Le palais Zenobio, un soir...
Dans un palais, l'ensemble de la visite devient une surprise : il faut beaucoup de temps pour passer d'une pièce à l'autre, puisque l'enveloppe compte autant que le contenu.
La salle d'apparat du palais...
En restauration, sous toutes ses coutures...
J'écoute et je regarde...
Dans ce beau palais (fin XVIIe), peint par l'un des premiers artistes paysagistes de Venise, les stucs, les dorures, les trompe-l'oeil ne manquent pas, les anges potelés sortent des cadres, deviennent de vrais enfants qu'on peut presque prendre dans les bras, les drapeaux, les signes de puissance y abondent. Une grande échelle plantée au beau milieu de la pièce nous indique que la restauration des peintures a commencé, mais vu la petite taille de l'échafaudage, et la grandeur des oeuvres qui couvrent tous les murs... On se doute qu'il faudra beaucoup d'argent et beaucoup d'années pour en venir à bout... Dans la grande salle de réception une tribune en forme de balcon, où se tenaient les musiciens, surplombe l'immense pièce... Mais ce sont les voix du XXIe siècle qui aujourd'hui nous font entendre la détresse du monde...
L'échelle est petite... Pour se battre contre le temps
C'est au XIXe siècle que la Congrégation Arménienne devient propriétaire des lieux et y instaure un collège pour les jeunes d'origine arménienne. Aujourd'hui, et depuis plusieurs années déjà, le collège a plié bagages, il semble rester un lieu d'accueil pour les jeunes qui viennent en vacances l'été, l'hiver ? Je ne sais pas... À la fin du XVIIIe siècle, un édifice fut construit au fond du jardin pour servir de bibliothèque et d'archives, c'est maintenant un lieu d'expositions.
Dans le jardin, on écrit aujourd'hui les drames en lettres bleues
Le grand jardin (un des plus beaux de Venise), est magnifique, peu entretenu, sans doute faute de moyens, quelques roses cependant y refleurissent en plus grand nombre cette année... Pousse ce qui vient...
Les visiteurs sont peu nombreux, l'endroit est paisible, quelques tables et chaises installées sur la grande terrasse ombragée accueillent le public, les uns lisent, les autres sortent leur ordinateurs, le temps passe plus lentement que sur le cadran de l'horloge.
Ce grand palais distribue ses sorties dans trois endroits différents, l'entrée principale donne sur la fondamenta, en entrant côtés jardin on échappe au prix du ticket...
C'est mal ! Voyez, je vous fais la visite au millimètre avec le mea culpa !
Je suis donc entrée une fois sans payer, et une fois pour 3 euros, ce qui n'est pas la ruine. Le palais exposait des artistes autour du thème "Approche méditerranéenne". Ces oeuvres, "Évènements collatéraux" de la Biennale d'art contemporain 2011, avaient ce petit côté OFF à côté du IN, comme au festival d'Avignon... Les entrées en général étaient libres...
Il faut quitter les ciels éternellement bleus avec leurs anges potelés, les ors des peintures, les flèches et les arcs disséminés sous les arbres qui nous indiquent l'amour mais aussi les vertus, il faut s'entraîner pour revenir sur Terre...
Le premier voyage vient à nous avec un esquif argenté, prenant l'eau de toutes parts, misérable, solitaire, des blocs de verre coloré évoquent les hommes, les femmes qui viennent mourir sur les plages de sable fin... De l'autre côté de la Méditerranée... Poignant... Cette oeuvre est la seule réalisée en verre que j'ai pu voir cette année... J'ai totalement oublié le nom de son auteur, mais pas le bruit de la mer en granules de verre, rugueux, coupants... Méchant, mortel, je l'ai dans l'oreille.
Ensuite je suis passé à la vidéo, une oeuvre d'Adrian Paci, un jeune artiste albanais qui vit et travaille à Milan, quatre écrans, quatre scènes, quatre adieux, "Last Gestures, 2009". Sur chaque écran, un épisode de séparation pour la jeune et belle mariée, qui s'en va vivre une nouvelle vie dans sa nouvelle famille, laissant ses parents, ses frères et familiers...
Un au-revoir par écran, un geste pour chacun, qui se révèle à nous dans une succession d'images ralenties à l'extrême.
