premier sur le podium du quartier ! Une parole qui a du poids...

J'ai payé mes un euro vingt avec plaisir !! La vie nous réserve de belles surprises ! Je vous tiens au courant pour mes lauriers !

Les gros mots du bus :

Les petites courses parisiennes en bus sont pleines d'inattendus, un embouteillage, une déviation, et voilà tout les voyageurs en émoi ! C'est quoi, ce bordel ? Avait-elle dit, élégante, sympathique, vive, la dame avait vite évalué la situation, on n'était pas prêt d'arriver, ça coinçait de partout... La parigote toute crachée était montée dans le bus avec une amie, elle connaissait bien les rues parisiennes, n'était pas pressée, et se fichait bien du "bordel" ambiant, elle en riait, la déviation ne lui faisait pas peur, au contraire, elle appréciait la promenade improvisée que lui faisaient prendre les transports en commun...  Toute tranquille, en continuant son bavardage avec son amie, le plus naturellement du monde,  elle réitéra "le gros mot" Avec ce bordel, on n'est pas rendu, dis-donc au fait, t'as revu Germaine ?  Pas une histoire d'état, ça roule mal et puis voilà... Elles reprirent immédiatement le cours des choses qui comptaient pour elles aujourd'hui : Germaine ! 

À l'arrêt du bus, les soupçons :

Madame, moi je vous le dis, le vaccin donne la maladie, regardez moi, je voudrais bien l'attraper, je fais tout pour et je n'y arrive pas, regardez ma belle-mère, pareil, 92 ans, impeccable ! La petite dame tenait une rose à la main, âgée bien sûr, peu bavarde, elle faisait oui de la tête, ce qui fait que la belle-fille me déversa tous ses arguments des "vaccinés, jamais". Elles attendaient comme moi le bus magique qu'on voyait arriver de très loin, j'espérais secrètement trouver une place assise... Le confort absolu, fouette cocher, à la maison !!!

Mais le bus était loin, plein de feux rouges à traverser, nous avions le temps d'affuter nos arguments, elle, contre le vaccin, moi, pour ! Rien ne nous faisait changer d'avis, comme d'habitude. Écoutez madame, ne nous prenons pas la tête, ni vous ni moi ne changerons de position sur cette question, j'espère, comme vous le souhaitez ardemment, que vous arriverez enfin à attraper le beau virus, moi je préfère me faire vacciner, ne nous fâchons pas, bonne route, moi je vais prendre le métro car le bus qui arrive ne va pas là où je vais... J'avais pris la poudre d'escampette, le métro c'est bien aussi, la promenade continue en sous-sol !

Tout en cheminant, un peu agacée, je me disais que depuis un certain temps, je n'étais pas non plus complètement réglo sur le gel hydro-alccolique, toujours dans mon sac, mais rarement utilisé...

Nouvelle manière de compter :

Dis-moi, ça fait combien de temps que tu n'es pas allée à la campagne ? Attends voir, la dernière fois c'était juste un an avant le covid... Elle a de la bouteille, ta nouvelle bouilloire ? Je l'avais déjà avant le covid, elle doit avoir trois ans tout juste... Tes géraniums si beaux, ils sont vieux, sans doute, ils ont une vigueur incroyable, beaucoup plus beaux que les miens ! Alors, laisse moi réfléchir, je les ai achetés au marché un an avant le covid, plus cette année, ils ont trois ans et des briquettes, magnifiques ! Maintenant la nouvelle mode pour nos mémoires, c'est de compter la grosse période mortelle du covid, avec le confinement, pour point de départ ou d'arrivée de tout ce que nous faisons aujourd'hui...

Avant le confinement, pendant le confinement, après le confinement, c'est notre nouvelle table de multiplication, sans compter les rappels de vaccination, t'en es à combien ? Trois, sans compter ma contamination naturelle ce qui équivaut à un rappel... Bon, il faut que je prenne avis pour le prochain rappel, ma chère sécurité sociale me talonne !

