lundi 31 octobre 2022

Les "z'yeux de bœuf" dans l'eau ! Conversations de campagne... (3)

 


Pas d'ombre au tableau, tout est beau... (2022)

Mon ami me dit souvent : Danielle, moi, je suis au dessus de l'ordinateur, au dessus des prévisions météo de ton téléphone ! Il veut dire par-là qu'il se moque bien d'internet et son cortège d'informations, lui il a ses secrets, ses intuitions, sa culture ancestrale berrichonne sur ces choses-là. Quand tu veux savoir le temps qu'il fera demain, tu me demandes... Quand tu veux savoir s'il y aura des tomates au jardin, tu me demandes... Intuitions jardinières, non, savoir du jardinier qui connaît bien son affaire ! Donc, quand je voyais sur mon téléphone qu'il allait faire beau demain, après, j'allais le voir pour qu'il me confirme le coup. Pour prévoir les chaussettes hautes, la cape de cycliste, ou le tee-shirt à manches courtes et le chapeau de paille...  À chaque rendez-vous météo, on riait beaucoup, car nous savions tous les deux que c'était plus souvent mon téléphone qui avait raison ! Mais quand même, pas toujours...

Mon ami se moquait bien des algorithmes, des recherches Gogol, des développements politiques du monde, il avait son idée sur tout et moi j'avais les miennes, et en creusant un peu, j'étais certaine qu'on y aurait vu des grandes différences... Ça aurait même pu gâcher nos vacances, va savoir...


Ma nature morte (2022)

Qui aurait besoin de se gâcher les vacances ? Il y a tellement de terrains plus neutres dans nos cerveaux pour discuter de la pluie, du beau temps et d'un tas d'autres choses que l'air du temps mondial ! Il savait tout faire avec humour, gentillesse, humanité, il se livrait facilement sur sa vie et, comme vous le savez, moi j'aime beaucoup ça, je l'écoutais toujours avec enthousiasme et grand intérêt... Un jour qu'il pleuvait fort, pour m'amuser il me raconta l'histoire de la pluie qui tombait sur l'étang : tu regardes bien la surface de l'étang, pour voir s'il y'a les "z'yeux de boeuf", si oui, c'est qu'il va pleuvoir pendant trois jours au moins. Allons bon, c'est quoi des "z'yeux de boeuf" ? Il me la faisait météo berrichonne, et je n'y comprenais rien... Des" z'yeux de boeuf", c'est quand la goutte d'eau qui tombe sur l'étang fait une grosse bulle de savon, comme un œil de bœuf, tu vois ? Pas du tout, je ne voyais rien, absolument rien, il me fallait des travaux pratiques, comme il pleuvait "comme vache qui pisse", je me suis dépêchée d'aller voir la surface du petit étang, dans le jardin, et là, j'ai vu les "z'yeux de boeuf" ! Zut, il va pleuvoir pendant trois jours, c'est exactement ce que disait mon téléphone. Les "z'yeux de boeuf" ressemblent tout à fait aux gros yeux globuleux du bœuf  qui vous regarde dans les yeux, pas d'erreur, il va pleuvoir !


Les yeux du gros bœuf (2022)

Mon ami, qu'en penses-tu, il va pleuvoir aujourd'hui ? Le ciel était gris acier, nos conversations commençaient par la météo, comme dans l'ascenseur de ma tour, une fois que le fil etait tiré, je buvais ses paroles... Mais non, tu peux aller te promener ! Je l'écoutais et prenais mon vélo pour la petite course de limace tout autour du pâté de prairies...

Danielle, tu viens, nous allons à mon étang ? Un bel endroit que j'adore, au milieu de nulle part, même avec une boussole tu te perdrais, on n'entend que le silence, les oiseaux, avec un peu de chance les hérons. La petite voiture nous déversa sur les berges de leur magnifique étang, il faisait un peu gris, un peu frais, on va boire du thé, dans la cabane il y avait tout ce qu'il fallait pour ça... Mais voilà, dans la boîte il restait cinq allumettes pour allumer le gaz, zut, les allumettes étaient humides, le grattoir de la boîte aussi, impossible de préparer le thé, malchance, une bonne boisson chaude aurait fait notre bonheur à tous ! Tout à coup, il eut une idée de génie, jamais rien ne le décourage : je vais les réchauffer sous le capot de la voiture... Les tuyaux étaient encore chauds, nous venions d'arriver, et que je te frotte, et que je te presse avec douceur, la boite entre ses mains était traitée comme de la soie... J'étais partie faire une petite visite aux chênes et j'entendis sa voix : ça y est, ça marche, le gaz allumé, les tasses prêtes, l'eau se mit à bouillir, la joie, boire un bon thé au bord de l'étang, le bonheur complet à la campagne... Il s'en était fallu de peu...


