mardi 31 mai 2022

Un petit retour arrière avec G. Boldini, ce très bon peintre italien, et quelques brèves de mon comptoir...

 


Autel de l'église "dei Gesuati", Venise - 1907 - Giovanni Boldini (1842-1931) 


Détail : tableau dans le tableau


Le port de Venise - vers 1895 - G. Boldini (1842-1931)

Ce petit zoom arrière sur l'œuvre du peintre G. Boldini (voir mon post du 17 mai 2022), que j'avais vu lors de ma visite au Petit Palais, juste pour avoir le plaisir de remettre Venise sur le tapis, si chère à mon cœur. Les forts en Venise pourront-ils me dire où cette vue "de port" a été peinte ? Je n'arrive pas à la situer, vers les Giardini, peut-être ? Les gros navires, qui sont interdits aujourd'hui à Venise (avec raison), n'ont rien à envier à ces bateaux à vapeur au début du 20e siècle !


Rio à Venise avec le campanile de San Giorgo dei Greci - vers 1895 - G. Boldini (1842-1931)

Ces petits formats de Venise sont merveilleux. Moi qui porte Venise sur mes fonts baptismaux, j'ai pris le temps devant chacun d'examiner les lieux à la loupe. La vivacité des couleurs, la beauté des interprétations de Boldini me remettaient au cœur tant de souvenirs, toujours chéris, de cette ville sublime ! J'aimais aller m'assoir dans le très petit jardin qui entourait l'église San Giorgo dei Greci, il n'y avait jamais grand monde, et je profitais de cette halte pour me reposer...


La même vue (plus proche d'un pont), en 2014


L'entrée de l'église se faisait par voie d'eau, la vieille grille rouillée garde un charme fou quand le soleil est de la partie... La petite entrée est limitée par un petit muret intérieur, où il fait bon s'assoir et se reposer... Ce que je faisais toujours... (2014)


L'intérieur de l'église orthodoxe (2014)

Je me souviens d'une réflexion qu'une italienne croyante m'avait faite, au cours de l'office que je suivais en curieuse : madame, on ne croise pas ses jambes ici ! Surprise, j'ai donc décroisé rapidement mes jambes pour prendre une attitude plus conforme au lieu, un peu vexée quand même !

Mes petites brèves de comptoir : À l'arrêt du bus !

Nous attendions, sagement assises à l'arrêt de bus, avec une dame d'un certain âge, canne à la main, l'air incertain, un peu château branlant, le masque sous le nez, et le foulard bien posé sur la tête. Elle se frottait le genou, je reconnus ce geste que je fais moi-même, et la causerie alla bon train entre nous sur le sujet : cette dame me raconta qu'elle avait été opérée de son genou dans un bon hôpital et depuis, tout allait à vau-l'eau pour elle... Le genou opéré fait toujours mal, les jambes sont lourdes, les pieds sont rouges et enflés, les mains itou, tous allait de travers, je compatis bien sûr, et même je l'encourageais à poursuivre ses examens pour aller mieux : madame, ne vous découragez pas, approfondissez votre parcours médical, bonne journée, portez-vous mieux !

Cette fois dans le bus, une autre dame assise à côté de moi avait chaud, elle se contorsionna pour faire tomber sa veste, il faut dire qu'assise, les gestes ne sont pas faciles pour libérer les épaules, sortir les bras l'un après l'autre, sans trop bousculer le voisin. Je l'aidais, ensuite elle repositionna son foulard, et hop sur la tête, en torsades le foulard devint turban... De déesse... Nous sortons toutes deux au même arrêt : madame, votre foulard est magnifique comme ça, il vous va très bien... Elle me fait un grand sourire : merci beaucoup ! La journée s'engageait bien, le soleil était de la partie. Je me suis retrouvée rue Faidherbe, tout près de la Place d'Aligre, dans le froufrou des lumières tamisées.


Le marchand de thé (19 mai 2022)


L'entrée du petit square (19 mai 2022)


La fleuriste (17 mai 2022)


L'hortensia (28 mai 2022)

Les rues de par là ont toutes leurs jardins secrets, petit à petit j'en viens à bout, sous le soleil les trottoirs se réveillent, les couleurs clignotent sur les devantures, les cafetiers déversent leurs tables et chaises sur les trottoirs, on agrandit depuis l'épidémie de Covid. Certains n'ont pas perdu le nord pour marcher sur les pieds des piétons...

