jeudi 14 novembre 2024

Dans l'Indre...Les rencontres, les premiers tours de piste… (Série unique - à plusieurs épisodes - 3)

 


Cueillette des fleurs tombales du cimetière


Bien avant, et tout au long de mon séjour en Indre, je m’étais dit : que pourrais-je bien voir de neuf cette année ? Dès les premiers jours, cette idée m'a taraudée : allons au cimetière, de toute façon j'ai une visite à faire. L’entrée était libre comme l’air, j’avais juste à poser mon vélo contre un mur et pousser la porte en fer. D’abord je saluais une ancienne plus ancienne que moi, que j'avais connue et écoutée plusieurs années de suite, elle m'avait raconté comment elle avait commencé à travailler à la grande ferme du coin dès ses douze ans, très tôt le matin, trop tard le soir, presque pas nourrie. Souvent je lui rendais visite au cours de mes séjours, nous bavardions avec entrain toutes les deux, elle était restée gaie comme un pinson, pleine d'humour... Chaque année, depuis qu'elle ne raconte plus rien, je ne manquais pas de venir la saluer, ici, au milieu des fleurs fraiches et des fleurs en céramiques... Je déposais ma petite pierre sur sa tombe, coucou V., je suis passée, me voilà, je n'ai jamais oublié tes récits ! Au fil des années, le petit caillou était devenu un petit tas, il résistait au vent, à tout ! Sa fille, qui connaissait mon secret, veillait au tas de grains... 



Coucou mon amie...

L’idée m’était venue en regardant autour de moi : comme elles sont belles, jamais je n’y avais pensé, aujourd'hui, je les voyais pour la première fois, elles me sautaient toutes aux yeux, allez savoir pourquoi ? La seizième année ! Il m'en avait fallu du temps pour bien voir, je m’étais promis un regard neuf, et bien je le tenais. Il y en avait à profusion, de toutes les couleurs, entières, cassées, enfouies sous la terre, entremêlées avec les herbes folles, en croix, en couronnes, en bouquets, isolées en majesté... Mais quoi donc, Danielle ?  En terre vernissée, bien travaillées par de vrais céramistes, des artistes, brillantes au soleil, des tons hardis : rouge, violet, jaune, orange, jaune, bleu… Une gamme infinie de nuances, éclatantes encore, les fleurs tombales m’attendaient dans toutes leur diversités, quasi intactes !!!



Mais c’est bien sûr, elles sont pour moi, il me suffisait de faire les allées une par une et sortir mon téléphone, mon appareil photo, j’avais trouvé mon sujet, hautement imprévu et magnifique !! Je l'avais vu comme par miracle, ce champ de fleurs, comme personne, j’en étais certaine. Mais surtout, j’ai adoré papillonner entre les tombes et cueillir une à une toutes ces fleurs qui m’attiraient, d'une grande beauté. Il y en avait tellement, j'ai dû choisir : les plus anciennes se voyaient à d'œil nu, mieux façonnées, mieux peintes, des "œuvres", certaines avaient au moins deux petites centaines d'années d'après les dates gravées dans la pierre, pour les cueillir "presque toutes", j'y suis revenue plusieurs fois... En courant !



Personne, sans doute, n’avait vu une telle profusion de pensées pour les morts, les vivants pouvaient se réjouir, leurs défunts dormaient dans les parfums et les couleurs... Le  "nouveau" cimetière, à droite de l'entrée, était construit, entretenu autrement. Pour garnir les tombes de maintenant, la mode était plutôt aux fleurs artificielles avec pétales en synthétique, qui se détachaient aux grands vents... Les incinérés avaient juste une belle petite plaque, il n'y avait pas la place d'une fleur !



Ma gerbe de fleurs en poche, un dernier tout d'horizon, j'ai repris mon vélo, refermé la porte du petit cimetière. Contente de moi, j'avais trouvé comment regarder autrement ce que "j'avais vu en aveugle" durant tant d'années, à chaque séjour sans exception... J'étais venue ici pour le petit coucou et le caillou...




Bonjour madame, le pneu arrière de votre vélo est dégonflé, vous le savez ? Oui, oui, ça ne me gêne pas du tout. Ah bon ! Elle avait passé du temps à arranger une tombe, sans doute d’un très proche, car c’était la deuxième fois que je la voyais pendant que je cueillais mes fleurs tombales. Pour lever le doute, je lui dis que je faisais des photos... Elle paraissait triste et peu pressée de repartir, j’en ai profité pour tirer des fils de soie : elle avait perdu son mari, brusquement, et se retrouvait seule dans sa grande maison où elle tournait en rond. Elle n’avait envie de rien, perdue, prête à rien. Nous cheminions toutes les deux, notre vélo à la main, dans le petit chemin de terre qui filait jusqu’à la route. Elle ne voyait plus ses amies, n’allait plus à la petite chorale, pas l’énergie... Je comprends ! Tenez bon, reprenez confiance, c’est quoi votre prénom ? On va se revoir, bonne soirée, à bientôt Marie ! Souvent, d'entrée de jeu, quand la rencontre était sympa, je demandais le prénom. Ça marchait tout le temps... Nous pouvions nous revoir avec le sourire, en connaissances !


Nous nous sommes revues dans un chemin blanc où je me promenais, entre deux pluies, plusieurs jours après... Je vous raconterai...









Le champ de fleurs...

