mercredi 27 janvier 2021

L'Échange !

 



Le fauteuil Louis Ghost en polycarbonate, de Philippe Stark

Toute une histoire !! J'adore ton fauteuil, me dit mon amie venue prendre un thé chez moi, il irait rudement bien dans mon séjour. Invisible et présent, fragile d'aspect et pourtant costaud, c'est mon style, contemporain, mais il semble inspiré d'un modèle de l'époque du roi Louis XVI. Philippe Stark, designer réputé, dit simplement :  en réalité, j'ai à peine esquissé la chaise Louis Ghost. Elle est issue de la mémoire collective... Nous voilà parties dans l'art déco pas bon marché, allez, on ne vit qu'une fois, nous n'avons plus le temps d'attendre, l'âge force la raison, et surtout l'empressement... Voilà des mois que nos achats se limitent aux navets, carottes, poulet, fruits... Pas d'excès, que de l'essentiel, il faut bien manger pour vivre ! Tu as raison, osons dépenser nos petites économies, le temps presse pour nous, faisons marcher le commerce, après l'aide à nos proches...

Mais mon amie, courons acheter ton fauteuil, et justement, j'avais le projet d'acheter deux chaises du même créateur, que faisons-nous ? Nous achetons sur internet, ou en boutique à Paris ? Tu décides, on fait comme tu veux... Nous irons à Paris, moi je n'aime pas du tout acheter sur internet, je n'ai pas du tout confiance, dit mon amie, allons à Paris, bien que je déteste ça, on ne peut pas se garer, les cyclistes roulent n'importe comment, rouler à Paris est une punition ! Mon amie y allait à reculons, mais moi je me disais, sournoise : j'espère bien qu'elle ne va pas changer d'avis, un petit coup de voiture, quand on ne conduit pas, on envisage plus facilement le déplacement !



La petite chaise me fait rêver depuis longtemps

Ça coûte beaucoup moins cher qu'une télé, pas besoin d'électricité, finalement, c'est un achat super écolo, pas d'arbre à abattre, léger comme une plume, de plus le vendeur au téléphone m'avait dit : vous profiterez de 15 % de réduction, on arrive, on arrive, mon amie tenait bon ! Nous voilà parties le lendemain, elle avait calculé l'heure, le trajet, activé le GPS, replié le banc arrière, la grande aventure, c'était pour nous. Voilà des mois que nous n'étions pas allées à Paris, à la Capitale, de plus dans les beaux quartiers, pas trop de circulation, le Paris d'antan, où on va comme je te pousse, il n'y a que le virus qui circule comme il veut, le maudit ! Nous nous garons sur un bateau devant un grand porche. Le magasin est immense, nos petits sièges nous attendent, emballés à l'avance, on fait chauffer nos cartes bleues, une petite facture et le tour est joué... Le retour s'est passé comme une lettre à la poste, mon amie rouspétait contre tout, c'était Paris qui lui faisait cet effet, le danger peut venir de partout !

Le fauteuil chez elle était parfait, royal, invisible, confortable, élégant, tu crois qu'il faut que je mette un petit coussin ? Pas du tout, malheureuse, il ne faut rien lui rajouter, tu en gâcherais tout le charme, il faut le garder limpide comme de l'eau, et beau ! Tu as raison, tu as raison, ne faisons rien... J'étais heureuse qu'elle soit totalement enchantée, mon amie est une perfectionniste, l'enchantement sera durable...

Sous sa housse, ma chaise écolo est arrivée

Ne bouge pas, j'emporte mes deux chaises, elles pèsent trois fois rien, j'habite au bout de la rue, nullement besoin que tu m'aides à les transporter, reste avec ton beau fauteuil Louis XVI... Merci, je t'embrasse, même masquées on pouvait voir nos yeux rieurs et contents...

Voilà, arrivée, enlevons les housses de ces beautés, une ici, l'autre là... Ah ! La housse enlevée, j'ai vu l'énorme rayure, profonde, sur le dossier de l'une d'elle... Impossible de la confondre avec un reflet, elle est rayée et bien rayée... Dans ma tête, je voyais déjà toutes les manœuvres que j'aurais à faire pour l'échanger : photo, téléphone, mails, négociations, rendez-vous, re-téléphone, re-mail, l'attente, l'échange à domicile, vont-ils vouloir ? J'étais dans de beaux draps... Car dans un premier temps, ils avaient tenté le : on vous préviendra quand vous pourrez venir la chercher !!! Pas question que je revienne une deuxième fois à Paris, vous vous rendez compte, une vulnérable comme moi, d'ailleurs je n'ai pas de voiture... D'accord, ne vous inquiétez pas, l'échange se fera à domicile ! Ouf !