Avec plaisir je vais prendre mon café à pas d'heure, dans ce bel estaminet appelé "La Belle Équipe" où tout me fait vibrer, c'est ici qu'il y a eu 21 morts le jour de l'attentat du 13 novembre 2015... La vie a repris depuis longtemps son ordinaire, mais moi je me souviens... J'avais fait le tour des cafés "attentés" et le Bataclan... Il y avait des fleurs partout, des rubans, des photos, des bougies et des pleurs dans les rues... La place de la République est restée longtemps fleurie et entourée de visiteurs... Tristes !


"La Belle Équipe"(19 mars 2022)


Quelques jours après le 13 novembre 2015 (23 novembre 2015)


Place de la République (janvier 2016)

Partout à Paris, les endroits où il y eut des morts, beaucoup de morts, sont restés longtemps sous les lumières des bougies allumées... Pour le souvenir, l'hommage ! Je me souviens...

Les brèves gaies, presque du jour :

Madame, je peux vous poser une question ? Bien sûr, je vous écoute ! Mais elle continuait à trier ses pots sur son étal. Pourquoi le laurier rose de mon balcon a-t-il les feuilles du bas qui jaunissent, s'il vous plait ? Je m'étais adressée à une professionnelle de la fleur, une fleuriste qui avait de la bouteille, une sûre d'elle, pas facile, mais efficace, elle me regarda d'une drôle de façon, comme une furie : mais voyons, vous l'arrosez comment ? Ben, une fois tous les quinze jours environ... Mais c'est beaucoup trop, vous l'avez pourri, il est mort votre laurier ! Vous avez vu les lauriers dans le sud de la France, en plein cagnard ? Personne ne les arrose ! Foutu, foutu, votre laurier va crever, je vous le dis, mais c'est quoi ces clients qui arrosent tout le temps, il faut l'arroser une fois par mois, je vous dis, une seule fois par mois ! De rage, elle avait failli renverser ses pots installés sur le trottoir !!! Merci madame... Pas de quoi ! J'en étais toute sidérée, en rentrant, j'ai regardé l'arbuste pâlot, à l'article de la mort, jauni du bas, moribond... J'ai donc cessé de l'arroser, l'œil aux aguets, l'arrosoir en berne, depuis quelques jours de soleil il me fait des fleurs dans tous ses coins... Mais comment ça va finir, cette affaire-là ?

Je garde des petites brèves pour la prochaine fois, si vous êtes là, passez par chez moi... Je vous embrasse, mes amis fidèles et ceux du hasard... Je vous embrasse.

lundi 23 mai 2022

Hommage aux asperges... À table ! Les délices du printemps sont arrivés !


Botte d'asperges - 1880 - Edouard Manet (1832-1883)

Le printemps est bien avancé et la saison des asperges aussi, comme chaque année, j'en fais ma cure, j'en mange quasi chaque jour... Profite, Danielle, ça ne dure pas ! Mon petit primeur les vend chères, mais elles sont extra, la grande surface les vend moins chères et elles sont aussi bonnes, chez chacun je peux les choisir une par une, délicatement... Je choisis de rester fidèle à mon primeur "du coin" mais quelquefois, quand je vois la triste mine qu'elles ont au bout de la semaine, je lui fais faux bond, pas de gaité de cœur, la mort dans l'âme, mais je lui fais faux bond quand même, je prends un autre chemin pour ne pas me faire voir avec mon beau panier à provisions qu'il connait bien, ni vue ni connue, je l'embrouille... C'est pas bien !

Donc, depuis le mois d'avril, je suis au taquet sur l'asperge... J'aime tout dans l'asperge : les acheter, les éplucher et les cuire, chaque dégustation est une fête ! 


Et voilà les miennes, premier jour de la semaine...

Je ne vais pas rivaliser avec les bottes des grands peintres, mais tout de même, je tâche de garder une certaine élégance pour les servir, c'est un spectacle de printemps, mes asperges à moi sont des vraies, et je vais me régaler... Allez manger un tableau !


Plusieurs petits jours après

Je remets le couvert, j'en fais tout un plat, je les ressers avec n'importe quoi, tout marche bien ensemble, je les aime à toutes les sauces : vinaigrette, crème fraiche/moutarde/vinaigre, et aussi telles quelles...


Très bien aussi avec des oeufs durs et de la crème fraîche, en toute simplicité...