Le réchauffe boîte d'allumettes


L'entrée du Paradis (2022)

Je me demandais toujours s'il pouvait y avoir plus belles entrées au Paradis, sans tambour ni trompette, rien devant, rien derrière, la nature se pressait au portillon  pour nous accueillir, le cœur battant, je voyais bien qu'il y avait eu du changement par çi par là, quelques arbres coupés, morts de sécheresse, le niveau de l'eau, plus grise, avait baissé, l'herbe était plus jaune, les chênes étaient plus gris. Le thé était fin prêt, personne n'était pressé de rentrer, ni trop chaud, ni trop froid, un beau dimanche à la campagne !

Mes amis, la campagne n'en finit pas d'inspirer des dialogues, des observations silencieuses, des images, des façons de faire... À bientôt pour le chapitre quatre !! Portez vous bien, restez prudents.


En attendant la paix

jeudi 27 octobre 2022

Dans l’Indre : j'y suis restée le plus longtemps possible ! (2)


Les deux hêtres (2022) Le château végétal !

La première, première chose à faire était d’aller "les" voir, toutes affaires cessantes ! Nous étions arrivées un dimanche, tous les magasins étaient fermés, nous avions largement le temps de "passer les voir", comme on va visiter des parents affectionnés que nous n’avons pas vus depuis un an... Ma petite-fille m'avait accompagnée, elle adore la nature, je lui avais beaucoup parlé des vieux hêtres, ces deux grands arbres sublimes qui m'avaient fait pleurer il y a déjà deux ans. Je les avais découverts, par hasard, au cours d'une conversation de rue, j'avais mis pied à terre, mon vélo à la main, pour mieux questionner la dame : vous cherchez des vieux arbres ? Oui, vous en connaissez ? Oui, un peu plus loin, avec votre vélo vous y serez bientôt, alors, tout de suite à gauche, plus vous les approcherez, plus vous les verrez grandir, ils sont immenses. Je n'avais pas de passion particulière pour ces grands conifères... Mais, j'ai pédalé, pédalé et je les ai vus, immobiles et noirs...

La petite prairie où ils trônaient n’avait pas été fauchée, la végétation partait dans tous les sens au milieu du pré, j’avais déjà les jambes éraflées jusqu’au sang. Par où passer sans se faire encore égratigner ? Droit devant nous, j’essayais de suivre une piste, des traces, il fallait se garer à gauche, à droite, aïe, aïe, ça pique, ça tire, ça frotte. Victimes des herbes, des orties, des ronces, rien ne nous arrêtait. Ma petite-fille levait les jambes assez haut pour être épargnée par les coupures, elle riait, jetait un œil par derrière, elle ouvrait la voie : par ici mamie ! La mamie suivait derrière, tout va bien, je restais dans ses pas, nous y arrivions. Les voilà ! Entourés d’herbes hautes, quelques branches cassées, leurs troncs se dressaient comme des forteresses, des tours de garde : viens ma chérie, entourons-les de nos bras, prenons leur force, même avec nos bras grands, très grands ouverts, nous n’arrivions pas à en faire le tour. Ma chérie, il faut le câliner et faire des vœux  : bonheur, force, sagesse, longue et belle vie… Nous mettions le paquet sur les vœux !


Les deux géants (2022)


(2022) Ma petite-fille et le hêtre 


Le câlin, les vœux de force et de bonheur (2022)

Après les avoir pris en photo (tablette, appareil photo, téléphone) dans tous les sens, nous avons rebroussé chemin, tantôt en marche avant, tantôt en marche arrière, pour éviter toutes les grandes herbes égratigneuses qui ne me faisaient pas de cadeau, le sang dégoulinait de plus belle le long de mes chevilles, mais le plaisir d'être là, de les revoir, avait été beaucoup plus fort, de plus j'étais heureuse de les avoir présentés à ma petite-fille. Sorties de l’ombre des hêtres,  nous somme allées voir le grand chêne à l’entrée de la propriété, cent mètres plus haut, un autre centenaire, un arbre magnifique, puissant, quelques branches cassées, mortes, mais il gardait toute sa beauté et sa prestance.