J'ai encore du mal à calculer ensemble, la période de covid et mes accidents de santé, tout est pêle-mêle dans mon cerveau, je vais reprendre ma calculette...



En direct de l'atelier...

Musiquez bien les amis... Sur toutes les gammes... On n'est jamais assez de voix pour chanter !

À très bientôt, nous ne sommes plus nombreux dans le métro à porter le masque... Je vous embrasse.

mercredi 15 juin 2022

Le cinéma, le retour pour moi ! Et le film de Maurice Pialat...


Tiens, ce film va me plaire ! J'avais déjà vu plusieurs films de lui, que j'ai souvent bien aimés, il décortique les personnages, rend compte de situations humaines complexes. Arnaud Desplechin,  tout en faisant monter les tensions, laisse le spectateur découvrir petit à petit l'intrigue du film. Pour Frère et Sœur, le spectateur est mis à rude épreuve, certes les tensions montent, mais je ne comprenais rien de ce qui se passait entre ce frère et cette sœur qui semblaient se détester à mort, sans en comprendre l'origine, j'ai cherché, cherché... Au bout d'un moment, j'ai eu l'impression que les acteurs se débattaient dans un imbroglio de sentiments dont je ne connaîtrais jamais le sens, j'ai été agacée, forcément, tout ce petit monde semblait alors "surjouer" une  partition que je n'arrivais pas à démêler !!! Au sortir de la séance, j'ai pu en discuter avec des personnes que je connaissais et qui se trouvaient dans la salle... Rien, pas de lumière non plus dans plusieurs cerveaux, oui, tu as peut-être raison, oui, j'ai pensé à ça aussi, l'inceste, oui, pourquoi pas, ça collerait bien entre la haine et l'amour qu'on perçoit entre tous les personnages, oui, la jalousie aussi ? Tu ne trouves pas ? Les lampes de poche de nos cerveaux ne suffisaient pas à nous éclairer davantage, oui, c'est possible, ah bon, tu crois, il y a tellement de mystères dans les histoires de famille, le flou intégral... Bonsoir, rentrez bien, à la prochaine... Le mikado de Desplechin, même à plusieurs, nous n'en étions pas venus à bout !!



Je suis repassée sur le petit écran de ma grande télé pour Le film de Maurice Pialat, la merveille des merveilles, alors là, j'ai vu "36 chandelles" ! L'histoire du peintre Van Gogh n'est plus un mystère pour personne, le peintre un peu fou, qui se tranche l'oreille un jour de déprime violente, la fureur de vivre, boisson comprise, les dépressions successives, les "je t'aime, moi non plus" avec son frère Théo, le vendeur de ses tableaux... Justement, c'est là que le cinéaste Maurice Pialat intervient avec son film, il renouvelle l'histoire en commençant par raconter les quelques années qui ont précédé la mort du peintre, il invente littéralement des formes nouvelles, chaque plan est un travail de peintre d'une extraordinaire beauté, les dialogues ajustés comme des couteaux, les acteurs magnifiques de justesse. L'ambiance Pialat accomplit un prodige pour raconter cette histoire de "fous", Jacques Dutronc et tous les autres deviennent pour toujours les personnages du film... La musique intervient à point nommé tout au long du film pour en augmenter l'intensité, de grands moments, celui de cette danse de salon dans un bordel, appelée "La marche", est grandiose, elle s'exécute solennellement en ligne, un couple, puis deux, puis trois, quatre... Au bout de cette marche, tous les danseurs se retrouvent sur une ligne, pour nous saluer, incroyable d'émotion... Je pleurai devant mon poste de télé... Voilà longtemps que je n'avais vu un chef-d'œuvre pareil... Maurice Pialat devait beaucoup aimer Van Gogh, avec son film, il lui a donné du sang neuf !


