lundi 22 mai 2023

Les éboueurs de mon quartier m'ont consolée ! La tante Zelda si gentille ! Le cinéma ! L'éléphant qui trompe énormément...


 Les roses des jardins ce printemps, dans mon quartier...

Les éboueurs m'ont consolée :

Ras le bol ! Je m'impatiente ! Dans ma tour, depuis que notre chère gardienne est absente (quelques semaines, à rallonge...), c'est la débandade, sauve qui peut ! Chacun pour soi !

J'avais très vite remarqué que personne ne faisait plus attention au jour précis du ramassage des encombrants dans ma rue, les vieux meubles et les matelas défoncés attendent tous les jours le ramassage qui ne passe qu'une fois par semaine. Les papiers, les plastiques traînent un peu partout, les anciens de l'immeuble veillent encore un peu à la propreté, mais qui a envie de faire le gardien de la paix, l'emmerdeur du trottoir,  le rouspéteur(euse) par intérim, le redresseur de torts ? Personne ne veut mériter le titre de casse-pieds ! Notre chère gardienne portait, en grande professionnelle, toutes les casquettes des discordes pour faire régner la paix. Quand elle est présente, elle veille au grain, pour le bien de tous... 

Mais voilà, sans elle, livrés à nous-mêmes, c'est une autre paire de manche !! La catastrophe annoncée : cause toujours, je m'en moque, je mets mes affaires où je veux, mêle-toi de tes oignons, la paix des ménages est en danger, la paix tout court ne va pas être d'actualité, les gens se moquent des voisins ! Comme je disais tout ça aux éboueurs qui passaient dans ma rue avec leur gros camion : les gens ne sont pas responsables, c'est terrible, rien à faire... Madame, ne vous faites pas de bille, ne vous bouffez pas la santé pour ça, vous n'allez pas y arriver, voyez, moi, ça fait depuis 1988 que je fais ça, rien n'a changé, rien du tout, c'est toujours le gros bordel, les gens ne changent pas ! Abandonnez madame, abandonnez, bonsoir ! Et ils sont repartis doucement, sur les chapeaux de roues de la benne à ordures...

Ainsi donc, si même les éboueurs ne rouspètent plus, je vais arrêter aussi, je vais continuer à faire mon petit ménage anonymement, ramasser les papiers en bas des marches, près des boîtes aux lettres. La tour sera bien gardée .. Bonjour, madame, bonjour monsieur, ça va ? Il fait beau, il faut bien que ça pleuve, nous en avons bien besoin... Et puis voilà !! Roulez jeunesse, la citoyenneté, le respect, c'est pas encore pour demain, ni même pour après-demain, il faudra attendre, malheureusement, longtemps, peut-être tout le temps...

Comme je me rendais à la répétition de chorale hebdomadaire, j'ai raconté l'anecdote à mes amis de chœur, tout le monde riait, mais pensait comme moi : Danielle, arrête de te mettre la rate au court-bouillon, chantons !


Roses blanches dans le lampadaire

La tante Zelda :

Puis, un autre jour, la rencontre réjouissante dans le bus, avec une petite dame à chapeau, toute simple, assise souriante, en face de moi, elle me regarde et s'écrie : vous me faites penser à ma tante Zelda, vraiment, vous lui ressemblez comme deux gouttes d'eau, incroyablement, mêmes yeux, le petit sourire en coin, c'est elle ! Ah, me dis-je, voilà une bonne cliente pour moi, voyons voir... C'est très amusant cette ressemblance avec votre tante Zelda, vous l'aimiez bien ? Oui beaucoup, j'ai que de très bons souvenirs d'elle. Racontez-moi votre tante Zelda, ça me ferait plaisir... Oui, c'était la sœur à ma mère, elle a eu une vie de rêve. Ah bon ? Oui, figurez-vous qu'elle a épousé son cousin. Germain ? Oui, tout ce qu'il y a de plus germain, il était très riche, gentil, beau, le truc de dingue. Ils ont donc fait un mariage d'amour ? Oui, dans la famille tout le monde disait que ça ne se faisait pas d'épouser son cousin. Aïe, et ils l'ont donc fait quand même, du coup ? Oui, et ils ont été heureux toute leur vie. Comme dans les contes de fées, non ? Si, vous imaginez, un truc de dingue, tout le monde les jalousait : beaux, jeunes, riches, mais cousins ! Elle faisait quoi, votre tante Zelda ? Ils habitaient dans le nord, ils faisaient du tissage de dentelle sur leurs métiers très modernes pour l'époque, ils ont gagné beaucoup d'argent. Super ! Elle, elle faisait les comptes et lui s'occupait des métiers, ça faisait un boucan, quand tous les métiers travaillaient ensemble... Ce bruit, ne vous gênait pas ? Pas du tout, c'était comme le bruit de la mer, le galop du cheval, un bruit naturel...