Les deux hêtres (2022)

Comme les années passées, je n'osais pas franchir le seuil de la propriété, par peur de chiens qui ne se manifestaient jamais ! La peur était en moi, j'avais peur des chiens. Le petit chemin qui menait aux habitations était pourtant très court, au bout de la petite allée, un homme sur un vélo venait à nous : bonjour monsieur, nous nous émerveillons à voir ce chêne, il a bien cent ans ?  Ah ! Bien plus de cent ans, je suis pressé, excusez-moi, demandez à mon père, là-bas, il saura mieux que moi... Il repartit à grand train, mais nous n'avons pas osé nous aventurer plus avant... Nous n'avons donc rien su de plus même sur les hêtres ! L'année prochaine peut-être ?


Le chêne puissant (2022)


Le grand chêne raboté à gauche (2022)


Au bout du petit chemin (2022)

J'ai parlé à tout le monde des hêtres, du chêne, de la propriété très belle et ancienne du lieu, personne ne connaissait, ni de près ni de loin. Parfait, gardons ça pour moi, j'y reviendrai... L'année prochaine... C'est comme ça que les hêtres sont devenus "Mes hêtres", comme la station de métro que je fréquente le plus souvent à Paris : Arts et Métiers, qui s'appelle pour moi "Danielle". Je ne demande pas qu'on la débaptise, mais qu'on lui donne au moins mon nom d'usage dans un petit coin : Danielle...

Au cours de mon long séjour, j'y suis remontée une autre fois, j'avais emporté mon tripode, j'ai pu m'asseoir sous les chênes qui bordaient la propriété, tout près des hêtres... Dans mes terres ! Assise là, dans le silence, sans prendre de photos, j'entendais le chant des oiseaux, pas de jumelles non plus ! Dans le plus grand dépouillement...

Lors de ce séjour, j'ai été moins tentée par la photographie, je voulais voir avec mes yeux, garder au fond de moi toutes les nuances, les odeurs, les luxuriances d'une nature encore sauvée par le gong, je guettais les moindres changements, et je me disais, pourvu que ça dure !

Ma petite-fille est repartie, la différence a été grande...

Mes amis, à la prochaine de l'Indre, portez-vous bien, restez prudents, moi je vais reprendre les projections dans la salle de cinéma de mon quartier...

vendredi 21 octobre 2022

Jour après jour ? Dans le désordre le plus total... La petite promenade... (1)

 

Le gros taureau

Aussitôt arrivée, il fallait que j'y aille, pour le regarder dans le blanc des yeux : ben mon p'tit gars, comment tu vas ? Il avait cet air impassible qui me plaisait, sa lenteur me donnait toujours le temps de déplier mon petit siège tripode (acheté avant de partir dans une grande maison de sport) pour un bon face à face très confortable avec l'animal... Le temps passait, le plus longtemps possible... Avant d'arriver jusqu'au gros taureau et ses dames, il avait fallu que je descende la grande côté qui me faisait un peu peur : comment ne pas trop pédaler, freiner juste ce qu'il faut, à petites touches, pour arriver en douceur ? J'avais toujours en tête ce que m'avait dit mon fils : maman il faut y aller mollo, mollo, un peu chaque jour...  Chaque année maintenant, je freinais dans ma tête, bien avant de monter sur le vélo... Dès mon arrivée, bien garé dans le four à pain, "mon" vélo m'attendait avec un petit panier arrière, les pneus gonflés à bloc, aussi poussiéreux que l'année dernière, on voyait bien que personne, vraiment personne, ne l'avait utilisé, c'était le vélo de Danielle, le vélo le plus pourri du cheptel, le vélo qui me convenait le mieux, tous les autres ne lui arrivaient pas à la cheville, c'était le "mien" ! Le panier était nouveau, installé par mon ami, pour transporter mes courses, il était l'élégance même, pour les promenades il était toujours au complet : je mettais ensemble l'appareil photo, la tablette, le téléphone, le tripode, le porte-monnaie, le petit pull, quand ça brouillassait, et que je me trouvais dehors, j'avais toujours avec moi la cape en plastique du cycliste averti. Souvent j'oubliais la paire de jumelles, le retour devait se faire, d'abord, avec mes vrais yeux, sans intermédiaire, il fallait que je perçoive le chant des oiseaux sans chercher à les dénicher avec les gros yeux qui grossissent 50 fois ! Plus tard, dans mon séjour, j''emportais aussi une pierre pour casser les noix tardives ramassées dans les chemins ! Un délice...


