dimanche 1 décembre 2019

Parlons-nous... La violette, prolongation


Edouard Manet (1832-1883)


C'est en Avignon que la fragrance de la violette m'a poursuivie ! J'avais le temps, tout mon temps pour flâner, interroger les marchands de parfums, approfondir la piste de cette senteur.

C'était après la visite que je ne manque jamais de faire à la très belle Collégiale Saint-Agricol (XIIe - XVe siècles) : j'adore y retrouver deux Annonciations : une sur le parvis, en fronton de l'église et l'autre à l'intérieur, sur le monument funéraire (XVIe) de Paul Doni (marbre doré), ses sculptures en marbre ont l'éclat du bois doré, d'une douceur extrême....


La belle église Saint-Agricol ((Évêque d'Avignon au 7e siècle) 


L'Annonciation du porche de l'église


L'Annonciation, délicates sculptures de marbre blanc


Le monument funéraire en marbre de Paul Doni, et l'Annonciation


La très belle Annonciation du monument, les personnages ont l'air en bois 

Me voici à pied d'oeuvre, vraiment disponible, devant la grande parfumerie F. : elle est tellement belle qu'on a envie de tout acheter, les noms de fleurs résonnent dans toutes les bouteilles, les étiquettes étincelantes en font la publicité avec élégance... Mais pas de violette ! La fleur d'oranger me fait rêver, ici elle supplante toutes les senteurs...

Plus loin encore, chez un autre marchand de sent-bon, pas besoin de beaucoup de paroles pour me rendre compte très vite que je suis devant un vrai connaisseur... Il très calé, connaît parfaitement la pyramide olfactive des parfums de son magasin, il est parfait : j'ai le temps, madame, il n'y a personne pour le moment, c'est tellement rare qu'une cliente sache vraiment ce qu'elle cherche. J'y étais venue chercher ma petite note de violette... Ce que vous cherchez se trouvera peut-être dans un parfum" de niche" plutôt que dans un parfum "de masse"... J'apprenais encore...

Au bout de plusieurs essais, sans succès pour mon nez, et un début de migraine qui s'annonçait déjà, il me dit : franchement, madame, je vais vous dire que les fragrances de violette et de muguet ne peuvent se reproduire à l'identique, les fleurs sitôt cueillies voient leur parfum s’évanouir comme par enchantement... Et il fit un geste gracieux avec ses deux mains, imitant une envolée de papillons qui voulait me dire : sitôt cueillies, sitôt évaporées, ne cherchez plus, vous serez toujours déçue...

En revanche, la fleur d'oranger (que j'avais remisée en joker), on peut la reproduire, la distiller, la garder, la multiplier, la copier parfaitement... J'étais un peu sauvée... Il se mit à m'en faire respirer, je ne savais plus où donner du nez...



William Worcester Churchill (1858-1926)

C'est sûrement vrai, je ne trouverai jamais l'odeur des violettes en bouteilles. Depuis quelques années seulement, je la retrouve au printemps, avec joie, tout près de mon immeuble, ces fleurs y poussent  discrètement, secrètement, derrière le grillage de la minuscule pelouse, en bas des marches, un miracle ! Chaque année, je m’écorche les doigts pour saisir leurs petites tiges fragiles, je fais un petit bouquet de quatre ou cinq fleurs et je les respire, transformant mon nez en alambic qui distille en moi cette fragrance inespérée, fragile et si belle... Inoubliable, original, impossible à reproduire... Je vais chercher encore...


Les violettes du cimetière (2013)

Alors, je me souviens à nouveau de ce vieux cimetière juif de Vienne, dont tout l'air ambiant sentait les violettes, il en poussait partout, les tombes étaient recouvertes, inondées de violettes. Les morts vivaient dans cette odeur délicate et tenace du printemps, il suffisait de respirer normalement pour  faire le plein de cette odeur douce, sucrée, enveloppante, envoûtante, personne ne pouvait donc s'en emparer, aucun parfumeur, maintenant je le savais... Il faudrait que je retourne sur mes pas, dans ces paysages extraordinairement "violettés", ou attendre le printemps, guetter de tout mon cœur les violettes de ma rue... Finalement ma rue est riche, violettes et abricots s'y côtoient malgré la pollution, pas très loin du caniveau et des grillages. Le mauvais temps, le froid, le gel, le vent n'y peuvent rien, la nature a le dernier mot, je me régale...

