Dans la campagne : le chef d'oeuvre naturel !
Les arbres :
Avant de partir en campagne, j'avais réfléchi intensément : je vais me focaliser sur les arbres, il y en a sûrement de très anciens, à moi de les découvrir, avec les gens qui connaissent le coin, ou toute seule... La tâche était ambitieuse !
Je m'étais déjà bien chauffée à l'exposition de la Fondation Cartier : Nous les arbres (jusqu'au 5 janvier 2020). J'avais du pain sur ma planche...
Des arbres anciens ? Où trouver ces merveilles dans mon coin ? C'est comme ça que j'ai commencé mon exploration. Dis-moi, mon amie, sais-tu où je pourrais voir des arbres remarquables ? De vieux arbres, tu veux dire ? Oui, de vieux arbres... Attends, il me semble que dans le vieux chemin des "corbieaux", mon chemin d'enfance, nous y allions jouer avec les copains, en bande, il y avait des arbres creux, on se cachait dedans, nous aimions particulièrement ce chemin. Tu vois, tu descends et sur la gauche, tu y es, tu peux y aller à vélo, facilement... Voilà une bonne adresse...
Un petit coup d’œil en arrière avant de poursuivre...
Dès le lendemain, je dis à ma sœur, venue me rejoindre quelques jours dans ma pampa : allez, en route, nous allons voir les arbres ! Et voilà la petite troupe réduite à nous deux sur le chemin des arbres anciens... Le vieux saule creux nous l'avons trouvé tout de suite :
L'arbre creux, c'était celui-là, un saule bicentenaire sans doute, encore vert
Le creux du saule était toujours visible sur la droite, masqué par la végétation parasite qui maintenant l'habitait
Ces branches si épaisses avaient une force visible...
Ma sœur faisait ses vrais premiers pas dans cette belle campagne depuis sa malencontreuse fracture de cheville, une marche plus adaptée que les instruments de torture du kiné, et surtout mille fois plus belle à regarder... Nous avancions comme des tortues attentives dans le chemin des "corbieaux". Tout était à voir et à revoir, découvrir, je ne me souvenais de rien, tu es sûre que nous sommes déjà passées par là ? J'avais tout oublié, je n'avais qu'une seule chose en tête : les arbres anciens...
La peau du saule est grise, sèche et noueuse
Passé le vieux saule, nos yeux cherchaient les autres : mais, dis-moi, vois-tu ce que je vois, cet arbre dans la prairie, là-bas ? Il a l'air gigantesque, ne bouge pas, ménage tes forces, je vais voir...
Un énorme chêne trônait en bord de champ
Le ciel n'était pas bleu, mais on s'en moquait, j'ai fait le chemin vers lui, l'appareil photo au cou, je courais presque. Pour l'avoir en entier, il m'a fallu prendre beaucoup de recul, l'approche se fit en douceur, quand je me suis trouvée dessous, en levant la tête j'avais déjà envie de pleurer...
Sous le grand chêne
Ce chêne avait dû être trogné il y a plusieurs années, car ses branches partaient bas, et étaient très grosses
Sous l'arbre, devant sa force et sa grandeur, je me sentais toute petite, traversée par un peu de peur, mais surtout de l'émerveillement...
Sous ce grand chêne, tout devenait magnifique
Sa puissance était incroyable, chaque branche était énorme, il levait pourtant les bras au ciel avec grâce, sa massive présence me donnait des frissons, et les larmes aux yeux. Comment est-ce possible que cette force existe à côté de nous ? Nous pouvons même ne jamais la voir, voilà plus de dix ans que je viens par ici, et j'avais la tête ailleurs. Je pensais maintenant, sous le chêne, à la toiture de Notre-Dame de Paris, brûlée vive un soir d'avril, ceux qui ont eu la chance de voir la forêt de chênes qui la composait peuvent souhaiter sa reconstruction à l'identique... Sous ce seul chêne, je comprenais ce que devait être cette immense beauté, calcinée...
Plus je m'approchais et plus l'émotion grandissait, l'intérieur de ses branches donnait le vertige
Je ne suis satisfaite d'aucune photo, mais je continuais à en faire, chaque fois que je passais dans le chemin, j'allais sous le chêne, presque avec crainte tellement ça me dépassait. J'avais inauguré des rendez-vous avec cet arbre plus beau que nature, et d'après mes calculs techniques (piochés sur internet), il devait avoir au moins deux cents ans.