Vous avez connu les métiers bruyants et la belle dentelle alors ? Oui, j'ai des beaux souvenirs. Ils ont eu des enfants ? Oui, deux, tout ce qu'il y a de plus normaux... Chouette pour votre tante ! Quand on devait aller chez eux pour une fête, Noël, anniversaire, elle réservait toujours une pièce d'or pour chacun des cousins. Pas possible ! Oui, ils avaient les moyens. Bravo, vous avez été gâtée, alors ? Ah ça, vous pouvez le dire, pourris, gâtés, elle n'oubliait aucune fête du calendrier, même si on ne venait pas, elle mettait la pièce de côté... Elle était très généreuse. Bravo pour madame votre tante !

Plus l'histoire avançait, et plus j'étais ravie de ressembler à la tante Zelda...

Mais quand notre station est arrivée (la même), elle me dit : c'est quoi votre vrai prénom ? Danielle, je n'ai pas de faux prénom, pourquoi ? Ma tante Zelda avait un surnom, je ne me souviens plus du tout du vrai, tante Zelda, c'était tante Zelda... Merci madame de m'avoir raconté cette très belle histoire. Merci à vous de m'avoir écoutée... Bonne journée !!

Nous nous étions comprises immédiatement, le cadeau de la tante Zelda, notre brève rencontre, notre communication avait été parfaite !

Il y a des jours où tout se met en place pour faire un bel instant, un beau jour, des petits bonheurs... Il y a peu de risques à prendre, seulement un petit sourire, un bonjour, dites-moi... Et l'histoire commence...


Les iris au coin de ma rue

Après la descente d'autobus, j'ai encore fait deux haltes, avec deux personnes différentes, un : bonjour, ça va ? Ben... Le ça va qui n'allait pas... Ah zut ! Courage, tiens bon, il était de la génération de mes fils, habituellement, toujours souriant, joyeux, mais nous n'avons pas pu aller bien loin, il buvait un verre avec des amis, j'ai bien vu la tristesse dans son regard... Ensuite, furtivement, à cet homme qui criait tout le temps "amen" en arpentant les rues (quand il lâchait ses médicaments), quelques secondes avant qu'il ne monte dans le bus : ça va ? Non, ça ne va pas, c'est des jours où ça ne va pas. Oh quel dommage, prenez courage... À bientôt, mais quand ?

Au cinéma :

"Showing up" de Kelly Reichart, un très beau film américain (présenté au festival de Cannes en 2022). Le pitch est simple : le quotidien d'une artiste sculptrice, quelques jours avant le vernissage de son exposition. Quelques œuvres se font sous nos yeux, sculpture, cassures, un ratage de cuisson... La vie de famille tendue (frère à l'ouest, père trop naïf qui reçoit des squatters chez lui, mère très inquiète pour la santé mentale du fils), tendue aussi les relations avec sa logeuse qui ne répare pas la chaudière, pas de possibilité de prendre une douche, et le chat qui chasse l'oiseau qu'il faut ensuite emmener chez le vétérinaire... Ainsi de suite, les jours se précipitent avec lenteur.... Sur les épaules de notre artiste... Superbe ! J'ai toujours attendu la catastrophe, mais non, tout se passe bien, les œuvres arrivent à bon port à la galerie, les visiteurs aussi, admiratifs...  Bravo !

L'éléphant qui trompe énormément et la cigogne :

En prenant une petite rue que je connais par cœur, j'ai vu, caché au fond d'une une petite cour qui sert de débarras à une petite entreprise de spectacles, un gros éléphant en carton pâte bien malade... Il était couvert de végétation, un dissimulé du printemps, une beauté à peine voilée. Avec précaution j'ai pris ces photos insolites et je les ai envoyées à quelques amis, heureux, étonnés de mes trouvailles dans les petits recoins de notre ville, mais où c'est ? Incroyable ! J'ai jamais vu ça. Ah bon ! Bravo ! J'ai vu aussi dans le même mouchoir de poche urbain une cigogne en plâtre sur la cheminée d'une maison, sans doute arrivée jusqu'ici à cause du réchauffement climatique. Les voilà :


L'éléphant sur roulettes


L'éléphant avec sa belle chevelure végétale


La cigogne...

Mes amis, à très bientôt, le temps s'écoule à une vitesse, mais toujours avec lenteur... Je vous embrasse. 