Ces rencontre florales m'ont incitée à mieux ouvrir les yeux, j'ai trouvé deux trèfles à quatre et cinq feuilles entre deux touffes d'herbes, dans une toute petite allée du cimetière (voir les photos de l'épisode - 2), je les garde précieusement entre les pages d'un livre que je n'ai jamais lu... Encore !


À bientôt les amis, mes passagers, portez-vous le mieux possible. Mon frère, lui, dit toujours : "Autant que faire se peut", il connait la petite musique des prédictions quand on prend de l'âge ! 

9 commentaires:

siu a dit…

Elles sont superbes tes photos et je pense, sérieusement, qu'elles mériteraient une petite expo.
Je n'ai jamais vu des fleurs comme ça dans un cimetière : du còté de chez moi autrefois elles étaient en plastique (horribles !) et puis sont arrivées celles en tissu, parfois mème assez jolies.
Mais comme d'habitude la "valeur ajutée daniellesque" se trouve dans les rencontres... Tu l'as tellement bien décrite cette pauvre Marie que j'avais l'impression de la voir, de l'écouter... J'espère surtout que, mème s'il n'a pas duré longtemps, ce moment de compagnie gràce à ta présence et tes paroles lui a fait du bien. Le temps aussi se révèle parfois un bon médicament, c'est ce que je ne peux que souhaiter à Marie.
Alors que mon souhait à moi c'est la lecture de ton prochain billet ;-))
Bon après-midi chère Danielle, je t'embrasse !

Danielle a dit…

Merci chère Siu, merci ! J'ai eu un coup de foudre pour ces fleurs, je me suis dis tout de suite : J'ai trouvé un beau sujet ! Et tu me le confirmes, ça valait le coup !
La dame m'a donné de la joie, en retour au soulagement (j'espère) que je lui avais apporté !!

Je travaille au billet suivante...
Bons fin de semaine chère Siu, je t'embrasse de maintenant.


Brigitte a dit…

Arf ...j'avais laissé un commentaire sur ce post et il n'y est pas !!! Zut de flute . Très beau montage de toutes ces fleurs qui ne dépérissent pas ,ni ne se fanent . J'aime beaucoup ,elles sont très bien faites mais il ne faut pas oublier de les nettoyer sinon la mousse se met partout ! Par contre je ne vois plus de ces jolies couronnes en perle que j'aimais beaucoup ....Je t'embrasse avec la 1ere gelée

Danielle a dit…

Pas de panique chère Brigitte, ton commentaire figure bien, mais à l'épisode précédent (2)
Merci pour tous tes mots, j'ai adoré ces fleurs si belles, si éclatantes, même enfouies sous la mousse ou les graviers, je n'ai trouvé qu'une seule couronne en perles, un peu délavée, sans couleur... Brrr, oui il commence à faire froid, couvrons-nous bien ! Je t'embrasse fort du jour.

liliforcole a dit…

Bonjour Danielle,
Excellent ! Je vous lis toujours avec beaucoup de plaisir, comme je lisais autrefois Françoise (Aloïs). Quelle belle idée. Marie devait effectivement se demander ce que vous pouviez bien "fabriquer" si elle vous suivait du coin de l'oeil... Superbe collection. On trouve toujours des fleurs en céramique pour les cimetières, je pense que la plupart viennent aujourd'hui de Chine. Celles que vous avez immortalisées (humour) semblent demeurées dans un état de fraîcheur exceptionnel, malgré le vent, la pluie, les mousses, les poussières... En Indre, le temps doit prendre son temps... Bon dimanche

Danielle a dit…

Coucou Lili, heureuse de te lire, c'est vrai "mes "fleurs" étaient les plus anciennes du cimetière, ça se voyait à vue d'œil ! Oui, tu as raison, malgré tous les temps "mes fleurs" résistaient, même enfuies dans les herbes, les chutes causées par le vent... En Indre, j'ai pris du bon et doux temps ! À toi aussi Lili un bon dimanche et tous les jours suivants...

Marie Claude a dit…

Comme tu as bien fait d'immortaliser ces champs de fleurs!!!Elles sont magnifiques ces céramiques anciennes, il y avait des artisans talentueux à cette époque.A présent la même chose coûterait une fortune.V. a du être contente de ta visite...et tu as fais une nouvelle connaissance qui doit être heureuse de s'épancher auprès de toi, toujours à l'écoute!!!
Trèfle à 4 feuilles on dit "chance" à 5 feuilles je ne sais pas!!
Je vois le commentaire de Liliforcole qui parle d' Aloïs je pense parfois à elle ,j'aimais beaucoup son blog,elle s'en est allée trop tôt...
Des bisous du soir chère Danielle

Danielle a dit…

Lili, Marie Claude, bien sûr, comme vous, je reste triste du départ d'Aloïs, son blog était superbe, ses photos magnifiques !! Lili, je suis allée le revisiter après ton gentil commentaire !

Danielle a dit…

Marie Claude, oui j'ai beaucoup pensé aux créateurs de ces belles fleurs en les cueillant, rien à voir avec celles d'aujourd'hui, beaucoup plus simplifiées et même "usinées ?" mes visites se sont faites les tous premiers jours de mon séjour, en sortant, la rencontre, m'a donnée beaucoup de joie !

Bonne journée à toi, le ciel est gris, mais le cœur y est pour t'embrasser.