Danse de salon, "La marche", récupérée sur Internet, Dutronc est Van Gogh

Personnellement, Van Gogh n'est pas mon peintre préféré, je ne partais pas gagnante avec le thème, mais Maurice Pialat a tout changé, il a fait exister tous ces personnages, avec émotion, sobriété, et fulgurances, il a créé une palette de couleurs extraordinaires, des regards d'acteurs et des silences d'une force incomparable... Bravo ! Les jours suivants, j'y pensais encore avec énormément d'émotion, comment avais-je pu passer à côté de ce grand film (1991) pendant tant d'années ?

Je vais donc réviser toutes mes gammes cinématographiques en revoyant les grands films de Pialat !

Les brèves de mon comptoir :

L'abricotier :


Le bel abricot de notre abricotier (12 juin 2022, 11h58)

Moi qui n'ai pas de jardin, les jardins des autres sont des cadeaux... Au bas de mon immeuble, notre bel abricotier peaufine le mûrissement de quatre, voire cinq abricots... Il a été malade l'année dernière, à cause d'une branche mal coupée, mais cette année il se refait une santé, j'ai eu la privilège de goûter au premier abricot tombé à terre, dans le petit bout de pelouse qui l'entoure... Je l'avais vu, bien dodu, tout seul dans l'herbe, au matin, je suis descendue le ramasser, j'ai eu l'idée d'en donner une moitié à ma voisine malade, mais in fine, je ne l'ai pas fait, je l'ai mangé en entier, égoïstement !!! Un miel, un sucre, une rose pour l'odeur, le meilleur abricot de la saison...


La pièce rare (ramassée le 14 juin 2022), mangée en catimini

Personne sur les rangs, mon œil de lynx travaille pour moi, impossible de me battre sur le coup, dès que j'aperçois un petit bout de couleur orange, je fonce... En douce, pas aux heures de pointe, non, le matin ou le soir, j'y vais à pas de loup... Et hop ! Il est pour moi !

Aujourd'hui (15 juin), prise du deuxième abricot, (le plus plus petit sur la photo, à côté du gros  fruit "industriel" sans goût de chez mon primeur), je l'avais aperçu hier, mais il faut savoir attendre, il n'attendait que moi ! Sitôt dit, sitôt fait, il est à moi, pas d'état d'âme, chacun pour soit et Dieu pour tous ... Un miel, un sucre, une rose pour l'odeur, le deuxième meilleur abricot de la saison...

Je n'ébruite pas l'affaire, je laisse faire le temps, le prochain fruit à terre, il est pour moi, pas assez de récolte pour partager... Il faut savoir s'imposer !


Le deuxième (le plus petit, 15 juin 2022), à côté de celui de mon fruitier

L'habit ne fait pas le moine, le meilleur des deux n'est pas celui qu'on croit, le gros a un goût de flotte, tandis que le petit, de notre abricotier, bat tous les records à la dégustation ! En descendant, j'ai rencontré tout un tas de gens, auxquels je n'ai pas montré mon butin...

Le ruissellement de l'amitié :

J'ai croisé un très vieil ami, de plusieurs décennies, bien plus jeune que moi, la mine triste, pâle, fatigué, il lui manquait une dent...  Bonjour l'ami, voilà un moment que je ne t'ai vu, tu ne travailles plus aux Puces ? Il a fait non de la tête. Ben, comment tu fais pour vivre ? Il a fait une grimace qui voulait dire : t'inquiète, je me débrouille. Il faut te faire arranger ta dent ! On verra, on verra... Moi, j'ai compris qu'il se débrouillait mal, j'espérais qu'il n'étais pas retombé du côté obscur de la force... Il traînait avec les mauvais garçons du deal et de la décontraction... Attention mon ami, je t'ai à l'œil, ce qui dans notre code voulait dire : je veille sur toi, pour qu'il ne t'arrive rien de fâcheux, prends soin de toi... Il le savait... Pour nous dire bonjour et au revoir, nous nous serrons toujours dans les bras...