Une joie indicible m'envahissait à chaque passage, mes amis le savaient : tu vas où ? Je vais le voir... Bon, tu nous raconteras... Et je leur racontais à chaque fois avec d'autres mots, mais toujours avec la même admiration. Ils ne connaissaient pas cet arbre comme moi, voilà longtemps qu'ils n'avaient pas joué dans le chemin, l'arbre était là bien avant eux, bien avant leur enfance, ils me dirent qu'il avait sans doute deux fois cent ans, et avait passé son temps à grandir sans leurs regards. Mon ami m'expliquait la trogne des arbres : couper la tête du tronc, laisser pousser, pour récupérer beaucoup les bois de chauffage à portée de main. L'arbre prenait ainsi de la robustesse, développait ses branches, et poussait tout seul avec force. Ma mère me disait : va ébrancher le chêne, disait mon ami... Et voilà le chêne depuis très longtemps libre de pousser comme il voulait, il montait en s'épanouissant, dans son ombre on pouvait mettre tout un troupeau de vaches... Et moi !
Les promenades aux chênes étaient superbes, j'y allais avec la même joie qui m'animait quand je visitais les cathédrales, j'admirais les sculptures, tableaux, et autres chefs-d’œuvres, je me mesurais à leurs hauteurs vertigineuses, en retenant mon souffle, sur la pointe des pieds, comme pour approcher un mystère éternel. Toutes ces géantes admirables m'éblouissent toujours, à chaque visite, elles renouvellent mes sensations : les cathédrales gothiques, sculptées comme des dentelles, et les plus anciennes, les romanes, plus sobres, simples, dénudées, lisses, il faudrait toutes les voir tellement de fois pour les retenir pour toujours en nous... Il en va de même pour les grands arbres de l'Indre : chênes, noyers, châtaigniers, séquoias, cèdres du Liban, de très vieux hêtres époustouflant, ils m'ont donné de grandes joies, des frissons, comment rester insensible à ces grands monuments de la nature, si simplement beaux, si merveilleusement beaux ! Ils ont grandi loin de nous, ils sont là, sans paroles, leurs feuillages susurrent pourtant au moindre vent, comment ont-ils fait pour s’épanouir, survivre, devenir gigantesques, contre vents et marées, avec cette puissance ? Ils auraient des choses à nous dire, certains savants le soutiennent, ils seraient capables d'éprouver des émotions eux aussi... Bien des gens passent leur chemin, sans y faire attention, très attention, comme je l'ai fait pendant tant d'années, ils ont fait pour moi seulement partie du paysage. Aujourd'hui je me réveille, je les remarque plus, je les cherche, comment pourrions-nous vivre sans eux ? Ils existent depuis des centaines d'années, si près de nous... Il suffisait de lever les yeux, de s'en approcher, de les toucher, ils le méritent. Pendant ce mois de septembre, j'ai essayé de rattraper le temps perdu, combien de fois ai-je ouvert les bras pour estimer leur circonférence et calculer à peu près leur âge, je ne suis pas encore devenue une adepte de la transmission énergétique des arbres, mais ça peut venir...
Ce chêne-là dépassait de loin le toit des maisons, on entrait dans son cœur comme dans une immense cabane
Les grands noyers
Cette année, en septembre de canicule, les noix avaient du retard, elles s'accrochaient encore aux branches, aucune ne tombait, je ne les attendais pas... J'étais occupée à autre chose, je regardais la cime des arbres...
J'ai poursuivi mes chemins aux arbres comme une aveugle guérie... J'en ai vu d'autres... Ce mois de septembre aux arbres avait pris une dimension exceptionnelle pour moi ! Je pleure encore en y pensant...
Mes amis, mes passagers, je vous en parle dans le dernier post sur l'Indre. À très vite !
Mes amis, mes passagers, je vous en parle dans le dernier post sur l'Indre. À très vite !
10 commentaires:
On ressent si bien ton amour pour ces arbres dans ce billet!!
Ce saule magnifique malgré ses souffrances au travers des ans.
Tout comme toi j'aime les arbres et je pense qu'après t'avoir lue je vais les admirer encore plus différemment...
Je te l'ai peut-être déjà dit,un livre "journal intime d'un arbre" de Didier Van Cauwelaert,que j'avais aimé,le récit de cet arbre plus que centenaire et déraciné après un orage et qui revoit défiler toute sa vie.
Préservons les ils nous apportent tant!!!
Bisous du soir.