Je suis repartie d’Avignon avec une petit bouteille "fleur d'oranger" offerte par ma chère belle-sœur, ainsi les fleurs de la Méditerranée me parfument encore aujourd'hui, j'ai bien envie de faire pousser un citronnier sur mon balcon... Pourquoi pas, le réchauffement climatique vient jusque sous mes fenêtres... Très petit avantage avant le désastre, me direz-vous, mais en attendant que la planète reprenne son rythme naturel, je voudrais bien parfumer mon balcon avec des citrons... Quel bonheur en perspective !!


Mes amis, j'ai défait ma valise, je reprends le cours de ma vie citadine, parlons-nous encore et encore... J'ai des paroles en tête... 

6 commentaires:

Brigitte a dit…

Ah te re-voilà … C'est délicat le parfum de fleur d'oranger et doux aussi mais ce n'est pas la violette !!! La violette et son inégalable parfum à ne trouver que sur les fleurs … Je suis ravie si tu es contente de "ta" fleur d'oranger .
Oh oui un citronnier sur ton balcon quelle excellente idée ,tu auras de merveilleux citron .Juste espérer qu'il ne soit pas atteint pas une grosse gelée ? J'ai une amie dont la soeur en a un dans sa véranda,elle a récolté plus de 100 citrons !
Parle nous encore Danielle et merci.Belle journée
Je t'embrasse avec le soleil

siu a dit…

"Les morts vivaient..." c'est un oxymore frappant et gentil au meme temps, et on arrive presque à l'imaginer ce vieux cimetière juif de Vienne...
J'imagine aussi que le parfum de ta fleur d'oranger est super bon, c'est une essence que j'aime beaucoup!
Quant à un citronnier sur le balcon, je ne crois pas qu'il y aura des problèmes: j'ai un ami qui en a un depuis au moins une décennie qui lui donne des citrons superbes; une fois quand il m'a envoyé la photo d'un panier bondé de ses fruits merveilleux je lui ai demandé si par hasard il ne se moquait pas de moi et les avait achetés chez le fruitier :-)) Sans oublier que Trieste est la ville de la bora, ce vent fort et froid que nous aimons alors que Stendhal le détestait, mais d'ailleurs il détestait Trieste tout court...
Gros bisous et bonne semaine, chère Danielle! (ici il pleut mais il ne fait pas encore vraiment froid).

Danielle a dit…

Oui, chère Brigitte, je reviens d'Avignon, j'ai bien envie de ce citronnier... Attendons le printemps !!100 citrons, bon il y en aura pour tous mes voisins :-)

En attendant je vais couvrir mes géraniums...

Parlons-revient, avec des mots d'amies, des gens...

Je t'embrasse fort Brigitte à très vite entre mes lignes.




Danielle a dit…

Oui Siu c'est un bel (oxy-mort) il m'est venu comme ça et je l'ai laissé...:-)) L'odeur de violette était si douce, si belle qu'elle pouvait réveiller les morts...

Moi qui ne connais pas Trieste, je suis sûre que je l’adorerais...

Et des citrons aussi, vive le printemps...

Plus facile à trouver que du parfum... La fleur d'oranger me fait un peu mal à la tête :-((

Siu bonne semaine aussi, pour toi, dans la douceur de Trieste. Je t'embrasse fort.

Marie Claude a dit…

Te voici revenue de cette belle ville où tu as pu profité de ta chère famille!
Très difficile de reproduire le parfum de certaines fleurs,un jour tu trouveras,peut-être le Père Noël va t'il t'aider....
Avec le changement climatique ,un citronnier peut certainement s'acclimater chez toi en respectant certaines précautions,j'imagine ta joie de récolter "ta production"!
Belle journée à toi
Des bises fraîches du matin

Danielle a dit…

Oui chère Marie Claude j'en ai bien profité :-) Oui, c'est vrai très difficile de reproduire le parfum des fleurs car les parfums ne partent pas ou très peu de matière naturelle...

Je compte sur le Père Noël juste pour un parfum...

Mais l'idée du citronnier me trotte dans la tête...Sérieusement !

Bonne fin de journée Marie Claude merci de tes bises si affectueuses, moi aussi je t'embrasse.