Dès les premiers jour du printemps, je me suis demandé : comment les conserver ? Je me suis jetée sur internet et j'ai vu qu'on ne pouvait pas les faire attendre beaucoup , sitôt achetées, lavées, épluchées, il faut les faire cuire et les manger... Donc, je n'en achète pas beaucoup à la fois, je ne peux pas faire comme les peintres, mettre les bottes sur la table... L'asperge est un luxe, j'adore !


Asperges - Hippolyte Delanoy (1849, Glasgow - 1899, Paris)

Je les adore également en peinture, toutes les bottes sont gracieuses, bien ficelées, roses ou vertes, elles restent désirables, et quand elles sont  peintes avec talent, j'y suis très sensible... Je les trouve belles... À croquer !


Nature mortes aux asperges - 1867 - François Bonvin (1817-1887)

Finalement, je me suis dit : faisons un peu de déco autour de "mes" asperges, fleurissons-les pour faire encore plus beau !


Hommage aux asperges

Mon primeur a tendance à laisser en vente ses asperges jusqu'au bout (quand elles commencent à se sécher, plisser et moisir), il doit les couper tous les jours pour faire bonne figure, mais moi, quand je les vois un peu fatiguées, je lui pose la question : alors mon ami, elle sont neuves, tes asperges ? Alors, il va sans rien dire en chercher des plus fraîches en réserve, encore bien blanches et roses, et il me dit : choisis... Et je prends les plus belles avec un clin d'œil !

Il faut savoir parler aux gens quand les asperges sont sur les étals... Il paraît que la récolte des asperges commence au début du printemps et se termine traditionnellement vers le 24 juin (fête de la Saint-Jean). Il faut donc mettre les bouchées doubles pour les déguster pendant un temps si court... Il me reste un peu de temps pour en profiter à fond, allez les amis, je file les acheter (uniquement les blanches) chez mon primeur du coin ! Elles vont me manquer... Quand la saison sera passée, elles vont me manquer...


Les belles d'avril !

Les amis, je vous parle de l'artiste Sophie Calle dans ma prochaine publication, et de quelques brèves de mon comptoir ! Prenez soin de vous, ça reste encore dangereux de se faire transporter en commun, sans masque !



mardi 17 mai 2022

Le Petit Palais, avec Giovanni Boldini, suivez le guide !

 

Le drapeau de l'Expo Boldini, le grand platane sur les Champs-Élysées, et le ciel bleu...

Ma carte annuelle dans les musées de Paris me donne le droit d'aller voir et revoir dans les musées de la ville les collections permanentes et les expositions temporaires, des voyages à l'infini parmi les beautés du monde... Ça me va très bien !

Le Petit Palais propose un peintre italien : Giovanni Boldini (1842-1931), dont je n'ai jamais entendu parler, l'occasion est trop belle, allons-y avec joie ! Masque, métro, sortie au Rond-Point des Champs-Élysées, ciel bleu, douceur, j'avais choisi le jour de nocturne, moins de monde (réellement), tout s'annonce bien !


Vue grandiose, avenue pavoisée en l'honneur de la nouvelle investiture du Président de la République et de l'anniversaire du 8 mai 1945 (fin de la deuxième guerre mondiale)

Pour faire la photo, je me suis plantée au milieu de l'avenue, et j'ai attendu que le feu rouge, au loin, diminue le flot des voitures...

Nous y voilà, un petit coup de flash sur mon téléphone où un de mes fils m'a mis l'application du Pass-Musées, on est moderne ou on ne l'est pas ? Et la voie est libre, je suis heureuse, le parcours du bonheur peut commencer, à moi les belles surprises !

"Giovanni Boldini est un portraitiste de réputation internationale, travaillant principalement à Paris et à Londres. Au début du xxe siècle, il est l'un des portraitistes les plus en vue à Paris. Il est considéré comme l’un des interprètes les plus sensibles et les plus imaginatifs du charme électrisant de la Belle ÉpoqueSon style fougueux préfigure parfois celui de l'abstraction lyrique." Wikipedia

Voyons voir ! 


Portrait de Lilia Monti - 1864 / 1865 - huile sur toile - Giovanni Boldini (1842-1931) 

J'adore ce tableau, facture classique, superbe, le ruban rouge crée la surprise, ce détail apporte au portrait solennel une pointe de mystère, de liberté, de sensibilité immédiate... Les belles surprises continuent... Le peintre a 22 ans...