Il faut attendre une quinzaine de jours, notre stock est en cours de réassortiment, la fabrication est italienne... On vous téléphonera... À la fin, comme dans les belles histoires, le miracle se produisit, pas de cris, pas d'énervement, pas de soulèvement de montagnes, ma petites chaise rayée et bien rayée fut échangée contre sa petite sœur, bien brillante, impeccable, sortie d'usine, nickel ! Merci beaucoup, vous avez tenu vos promesses, je suis contente, et c'était vrai, enchantée comme mon amie, de son fauteuil... Depuis, je me dis que j'ai bien de la chance de vivre avec mes petites chaises invisibles, pour l'entretien, juste un petit chiffon doux...

Mes amis, mes petites histoires, prennent de la place dans mon monde rétréci, les mots me servent de jumelles pour vous les raconter grandeur nature... Sortez masqués, gelés, distanciés... À très vite, je vous embrasse.

lundi 18 janvier 2021

"Chaque jour est un bon jour" : les petites prières !...

 



Tout le long du film japonais "Dans un jardin qu'on dirait éternel", de Tatsushi Omori (2018), j'ai réfléchi à cette petit phrase zen : chaque jour est un bon jour...

Dans le film, d'une lenteur infinie, bienfaisante et belle, nous assistons à l'apprentissage de la cérémonie du thé par deux jeunes Japonaises. Au bout de vingt, il reste encore tellement  à apprendre, pour tout maitriser au doigt et à l'oeil...Comme dans la vie, nous sommes toujours loin du compte...

Je me disais : vraiment, chaque jour est-il un bon jour ? Tant il y a de jours qu'on voudrait faire sauter, effacer du calendrier, extirper de notre mémoire, ne jamais avoir vécus... Tant de jours sont si mauvais, si tristes, si cruels, comment trouver "le bon jour dans le mauvais jour" ?

Comment peut-il rester une miette de bon jour dans une vilaine journée, très vilaine, affreuse ? À bien y réfléchir, le proverbe zen nous éclaire, nous en dit long sur nos perceptions profondes... Si à chaque jour suffit sa peine... Les petites joies ne sont pas loin, prenons-nous le temps de les mentaliser ? De les apercevoir ? Tenons-nous assez compte de la beauté, dans les jours fracassés ? Car, dans chaque jour de pensées sombres, il y a toujours une petite lueur, il faut s'y accrocher... Ça prend le temps qu'il faut... La beauté sait très bien y faire pour combler les trous noirs... Il faut laisser agir, ne pas se presser de tout jeter à la poubelle...



Ce matin, au téléphone, je disais à ma (grande) petite-fille combien la nature était belle, combien je l'ai regrettée à chaque départ des maisons de campagne que j'ai louées dans ma vie. La moindre pince à linge sur le fil pouvait devenir un objet d'art, pour peu qu'il y ait de la couleur et du soleil, voyez donc les lignes de linge qui pendent d'une rue à l'autre à Venise, et qui font l'éblouissement des touristes... L'art est partout, regardons !


Mon éblouissement dans l'Indre, 2017


Et à Venise, 2009

"Chaque jour est un bon jour" : quand vous avez cherché partout de quoi vous consoler, vous sortir d'un jour déprimant, un jour pour rien... Et êtes tombé nez à nez avec un peu de beauté que vous n'attendiez pas, le presque rien du "bon jour", le bonjour de votre voisin, d'un de vos proches, la petite couleur de ses yeux, la poignée de main (avant le covid). C'est donc possible ! Mais bien sûr !

Les petites prières

Danielle, dis-moi, il est sur quel sein, ton mal ? Je pense tous les jours à toi et je fais une prière. Mais voyons, chère Mireille, avec tous les saints du Paradis que tu connais déjà, tu vas avoir du mal à t'y retrouver ! Nous avons bien ri, mais j'avais au cœur sa douce prière journalière, elle savait pourtant que je  ne croyais en rien, la mécréante absolument totale, pas un Dieu, pas un ciel ne trouve grâce à mes yeux, juste tout le vivant et la Terre me touchent... Merci, merci mon amie, pour tes prières, vous imaginez, une personne qui murmure pour moi des vraies prières de chrétienne, elle intercède pour moi dans des hauts lieux inconnus, elle prend de son temps pour moi... Ça va peut-être marcher ? Merci, mon amie, pour ta générosité et ton attention...