PS : J'ai appris récemment que les insectes disparaissaient de notre planète de façon alarmante... Je vais donc arrêter de fusiller les mouches avec ma bombe asphyxiante !

jeudi 11 mai 2023

Deux documentaires : "Sur l'Adamant", de Nicolas Philibert - "L 'Amitié" d'Alain Cavalier, mes deux immenses cinéastes préférés de tous les temps !!! D'autres vues dans les balades parisiennes...



T'as vu le dernier docu de Philibert ? Tu peux courir, pourvu que tu trouves une place... Je disais ça à une amie, bien sûr il restait des places, c'est moi qui cours plus vite que la musique...

Nicolas Philibert, je le connais depuis très longtemps... Avec son documentaire "La Ville Louvre (1990)", il fait le tour du Musée du Louvre, repérage des belles choses, dont il s'approche avec délicatesse. Dans tous ses films, l'émotion vous attend au tournant : il nous donne à voir, à entendre, la vie ordinaire des gens, des animaux, des choses, aves sa sensibilité, impossible de ne pas être touché très vite, embarqué, pas d'explication de textes, d'images superflues, il suffit de le suivre, de regarder les visages, les gestes, écouter, prendre ce temps indispensable à l'observation. Dans chacun de ses films l'humanité est extrême, je pleure, c'est normal, je participe à sa façon de vous montrer l'existence du particulier, du banal, tout sous son œil devient extraordinaire, la beauté est là... Il touche profondément ceux qu'il captive... 

Une fois, dès le début de son merveilleux docu "La moindre des choses (1996)" : tous les ans, résidents et soignants de la clinique psychiatrique de La Borde se rassemblent pour préparer une pièce de théâtre qu'ils joueront le 15 aout. En 1995, ils ont choisi d'interpréter "Opérette", de Gombrowicz. Au fil des répétitions avec, les pensionnaires et une vraie troupe de théâtre, le réalisateur capte avec tendresse les hauts et les bas de l'aventure, les difficultés des apprentissages, les joies de la réussite finale, rencontre avec des amateurs et des professionnels. Mais au-delà du théâtre, il raconte la vie à La Borde, celle de tous les jours. J'ai pleuré dès le premier plan, on y voyait une pensionnaire chanter dans le parc de la Borde, entre les arbres d'une allée, le célèbre air de l'Opéra de Gluck Orphée et Eurydice "J'ai perdu mon Eurydice". Cette aria est tellement poignante, je l'aime depuis toujours, depuis que je suis petite, plus j'ai grandi, plus j'ai avancé dans ma vie, plus j'ai compris les douleurs et les tristesses qu'il exprimait pour moi... Chaque note me correspond, aujourd'hui encore !


 J'ai perdu mon Eurydice (Gluck) - Roberto Alagna 

Sur l'Adamant, vous embarquez avec toutes les personnes qui viennent pour être ensemble, parler, chanter, fabriquer de l'art, boire un café, regarder, être vu et entendu...  Attendre des jours meilleurs ! Des gens qui sont malades, de ces maladies qu'on appelle psychiatriques et qui font tellement souffrir...

Dès le début du film, justement, Nicolas Philibert réitère l'entrée en matière musicale (qu'il avait également placée dans son docu "La moindre des choses"), avec une chanson magnifique et poignante du groupe Téléphone... Cette chanson est interprétée superbement, avec fougue, par un résident qui vient dans cet hôpital quelques heures par jour, tout au long de son parcours...

La bombe humaine
Je veux vous parler de l'arme de demain
Enfantée du monde elle en sera la fin
Je veux vous parler de moi, de vous
Je vois à l'intérieur des images, des couleurs
Qui ne sont pas à moi, qui parfois me font peur
Sensations qui peuvent me rendre fou
Nos sens sont nos fils, nous pauvres marionnettes
Nos sens sont le chemin qui mène droit à nos têtes
La bombe humaine, tu la tiens dans ta main
Tu as l'détonateur juste à côté du cœur
La bombe humaine, c'est toi, elle t'appartient
Si tu laisses quelqu'un prendre en main ton destin
C'est la fin, la fin
Mon père ne dort plus sans prendre ses calmants
Maman ne travaille plus sans ses excitants
Quelqu'un leur vend de quoi tenir le coup
Je suis un électron bombardé de protons
Le rythme de la ville, c'est ça mon vrai patron
Je suis chargé d'électricité
Si par malheur au cœur de l'accélérateur
J'rencontre une particule qui m'mette de sale humeur
Oh, faudrait pas que j'me laisse aller
Faudrait pas que j'me laisse aller, non
La bombe humaine, tu la tiens dans ta main
Tu as l'détonateur juste à côte du cœur
La bombe humaine, c'est toi elle t'appartient
Si tu laisses quelqu'un prendre en main ton destin
C'est la fin
Bombe humaine c'est l'arme de demain
Bombe humaine tu la tiens dans ta main
Bombe humaine c'est toi elle t'appartient
Si tu laisses quelqu'un prendre ce qui te tient
C'est la fin
Paroliers : Corine Marienneau / Jean-Louis Aubert / Louis Laurent Bertignac / Richard Kolinka
Cette bombe humaine, avec le calme et le mieux être (?) donné par les médicaments, n'est jamais très loin, elle sent le "souffre" en eux, en nous ?
C'est seulement à la deuxième vision de ce film que je me suis rendu compte de la puissance de ces chants dès les premiers plans  !
Quelle chance Monsieur Nicolas, que vous soyez encore si jeune, d'autres films nous attendent, je le souhaite ardemment !  Merci !