Les sœurs Lascaraky - huile sur toile - 1869 - Giovanni Boldini (1842-1931) 

Une très petite toile, "grande" comme une feuille de papier ordinaire, la liberté de la vie quotidienne, peinte avec précision et une palette de couleurs éblouissantes, une très grande maîtrise, pour moi la découverte est extrême ! Le peintre a 27 ans...


Jours tranquilles ou jeune femme au crochet -1875 - huile sur toile - Giovanni Boldini (1842-1931) 


Détail

Quelle magie chromatique, on peut tout regarder à la loupe, c'est beau et vivant ! Les tapis ramassent les couleurs à la pelle, et je ne peux m'empêcher de penser à ceux de Vermeer, présents dans tous ses tableaux et qui m'ont toujours subjuguée...




Les lumières et les tapis de Vermeer...

Les petits formats de Boldini sont presque tous des œuvres de jeunesse... La trentaine quand même...


Berthe fumant - 1874 - Giovanni Boldini (1842-1931) 

Les formats sont encore petits, mais tout y est : les couleurs éclatantes qui attirent avec douceur, la profusion de détails, la mise en valeur des matières, les scènes familières, des points de vue originaux... Un grand peintre, ce Boldini ! Ses paysages pétillent sous le soleil, les extérieurs sont aussi beaux que ses intérieurs, les femmes sont des fleurs parmi les fleurs, avec délicatesse... Avec Boldini, toutes les femmes sont jolies, vaporeuses, élégantes et minces  !


 Berthe à la campagne - 1874


Sur un banc au bois de Boulogne - 1872

Giovanni Boldini est pile poil dans l'ère des Impressionnistes, c'est un peintre italien qui vit et travaille principalement à Paris et à Londres... Continuons la visite...


Le printemps, ou paysans et chien - 1874


Détail

Le printemps de Boldini ressemble un peu à l'automne que je vis dans l'Indre chaque année en vacances depuis plus de dix ans. Des jardins, il y en a beaucoup, et quand je descends de mon vieux vélo noir, j'ai le souffle coupé. Pourtant les paysages sont moins froufroutants, plus simples, plus discrets, plus mystérieux que ceux de Boldini, il en a beaucoup rajouté et ça me plait, je remets tout en ordre dans ma tête, je simplifie ! En septembre dans l'Indre, il y a beaucoup moins de fleurs, les arbres, les buissons sont moins broussailleux, ils penchent en majesté, avec des pommes, des poires au bout des branches, éblouissants de lumière, les ombres sont puissantes, plein feu sur le vieux saule... La petite route verte... Les ombres et les lumières de l'Indre je les attends tous les ans avec impatience...


Plein feu sur le vieux saule


La petite route

Mais revenons à nos moutons... On ne peut pas regarder une œuvre sans qu'elle fasse appel à notre monde intérieur...

Après, les petits et moyens formats exquis, j'ai moins aimé les grands formats... Les belles femmes flamboyantes, enfroufroutées, triomphantes dans des feux d'artifices picturaux ne m'ont fait ni chaud ni froid, j'ai bien essayé de participer à la fête, mais je n'y suis pas parvenue... L'artiste avait fait sa réputation sur les portraits de "femmes du monde" qui illustraient "La belle époque " (fin du 19e siècle jusqu'au début de la première guerre mondiale). Voyez Wikipedia, il est beaucoup plus savant que moi sur cette période de transitions multifactorielles...


Feu d'artifice - 1892 / 1895 -  Giovanni Boldini (1842-1931) 



Miss Belle - 1903 Giovanni Boldini (1842-1931) 



Abandon - Vers 1880 - Giovanni Boldini (1842-1931)


Portait de Pauline Hugo avec son fils Jean - 1898 - Giovanni Boldini (1842-1931)


Portrait du comte Robert de Montesquiou - 1897 - Giovanni Boldini (1842-1931)

Cet aristocrate, intellectuel, poète, dandy, mondain a également inspiré Marcel Proust pour créer le personnage du Baron de Charlus, dans "À la recherche du temps perdu", portrait pâle, longiligne, sans âme qui ne m'accroche pas... Du tout !