Cette autre dame qui attendait à l'arrêt de l'autobus, âgée déjà, mais vaillante, comme chaque jour elle allait à Paris. Chaque fois que nous nous croisions, elle pleurait : ma chérie, voilà longtemps que je ne te vois plus, depuis que mon mari est mort, le temps est long, je vais boire un café à Paris ! Elle allait jusqu'au terminus, sur une terrasse qu'elle connaissait par cœur, noyer son chagrin, son abandon, sa solitude, dans un petit crème... Mais non, voyons, je suis là, nous n'avons pas les même horaires, je lui prenais la main, une petite caresse sur la joue, bon voyage, bonne terrasse, à bientôt...

Dans l'ascenseur, je fais compliment à un jeune qui aurait pu être mon grand petit-fils : c'est chouette ta patinette électrique ! Oui, elle peut faire du 30 à l'heure... Il faut faire attention aux piétons ! Je prêchais pour ma paroisse... Tu sais, je te tutoies car je pourrais bien être ta grand-mère, et voilà, avec son beau sourire, il acquiesce, nous étions de la famille, chaque fois que je le rencontre, je l'appelle mon petit-fils, et il me fait : coucou grand-mère... Il accompagne sagement ses petits frères, très raisonnable ce garçon, j'ai bien choisi notre parenté...

Sur mon balcon, les fleurs vont bon train, mes géraniums rouges font leur petit effet, je fais une récolte de fleurs régulièrement pour alimenter mon petit vase à sept branches, mon laurier rose "pourri" que m'avait prédit la fleuriste, car elle jugeait que je l'arrosais trop, fleurit cahin-caha, je lui mets de l'engrais, je le bichonne et je l'arrose quand même, quand il fait très chaud, jusque-là pas de moribond en vue... Attendons !


Les géraniums de mon balcon


Mes amis, restez prudents, mon amie vient d'attraper le Covid, elle ne sait pas où, elle est malade comme un chien... À très bientôt, je vous embrasse.

mercredi 8 juin 2022

Sophie Calle à Orsay ! Les brèves de mon comptoir...


"Parce que des suaires en marbre" - Sophie Calle (1953) 

Il me suffit de presque rien pour me souvenir d'une œuvre qui compte pour toujours ! J'aurais bien voulu faire cette photo-là : les couleurs marbrées, pâles, l'ambiance, les plissés comme des tuniques antiques, où est le vrai linge qui sèche, où sont les reflets du linge ? Tout est parfait, parfaitement beau ! Cette photo parfaite de Sophie Calle, je l'avais vue chez Perrotin, la belle galerie de la rue de Turenne, en 2018... Je la suivais partout, autant que faire se peut, dans les musées et les galeries de Paris, j'ai tous ses livres, des petites merveilles, elle fait de sa vie une œuvre avec des photos, des installations, des poèmes, des films... Il faut de tout pour faire un monde, Sophie Calle met justement en scène son monde personnel, et vous invite à la suivre, avec humour, tendresse, surprises et émotions... Sophie Calle expose ? J'arrive, et me voilà au musée d'Orsay, où je ne vais jamais, trop de monde, trop de monde, animations, mais là, j'y étais avec mon commando préféré : ma (grande) petite-fille, mamie on y va ! Nous y voilà, amusant de passer devant tout le monde avec mon invitation récupérée auprès d'une amie d'une amie... J'avais repéré son projet d'exposition dans la boutique d'un libraire... Je m'en suis réjouie des jours et des jours à l'avance...