Il ne fait plus attention à moi !


À l'ombre...

La nature était plus cassante, plus grise, les prairies n'étaient pas aussi pimpantes que l'année passée... Après les vaches, en montant la côte à pied, mon vélo à la main, la très petite vigne qu'on apercevait à gauche était déjà vendangée, pas une grappe n'y avait échappé, les ronces poussaient dans les quelques lignes de la vigne d'à côté, abandonnée, que se passe-t-il ? Le propriétaire est mort, Danielle, plus personne ne s'en occupe... Et le noyer qui leur faisait face ? Broyé par l'été trop chaud, un squelette, aucun rejet au pied, pas de renaissance à espérer, celui d'à côté ne valait pas beaucoup mieux, une noix par ci, par là, pas de quoi remplir un sac, une main, bon, attendons l'année suivante pour voir !


Vélo, panier, noyer broyé !

Pas une âme qui vive, le silence, soleil et ciel bleu, les premières rencontres avec les paysages valaient de l'or ! Je laissais mon vélo au piquet pour la promenade à pied, droit devant moi, dans le petit bois le châtaignier en avait pris un coup, les châtaignes n'étaient pas pour tout de suite... Des tas de bois coupés n'avaient pas bougé depuis des années, coincés entre deux arbres, ils attendaient des costauds pour le chargement qui n'est jamais venu... Pas de flambées de cheminées pour ceux-là, ils se faisaient dévorer par les ronces, le lierre, ils embellissaient la nature, naturellement...


Les branches mortes sur le châtaignier centenaire


Les petits tas anciens

Je plantais mon tripode où je voulais, allez hop ! Les trois pieds dans la terre, bien stable, je m'étais mise en mode "tortue des champs" chaque seconde durait une minute, de temps à autre, seulement quand il sonnait, je sortais mon téléphone,: oui, mais non, tu ne me déranges pas du tout, je suis au milieu d'un petit bois, c'est beau, ça brille, ça scintille en silence... Comment vas-tu ? Les choses de la vie courante prenaient place dans tout ce que je voyais avec bonheur : fais attention à toi, d'accord, à la prochaine, mais non je n'ai pas peur, c'est toute seule que je suis bien pour profiter à plein du décor naturel resplendissant...


Dans la lumière du soleil, les petits arbres avaient des airs de Noël

Quand mon amie me voyait revenir "à pas d'heure", elle ne manquait jamais de me demander : ben dis donc, Danielle, "où que t'es allée encore traîner" ? Avec un grand sourire, et l'accent berrichon qui me faisait toujours rire, je lui décrivais alors avec plaisir le petit tour que je venais de faire, les choses que j'avais vues, pour les impressions, les odeurs, les virevoltages de la lumière dans les feuilles, l'œil en coin du taureau, les petits empilements de rondins qui vieillissaient sous les ronces, c'était plus difficile, mais elle comprenait toujours que j'avais retrouvé mes marques !

Ainsi, les semaines berrichonnes allaient vivre leur vie...

Mes amis, portez-vous bien, je travaille aux "impressions" de la campagne et des rencontres...
Je vous embrasse...

mardi 18 octobre 2022

Le retour ! Le Berry, c'est fini... Je farfouille, je classe, je compose...


 Un petit coin que j'affectionne particulièrement (2021)

Mes amis, à moi les petites histoires, les états d'âme et les apprentissages de campagne ! Les rencontres, les retrouvailles... Je reviens de loin... Juste quelques petites centaines de kilomètres de la région parisienne ont suffi pour me changer la vie... Tout se faisait dehors, sous les arbres et les paysages, pas de lecture, pas de broderie, pas de perles, rien de rien, mes alliés principaux étaient : mon vieux vélo, ma genouillère et mon petit siège tripode... Je vous raconte, attendez-moi encore un peu...

Ce matin, en refaisant mes courses chez mon primeur préféré, j'ai remis mon masque ! 

À bientôt !