Disons que ce n'est pas la période "Femmes ou hommes du monde" lisses, élancés, modélisés, qui m'a emballée le plus, mais je comprends le succès qu'il a rencontré auprès de ces messieurs-dames, il les rendait tous beaux et fringants. Moi, je préfère sa peinture quand elle prend du caractère, devient moins stéréotypée, moins "publicitaire" elle reprend vraiment de l'intérêt pour moi... Je m'approche, j'admire, je réfléchis, je cherche... J'aime !


La Belle Époque ? Belle idée de mettre en perspective des costumes et des tableaux de "mode" ?

Quand G. Boldini s'approche au plus près de ses modèles, il m'émeut beaucoup, j'y vois un grand virtuose, un grand peintre, je suis touchée au cœur par deux beaux portraits de l'expo :


Joaquin Aranjo et Ruano (artiste peintre et ami de l'auteur) - 1882 - Giovanni Boldini (1842-1931)


Portrait du jardiniers de ses amis, dans sa boîte à peinture - 1897

Tout est réuni dans cette boîte de peinture pour reconnaître Boldini comme un peintre très talentueux, mais... Qui pourtant ressemble un peu à ces chanteurs à très belles voix, qui n'ont pas choisi le meilleur répertoire pour exprimer avec force leur originalité, leur sensibilité ...

Prochainement le Musée d'Orsay avec Sophie Calle et mes brèves de comptoir... Restez prudents, la pandémie n'est pas tout à fait terminée, je vous embrasse...


mardi 10 mai 2022

Où vais-je aller ? Que vais-je découvrir ? Allons dans le Marais !



 

Vitrine, rue Vieille du Temple

Dans ce quartier, j'y vais toujours pour voir les transformations, les ravalements, les arrangements, les enjolivements, les disparitions... C'est le quartier de mon enfance, je le répète souvent  !


Les parasols, rue Béranger

Découverte (1) : Lovis Corinth

Mon but était d'aller voir en premier la Galerie Karsten Greve, rue Debelleyme. Quand j'y suis rentrée, j'ai poussé un cri de joie, c'était trop beau ! L'artiste exposé ne datait pas d'hier, mais pour moi, qui le découvrais, un de plus dans ma "petite" collection, un vrai coup de cœur  : le peintre allemand Lovis Corinth  (1858-1925, 67 ans). À y regarder de près, rien de très très nouveau : des fleurs, des vases, des couleurs joyeuses qui donnent le La... Puis, toute la gamme du bonheur ! Ces bouquet puissants m'ont renversée, je sautais comme un cabri devant chacun d'eux, j'avais envie de les cueillir tous, je m'y suis  appliquée...

Ce peintre est exposé pour la première fois en France, 100 ans après sa mort, dans cette galerie. Le chemin fut long depuis l'Allemagne où il est enterré... Il a commencé à vivre de son art à la quarantaine, en vendant un premier tableau (religieux) à un confrère... Marié à une juive et soutenu par de grands collectionneurs juifs, Corinth devient un artiste non grata aux yeux du IIIème Reich, il est considéré comme un peintre "dégénéré". 295 tableaux ont été saisis et la plupart vendus à l'étranger, surtout en Suisse.

Il y a de la représentation réaliste dans ses bouquets, certes, de la grâce dans chacune de ses fleurs, de l'interprétation personnelle et du sentiment, ses couleurs sont fortes, très travaillées... Jusqu'à l'abstraction. Difficile de renouveler le genre, mais il y est parvenu (à mes yeux). Pourquoi cette joie profonde en regardant ses toiles ? Une vraie communication, une heureuse rencontre en seulement neuf tableaux ! Cent ans après ! Merci la Galerie Karsten Greve, un beau cadeau !!





Lovis Corinth (1858-1925)

Comme la nature qui sans cesse se renouvelle, les peintres tentent d'y parvenir, chacun à leur manière. Ils nous laissent souvent surpris, craintifs, admiratifs, touchés ou indifférents... L'art, comme la nature, n'a jamais dit son dernier mot... Ne laissons pas la nature devenir "une nature morte", protégeons-là pendant qu'il en est  temps...  Encore ? Laissons la croître et multiplier... J'avais en tête toutes ces interrogations en admirant Lovis Corinth !



Lovis Corinth (1858-1925)

Dans ce quartier, les touristes sont revenus, le monde se presse en terrasse, il fait beau, comme si rien de moche ne se passait dans le monde... On ne peut pas penser 7 jours sur 7 à la terre entière...