Tiens, tiens, Sophie Calle fait des siennes, chouette... Prochainement au Musée d'Orsay, les librairies avaient bien balisé le terrain, le livre existait, Sophie Calle est un bon coup éditorial

Sur le site un monde de dingues, nous, on vient juste pour Sophie Calle. Par la grande porte, avec l'invitation, ça roulait comme sur des roulettes, on a grillé tout le monde sur les files d'attente, nous sommes rentrées comme la reine d'Angleterre. Nous y voilà, rien à voir, il y a erreur sur la marchandise, quelques photos, très peu, des numéros de portes. La gare d'Orsay, inaugurée en 1900, voit son trafic grandes lignes supprimé en 1939. L'hôtel de trois cents soixante-dix chambres qui lui est adjoint ne ferme en revanche ses portes qu'en 1972. Dès la mise en place en 1978 du projet de musée consacré à l'art du XIXe siècle, l'équipe chargée de sa préfiguration a immédiatement à cœur de réunir et conserver tous les souvenirs restés encore en place de l'ancienne gare et de son hôtel, parmi lesquels notamment l'ancien registre du personnel. Sophie Calle séjourna (presque clandestinement) en 1979 dans la chambre 501, son quartier général, pour la recherche archéologique, de ce qui restait du Grand Hôtel. Le musée d'Orsay (le conservateur, Monsieur Donatien Grau) lui avait donné carte blanche, pour raconter cette histoire à sa manière, elle s'installa donc dans la chambre 501 pour la collecte d'infos. Il ne restait rien à saisir de vraiment touchant et Sophie Calle n'ayant pas trouvé le "sarcophage de Toutankhamon", a dû tirer sur la corde pour réunir des vestiges : elle fit quelques (très belles) photos, encadra des vieilles factures, des notes de frais de la clientèle et des relevés d'électricité... Exposa les vraies clés et les plaques des numéros des chambres, fabriqua des petites proses insignifiantes, bref, on s'est bien embêtées, rien à voir de beau, d'intelligent, de passionnant, pas de surprise, ben Sophie ! Le livre doit être plus fascinant !! Ma (grande) petite-fille s'ennuyait ferme comme moi, je voyais bien son œil éteint...


Les numéros des chambres, en farandole


Relevé des compteurs, design !


Numéro de la chambre QG, sous globe


Les vraies clés...


Les belles photos de Sophie

Elle n'osait pas encore me le dire, mais le véritable ennui avait commencé son travail de sape, ma (grande) petite-fille m'a dit : c'est ça, l'expo ? Difficile de répondre : mais oui, c'est là, voyons ma chérie... Il n'y avait rien à voir de palpitant, c'est vrai (à part les photos comme toujours). On ne peut pas dire non plus que j'ai un parti-pris négatif :


Ma collection perso des livres de Sophie !

Ses livres, je les ai (presque) tous, et même je vais me faire offrir son dernier, pour mon anniversaire, je ne peux pas (bien) vivre sans Elle !

Bon, mamie, c'est pas tout ça, si on allait voir les collections permanentes d'Orsay ? Bonne idée, nous avons fait l'animation auprès du public, on a bien ri, mais revu avec plaisir le Douanier Rousseau, G. Courbet, et quelques autres... Il y avait des milliers d'années que je n'étais pas venue à Orsay, je me disais aussi : pas près de me revoir avec ce monde, j'attends quand même gentiment l'expo de Rosa Bonheur en octobre...


Olympia, de G. Courbet, sans le chat à droite (ma photo)


Olympia, de G. Courbet, et le petit chat noir à droite, dans le noir, je ne l'avais jamais vu, et vous ?

C'est par dessus l'épaule d'une jeune femme, dans son smartphone que je l'ai aperçu (le chat noir), pour la première fois ! Je n'avais jamais remarqué l'animal, merci mademoiselle, heureusement que vous êtes là, pour me le faire voir, et nous avons bien ri ensemble !