Détail - La Madone sur son trône adorant l'Enfant Jésus - Antonio da Negroponte - vers 1470

Si les petites prières de mon amie pouvaient venir jusqu'ici, à Venise, se nicher dans les couleurs, les ors, les personnages et la beauté du paysage, devant le plus beau tableau que je connaisse, pour l'avoir tant admiré à chaque séjour... Mais les prières font ce qu'elles veulent...

Mes amis qui passez par ici, prenez soin de vous, portez masque et ayez gel en poche, attendons sagement notre tour de vaccin, on s'en portera tous beaucoup mieux... Je vous embrasse. À très vite...

mercredi 13 janvier 2021

La petite enveloppe et le calendrier !

 

Les petites enveloppes

Chaque année c'est la même chose, je me pose cette question fatidique : combien est-ce que je donne d'habitude à ma chère gardienne pour le 1er janvier ? Jamais je ne m'en souviens, alors je refais mes calculs, un billet c'est trop peu, tout est trop peu finalement, pour tous les services qu'elle nous rend, ses gentillesses, sa courtoisie, son efficacité... Dans un grand immeuble, ça devient un luxe d'avoir une gardienne (même si elle s'occupe de plusieurs bâtiments), moi, je l'appelle mon "ange-gardienne", et elle me dit : faites attention à vous, ne sortez pas de trop, vous allez bien ? Voilà plusieurs jours que je ne vous vois pas... Mon ange-gardienne est toujours sur le pont. Tout le monde pense qu'il faut faire des économies sur les gardiennages, c'est un tort, quand ils font bien leur travail, tout le monde est heureux, le patrimoine ne se dégrade pas, ils reprennent les récidivistes sur les papiers qui traînent, sur les souillures dans les ascenseurs. La courtoisie, le vivre ensemble auraient du mal à survivre sans eux ! Souvent, on me dit : Danielle, tu as une chance exceptionnelle d'avoir ton "ange-gardienne", alors là je dis : OUI !

Donc, j'ai glissé la petite enveloppe dans sa boîte aux lettres, la réponse ne s'est pas faite attendre, avec des mots chaleureux, remerciements réciproques, et patati et patata, bonne année, plein de santé, de bonheur, plein d'avenir... Rien n'est changé, c'est pas le virus de l'année 2021 qui va nous embêter encore longtemps, on va surmonter tout ça... Mais moi, je pense aux presque 70 000 morts de France, aux malades qui ont eu beaucoup moins de chance que les miens, que moi... L'année 2020, il faudrait la rayer des calendriers, en espérant qu'en 2021 on verra le bout du tunnel !


Dedans, il y a des tas de mots adorables, chaleureux...

Ma voisine amie m'a textoté : attends-toi à recevoir du courrier sur ton paillasson ! Mission accomplie, on s'est quand même vues à la dérobée, masquées, pas tout à fait gantées, mais de loin... Je suis rentrée avec le précieux paquet, tout plat, enveloppé dans un joli papier fleuri. Un beau calendrier ! Mais pas n'importe lequel, douze mois d'arbres remarquables, 30 jours par mois, je vais pouvoir les avoir à l'œil doux, marronnier, sequoia, chêne... Je n'oserais même pas tourner les pages, comment en abandonner un pour un autre ? Comment je vais passer au mois de février en laissant au dos la photo magnifique d'un séquoia millénaire ? Cette année sera difficile, un arbre par mois, c'est cruel !


Les arbres sont mes chouchous

Je n'ai pas envie de sauter le mois de juin, celui du marronnier en fleurs, je pense que c'est un banc qui est contre son tronc, 30 jours seulement pour être dans son ombre, c'est peu. Au mois d'août, c'est un fantastique baobab (si je ne me trompe), les noms des arbres ne sont pas mentionnés sur ce calendrier, c'est bête ! Comment faire, j'ai essayé de photographier les arbres du calendrier avec l'application PlanNet, mais ça n'a pas marché, sauf pour le marronnier en fleurs, PlanNet ne pouvait pas se tromper, alors, j'ai cherché le nom du photographe (qui figurait en tout petit sur le côté), j'ai trouvé son site, et je lui ai envoyé un mail pour lui demander le nom des arbres qu'il avait magnifiquement photographiés...

Il m'a répondu gentiment que le gros arbre tortueux de la couverture était un vieux chêne d'une forêt anglaise... Pour les autres, je lui ai envoyé les photos du calendrier, comme il me le demandait... J'attends sa réponse...