Découverte (2) : Eugène Delacroix dans l'Église Saint Denys-du-Saint-Sacrement

Au détour de ma promenade, rue de Turenne, je tombe nez à nez avec l'église Saint-Denys-du-Saint-Sacrement (19e siècle), je n'y avais jamais mis les pieds. Dès l'entrée, elle procure une belle impression, grande, assez claire, pleine de colonnes gigantesques...


Saint-Denys-Du-Saint-Sacrement

Dans le coin à droite, dans la chapelle de Marie, une Piéta d'Eugène Delacroix, exécutée en 17 jours ! On reconnait un peintre de talent de loin, mais je n'avais jamais entendu parler de ce tableau. Devant mes yeux écarquillés, l'œuvre prenait des dimensions inattendues. Des Piéta, il en existe des centaines, voire des milliers, ce thème artistique classique de l'iconographie chrétienne (sculpture/peinture) surprend encore avec l'interprétation de Delacroix, encore et toujours. Cette magnifique Piéta nous communique toujours l'énorme sensation de douleur, de tristesse, de pesanteur qui se dégage de la scène : de chaque côté du Christ, Marie-Madeleine avec ses bijoux, Marie-Salomé (demi-soeur de Marie) avec ses yeux rougis, au dessus de Marie, dont les bras répliquent le supplice de la croix, Jean l'apôtre, le vieux Nicomède (un des premier disciples de Jésus), au fond une femme qui pleure. Tous sont au désespoir, le rouge sang a coulé des pinceaux de Delacroix ! Le Christ mort, blafard, blanc ivoire, dans une lumière aveuglante, le distingue à peine de sa mère Marie...


Piéta - 1844  - Eugène Delacroix (1798-1863)





Détail

Delacroix représente les flacons remplis de parfum dont se sont servies Marie-Madeleine et Marie-Salomé pour aller embaumer le corps du Christ, détail très délicat. Une lumière entoure les flacons, la ceinture de Marie-Madeleine me rappelle le merveilleux turban du "Bain turc" d'Ingres, que j'adore aussi...


Le Bain turc - 1862 - Ingres (1780-1867)

Les deux peintres sont morts à quelques années d'écart, Ingres survécut quatre ans à Delacroix, qui était de vingt ans son cadet...

La visite continue, une à une je refais inlassablement les petites cours qui se cachent derrière les lourdes portes en bois, restées ouvertes... Souvent je rencontre des gens, on discute, je prends le pouls du quartier, je passe un bon moment à l'air libre...


La petite cour enchantée

Aussitôt la gardienne vient vers moi : vous cherchez quelque chose ? Pas du tout madame, je visite, votre cour est magnifique, j'admire le jasmin qui monte gracieusement autour du porche. C'est mon jasmin, madame, tout ici, c'est moi qui l'ai planté. Félicitations, c'est superbe ! Aucun locataire ne m'a aidée, j'ai tout fait toute seule, j'ai même transporté des pots très lourds, j'ai risqué de me casser le dos, mais c'est fait. Bravo madame, vous avez la main verte et beaucoup de goût ! Et comme je m'étonnais qu'aucun locataire n'ait mis la main à la poche pour la déco florale de toute beauté, elle me dit : c'est comme ça madame, c'est comme ça... Pour en remettre une couche, l'ouvrier qui bricolait dans le passage précisa : ah ça, madame, votre jasmin, il ne va plus durer trop longtemps, les façadiers vont devoir le démonter pour repeindre l'immeuble... Catastrophe, le jasmin n'avait aucune chance devant le ravalement... Je suis repartie sur la pointe des pieds : au revoir madame, tenez bon, au revoir monsieur bon courage, bonne journée...



Les cours embellies grâce à la nature et aux gardiennes...



La magnifique cour de la galerie Perrotin, rue de Turenne

Depuis des années, le quartier a petit à petit "changé de mains", impossible d'habiter Paris aujourd'hui sans le sou, beaucoup de sous, le coût de l'immobilier est exorbitant ! Cependant, on compte dans la capitale 256 000 logements sociaux, qui représentent 22 % des résidences principales... Il n'y aurait plus aucun logement insalubre ! Il y a des progrès à faire, pour que Paris conserve sa mixité sociale...

Mes amis, prochainement je vous parle de mes visites au Musée d'Orsay, et de nouveau au Petit Palais, portez-vous bien, méfions-nous du virus qui rôde encore. Je vous embrasse.