Avec beaucoup de gens, nous communiquions sur les œuvres, chacun avait son histoire, sa préférence, devant la charmeuse de serpent du douanier Rousseau j'y suis allée aussi de ma petite anecdote... J'ai aimé ce tableau depuis mon adolescence, je ne sais toujours pas pourquoi, je le trouvais plein de mystère, de grâce, de poésie, cette belle nature me charmait, le flamant rose, la lumière... Un peintre naïf ? Sûrement pas... Tout était à mon goût, moi qui ne savais ni dessiner, ni peindre, qui connaissais si peu de chose en art... Je savais juste regarder, aimer, touchée... Sans discuter... Je suis toujours restée spectatrice (un peu plus avisée, aujourd'hui) des beautés du monde...


La charmeuse de serpent - 1907 - Le Douanier Rousseau (1844-1912)

Les brèves de mon comptoir :

 Aline !

Je l'ai rencontrée du côté d'Aligre, où je vais spécialement chercher mon pain à la farine intégrale que j'adore...

Elle sortait d'un immeuble immense, elle était là avec sa canne, toute menue, à petits pas, regardant dans le vide, j'avais même l'impression qu'elle n'y voyait pas grand chose. Elle avait sur le dos un pull tricoté à la main, avec de belles couleurs. Sitôt à sa hauteur, je lui fis compliments sur son pull, en regardant de plus près j'ai vu que le pull était troué de partout, des gros trous qui ne se raccommodent pas, juste bon à jeter ! Vous l'avez fait vous-même ? Il est vraiment magnifique ! Non, c'est ma mère qui l'a fait... La dame devait avoir l'âge de sa mère... Ah très bien, j'ai tout de suite vu qu'il était fait à la main, vous habitez dans cette maison ? Oui, je suis Ukrainienne, enfin ma mère était Ukrainienne. Ah bon ! Oui, je m'appelle Aline. Elle était perdue, elle stationnait juste devant la voiture qui voulait sortir de l'immeuble, le conducteur attendait patiemment qu'elle se pousse un peu. Aline il faut avancer pour laisser la voiture passer, je lui ai pris le bras pour l'aider à faire quelques pas de côté. Oui, je suis Ukrainienne. Très bien Aline... Je voyais bien que la discussion n'irait pas loin, elle était perdue... Vous aussi, votre tenue vous va très bien ! Elle m'avait retourné le compliment et continua sa petit route de quelques pas, vous vous appelez comment ? Je m'appelle Danielle, passez une bonne journée Aline, à bientôt... Elle était restée au beau milieu du gué, entre la chaussée et le trottoir, la canne légèrement levée pour me faire le signe du départ...

La boulangère :

À la boulangerie, la boulangère est toujours très aimable, souriante et pas pressée : bien sûr, je vous le tranche ? Oui, s'il vous plait, vous avez bien de la concurrence dans le quartier, vous arrivez à vous en sortir ? Oui, chacun à sa clientèle. Tout va bien alors ? Oui, oui tout va bien ! Moi, c'est chez vous que je viens tout le temps, votre pain est délicieux, je vous dois combien ? C'est gentil de me dire ça, tenez : elle glissa sur le comptoir un petit sac en papier blanc avec un truc dedans... Oh merci ! Il fallait pas, merci, c'est trop gentil, à bientôt... Sitôt sortie, j'ai mis la main dans le sac et j'ai vu un beau pain au raisins, enroulé comme un gros colimaçon tout plat, moi qui ne mange jamais de pâtisserie, je l'ai goûté illico presto, allez tant pis, j'y vais, et là, les orgues du ciel se sont mises à jouer un air divin... Le petit pain entièrement feuilleté était extraordinaire, fondant, craquant, imposant, les petits raisins, moelleux... Le petit Jésus en culotte de velours, comme dit souvent ma voisine...

Attention Danielle, la prochaine fois, prend ton pain tranché et file... Les petits pains, c'est pas pour toi !

Mes amis, la prochaine fois, c'est cinéma !! Le retour pour moi... Je vous raconte... Prenez soin de vous, le Covid, c'est pas que pour les autres... Je vous embrasse.