Le dernier film d'Alain Cavalier (c'est lui qui le dit)

Il fallait avoir des patins à roulettes pour aller au cinéma cette semaine, deux fois Nicolas Philibert et le dernier film d'Alain Cavalier, mon autre chouchou de toujours, surtout depuis son film admirable "Thérèse" (1986). Voilà que ces deux grands cinéastes sortaient quasiment leur dernière (?) pépite ensemble.
Ses films : "Thérèse" (1986), et les" 24 Portraits" (1987-1991) en DVD restent mes films de chevet...
"L'amitié" restitue trois rencontres avec trois de ses amis (chaque entretien dure environ 40 minutes), les trois amis sont filmés chez eux dans leur cocon familial, dans la réalité de leur vie... 
« J’ai intensément partagé le travail cinématographique avec certains, jusqu’à une amitié toujours vive. Filmer aujourd’hui ce lien sentimental est un plaisir sans nostalgie. Nos vies croisées nous permettent cette simplicité rapide de ceux qui ne se racontent pas d’histoires, qui savent être devant ou derrière la caméra, dans un ensemble de dons et d’abandon au film. » Alain Cavalier. 
Premier ami - Boris Bergman, parolier de nombreux grands chanteurs, écrivain, acteur, dramaturge, réalisateur, scénariste et polyglotte ! L'approche d'Alain Cavalier le rend tout de suite passionnant, sensible, nature, très émouvant dans la chanson en yiddish qu'il interprète avec bonheur, Boris est un talentueux homme orchestre...
Deuxième ami - Maurice Bernart (de famille juive comme Boris), producteur  du merveilleux film "Thérèse" qui reste un classique du cinéma français. Producteur de très nombreux films... Alain et Maurice parlaient entre vieux copains, ils se sont rappelé des bons souvenirs sur le film Thérèse, j'ai bu leurs paroles, à l'époque, ils pensaient tous les deux faire 10 000 spectateurs sur Thérèse... Qui fit le tour du monde et gagna de nombreux prix, dont plusieurs César dès sa sortie ! Alain Cavalier nous révèle que cela lui a permis de vivre pendant dix ans des droits d'auteurs, Maurice nous confie que maintenant, il a vendu tous ses droits sur toutes ses productions...
Troisième ami - Thierry Labelle, le comédien que j'avais vu dans le film d'Alain Cavalier "Libera me" (1993), ne me laissait aucun souvenir... Il fait aujourd'hui un autre métier, livreur de prothèses dentaires, un personnage heureux de sa vie, sympathique et tendre ! 
Trois belles figures, trois portraits à la manière de Cavalier, très proche, sans artifice, il a filmé ses trois amis au plus près de chacun, avec minutie, douceur, mêlant sa voix à la leur avec affection, c'est bien sûr la caméra d'Alain Cavalier qui menait le bal des souvenirs...
La balade dans Paris :
Les petite courses prétextées vers le marché d'Aligre, sont en réalité des voyages au long cours, chacune de mes escapades devient une découverte, les angles de vues se multiplient, les couleurs changent. Tiens, ça fait longtemps que je ne suis pas retournée voir le tableau de Charles Dorigny (16e siècle) dans l'église voisine, Sainte-Marguerite...

Le Christ descendu de croix Charles Dorigny (16e siècle)
Devant l'église, le petit jardin, les espaces verts sont aujourd'hui, entièrement aux mains du printemps, tout est beau comme le jour, du jamais vu !

Le grand marronnier (mai 2023) : une splendeur !


Le fléchage des activités du coin vert (2023) : superbe !


Vue du café près du grand marronnier (2023) : une beauté !

La promenade valait le déplacement, rien n'avais bougé et tout avait changé !
Amis, je continue mon périple cinéma en salle ! J'ai beaucoup de choses à voir, dedans dehors, sur écran ou dans la vraie vie, le printemps s'en donne à cœur joie sous mes fenêtres et ailleurs. À très bientôt, je vous embrasse.