Les couleurs sont somptueuses, c'est elles qui me frappent tout d'abord, puis la beauté des gestes pris dans cet imperceptible douceur du ralenti, qui contraste avec la tristesse, la douleur perçues sur le visage de tous ces gens qui se quittent en s'embrassant, en se caressant, en se séparant gravement.
Malgré l'intrusion de la caméra, qui aurait pu un tant soit peu modifier les évènements, ces scènes ritualisées et ancestrales se lisent sous nos yeux : les protagonistes se quittent, chaque scène me touche, me bouleverse, il faut prendre son temps pour que la boucle se reforme sur chaque écran... Longtemps j'ai gardé au coeur ces scènes de la vie, forcément déchirantes, la mariée ne sourit jamais. Je superpose dans mon souvenir les films d'Ozu, ce metteur en scène japonais qui a filmé et re-filmé tout au long de son oeuvre les séparations familiales... Avec cette émotion, cette tristesse au coeur que je trouve ici, les larmes me viennent...
J'ai tout suivi avec mon appareil photo, presque autant d'images secondes que dans les films, voyez les visages tristes, voyez les bras qui se referment, les baisers affectionnés, les yeux qui se ferment et les sourires absents...
Le frère, l'ami, le cousin ?
Le petit frère, le neveu ?
Un autre familier...
La mère
En partant, par toutes les portes ouvertes, j'ai trouvé cet autre chef-d'oeuvre du temps dans ses couleurs inoubliables... Voyez...
Ni ange, ni nuage, seulement l'usure, les couleurs du temps qui fait son oeuvre
8 commentaires:
Ah! que les hasards sont parfois stupéfiants; Je suis entrain d'organiser les photos pour les futurs albums et j'étais au 28 avril: Palazzo Zenobio, une autre expo, les fresques,le jardin, la musique... Après ce "répertoriage", plein la tête, je clique pour me changer les Idées-ah!bon?- sur Danielle et ses merveilles et je me retrouve en terre de connaissance.
Amusant non?
Je n'ai pas eu l'occasion d'y retourner cette fois-ci et je le regrette pour Alain, une autre fois, sans doute au printemps prochain, ce serait bien, c'était trop beau.
Bonne soiré
MArtine de Sclos
Ah, le palais Zenobio..je l'ai visité l'an dernier...il mérite tout notre intérêt et si on restaure,
c 'est encore mieux.La salle de bal est tout simplement magnifique!
Si tu passes par mon album....et bien tu verras..:-)
Bonne soirée
Danielle
Martine, voilà une superbe occasion d'y retourner...
28 Avril, Philippine...
Je dois dire que pour moi cette année, l'art contemporain+ le palais j'ai adoré.
Bises du soir Martine.
Danielle, j'y suis passée, trop gentille, trop délicate de m'avoir associée à ton diplôme d'honneur, merci 1000 fois.ça me touche beaucoup...
Zenobio s'ouvre pour la Biennale, c'est un régal.
Bises à toi.
L'art n'a pas d'âge dès lors qu'il émeut, comme cette barque qui est très lourde de sens. et de ce fait, fort belle... comme les fresques qui l'entourent et la porte par laquelle tu quittes ton billet
Merci Michelaise de ta visite et de ta compréhension...
C'est vrai, si l'émotion traverse une oeuvre, elle devient vivante pour celui qui la regarde et l'admire.
Bises du matin du sud.
L'anecdote de l'entrée côté jardin m'a rappelé que j'avais fait de même au château de Gruyère à l'époque où j'étais une étudiante fauchée... Le petit hic en pareilles circonstances : le dit jardin n'était pas accessible à la visite -nous y étions entrées en faisant le mur!- et les visiteurs sur le balcon en surplomb nous ont pointées du doigt. Il a donc fallu déguerpir par le même chemin pour aller se payer une tranche de gruyère -difficile de faire autrement en ce lieu-à trois! Au début des années 80, la Suisse était bien belle, mais beaucoup trop chère. Est-ce toujours de même?
Jolie ton histoire Marie-Josée, la mienne s'est tricotée un peu malgré moi, car quand je suis entrée par le jardin, je ne savais pas que du côté "cour" ils faisaient payer...
Pour la Suisse, oui, je pense que rien n'a changé, tout est plus cher qu'ailleurs, et je l'ai expérimenté :-)))
Merci Marie-Josée d'être passée dans le jardin.
Bises du soir.
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