Merci Marie Claude, oui, le saule est éventré, mais depuis donc plus de 80 ans à ma connaissance, ce livre doit être passionnant, je vais voir à ma médiathèque.:-))
Oui préservons-les, maintenant, je regarde plus intensément les arbres , ceux squares, des rues, des avenues... à Paris... Les herbes qui poussent dans les ruisseaux, sur les trottoirs, sous les gouttières...
Passe une bonne journée demain, je t'embrasse du soir.
Tes arbres sont merveilleux, chère Danielle, et ils m'ont fait beaucoup penser... au concept de beauté, à celui de résistance, et à une espèce de parallèle arbres-oeuvres d'art sur lequel je n'avais jamais vraiment conjecturé.
Et pour l'anecdote il y a, au fond de la très grande cour sur laquelle s'ouvrent mes fenetres, un vieux tilleul que j'adore! Année après année je suis le passage sur lui des jours et des saisons, et j'en ai pris je ne sais plus combien de photos, dans tous ses états, dans tous ses couleurs...
J'ai presque pleuré le jour où le bruit d'une scie à moteur m'a fait courir à la fenetre pour découvrir qu'un jeune homme avec casque avait escaladé "mon" arbre et était en train de couper, couper, et encore couper ses grandes branches, et j'ai alors pensé que ça n'allait finir que quand il l'aura définitivement abattu, tué.
Le chagrin m'envahissait, je ne pouvais pas continuer à regarder et j'ai essayé de faire n'importe quoi d'autre, toujours avec ce bruit d'enfer qui m'envahissait l'ame et le cerveau. A un certain moment il y a eu une pause plus longue des précédentes... elle se prolongeait, encore et encore... finalement le bruit avait cessé. Mais je n'avais pas assez de courage pour regarder, pour voir s'il y avait encore un tilleul au fond de ma cour. Et bien à la fin oui: il était et il est encore là, il a continué à vivre, luxuriant, en dépit d'une taille si brutale et meme s'il n'est qu'à deux tiers de sa taille originaire, mon tilleul précieux.
Une bonne journée,
gros bisous!
Chère Siu je suis sensible à l'histoire de "ton"tilleul" découpé en pièces pour mieux repartir, il vivra encore longtemps pour ton plaisir, il est déjà reparti, il n'a pas dit son dernier mot... Tes mots à toi sont bien beaux...
Si tous on regardions les arbres comme des monuments historiques, ils iraient mieux... Certaines population des pays lointains, le savent, ils luttent aussi pour leur préservation et leur propre habitat...
Vive ton tilleul et tes belles photos de tous les côtés.
Passe une très belle journée, je t'embrasse fort.
Tu as raison Danielle, il faut que j'apprenne à regarder les arbres comme des monuments historiques
Je me souviens de l'immense marronnier qui trônait devant l'église et devant l'école, la foudre est tombée dessus et l'a brisé. Il a dû être tronçonné, j'ai chez moi dans un placard, une tranche de bois de son tronc
je m'assois souvent lors de mes promenades dans ma campagne lorraine sous un énorme saule pleureur qui me fait profiter de son ombre lors des journées de canicule et qui est juste à côté d'une croix de chemin centenaire, c'est un endroit vraiment paisible
J'aime tes séjours dans l'Indre, je m'y retrouve naturellement ! Les arbres, je pourrais aussi t'en parler des heures... Je me souviens de mon frêne préféré, en Normandie, de mon vieux pommier qui est tombé un jour de grand vent, de mon noyer qui m'avait donné tant de noix...
J'aime ta comparaison avec la visite d'une cathédrale !
Je suis ton chemin ! A bientôt !
Bises toujours campagnardes, ou de la campagne (je préfère !)
Anne Marie, bravo, c'est vraiment bien que tu aies gardé la tranche de bois du marronnier...
Regarde, regarde Anne-Marie, profite des ombres et des douceurs des arbres.
Je t'embrasse très fort.
Enitram, bienvenue, merci de ton passage écrit, merci de me suivre sur mes chemins de l'Indre. Tu dois en connaître des arbres, tes préférés et les autres que tu as sous les yeux, je t'envie...:-))
J'admire toujours tes photos si belles en campagne.
Bises du soir à très vite
Des arbres encore et toujours tous plus majestueux les uns que les autres .
une jolie balade . Je t'embrasse
Oui Brigitte encore et encore des arbres notre capital mondial !
Merci Brigitte, je t'embrasse moi aussi.
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