Le magnifique marronnier en fleur du mois de juin (Dugdax/Shutterstok.com)


Pour le mois d'avril, c'est un baobab (je crois, j'attend la réponse du photographe)
Monsieur Fabrice Milochau, merciii...

L'année commence bien, des cadeaux et des sourires sur fond de sinistre sanitaire, bientôt ce sera mon tour de vaccination, la sécurité de ne pas attraper la forme grave de la covid-19, c'est déjà ça...

En ce moment, le temps est si gris que je ne peux pas faire de photos, pas besoin d'aller dans les squares, ni nulle part, le ciel est gris comme le fond d'une casserole... J'attends que le ciel change de couleur...

Mes amis, prenez soin de vous même avec le vaccin, il faudra continuer les bals masqués... À très vite, je vous embrasse

mercredi 6 janvier 2021

Le Père Noël de janvier 2021

 


La saison des oranges du Portugal

J'avais posé près de la balance quelques oranges et de la salade de mâche, en vrac, bio, que je désirais acheter, et que notre primeur avait eu la bonne idée de nous proposer... Puis deux jeunes femmes rieuses, vives, ont fait leur entrée dans la boutique, l'une qui n'avait pas de masque, portait la tenue des musulmanes, peut-être un peu plus croyantes que les autres (?), toute de noir vêtue de haut en bas avec ce vêtement ample qui couvre tout le corps... Elle avait un visage éclatant, elle était souriante des pieds à la tête, mais sans masque ! Pour une fois, notre primeur avait osé lui dire : madame, vous ne pouvez entrer dans la boutique, le port du masque est obligatoire, trop souvent il ne le faisait pas, ce qui m'énervait un peu, car son magasin est tout petit, mais heureusement pour lui, les clients ne lui manquent pas... Donc, on jouait des coudes à moins d'un mètre...

La copine de la jeune femme portait le masque. Courte vêtue et aussi souriante que l'autre, elle allait et venait dans la petite échoppe, prenait un à un les légumes et les présentait à son amie : et ça, tu veux ? Et ça ? Non, non, je veux juste un concombre. Elle le soulevait du bout des doigts, il coûte combien ? 0,99 centimes, d'accord, je peux payer en carte bleu ? Le primeur la regardait avec des yeux ronds ! Ben non madame, avec la carte bleue, c'est 5 euros le minimum !



Bon, bon, bon, alors, je prends ça... Elle fit virevolter gracieusement une main au dessus de mes oranges  et de ma mâche, je ne comprenais pas bien ce qu'elle voulait. D'accord d'accord, j'ai vraiment besoin du concombre, et vous mettez ça sur la note... Mais madame... Elle continuait allègrement à faire ses courses sur le pas de la porte, elle s'était juste avancée pour désigner mes fruits et légumes prêts à la pesé, et répétait : je prends ça, et ça, justement, c'était mes courses... Eberluée, je lui dis : mais madame, vous voulez payer mes courses ? Bien sûr, avec mon concombre, ça fera le compte, elle avait calculé dans sa tête que le concombre et les petites courses de la petite dame (moi) devraient faire un peu plus que 5 euros, pour payer avec sa Carte bleue... Le patron  avait beau lui dire que les oranges, ça pesait lourd, elle n'écoutait pas... Visiblement elle n'était pas à un euro près !

À la fin, j'ai bien fini par comprendre que je me trouvais devant le Père (Mère) Noël... Madame, vous êtes vraiment originale, je vous remercie, c'est bien la première fois de ma vie que quelqu'un d'inconnu paye mes courses à ma place, ne changez rien, vous êtes vraiment la Mère Noël la plus sympa que j'ai rencontrée... Merciiiii, bonne année et bon concombre, nous étions tous à rire dans le petit magasin, je suis repartie avec un beau petit sac en papier rempli d'oranges et de salade, aux frais d'une princesse démasquée...

Je crois bien que ce gentil cadeau de très près de 7 euros nous portera chance à toutes les deux, l'année commence bien : cadeaux, rires et bonne humeur... Encore merci, chère madame !

Cette belle histoire de Noël, je l'ai racontée à tous ceux qui voulaient bien l'entendre, la jeune femme, je la revois encore, contente d'avoir résolu son petit problème, généreusement, gracieusement, ça vaut tout l'or du monde !

Mes amis, je ne sais sur quel chemin je vais me trouver demain, mais rendez-vous pour de nouvelles aventures des rues... Prenez soin de vous, le vaccin est presque là, à notre portée, ne risquons rien jusque là ! Je vous embrasse...