Ça aussi c'est bien, sortir les mots de la bouche, les faire rentrer dans les oreilles de l'autre, construire une passerelle en alphabet... Pour se dire quoi ?
Sur ce pont suspendu, qui va d'une oreille à une autre, on entend la rivière qui coule en dessous, c'est toujours rafraîchissant, pas besoin d'explication, ni même de compréhension, on est ensemble, voilà ce qu'on veut dire ? De toute façon, les premiers mots ne comptent presque pas, il faut du temps pour dire les choses.
Un de vos parents vous a sûrement dit un jour : tu parles pour ne rien dire. Quand on est enfant, on parle sans compter, forcément, on a plein de choses à dire, mais on ne sait pas comment il faut les dire, dans quel ordre, avec quels mots, on se fait tout le temps reprendre... Donner, reprendre, c'est voler...
En fait, moi je connais plein de gens qui font ça tout le temps, parler pour ne rien dire, c'est difficile de trouver les bons mots pour dire sa pensée. Les plus malins s'en servent pourtant bien pour brouiller les pensées des autres.
Je ne comprends rien de ce qu'il veut me dire, je vois à peu près mais c'est pas clair, souvent j'ai dû remettre les mots à plat pour en trouver le sens, le bon sens ? Ça, je n'en suis pas tout à faire sûre.
Je trouve par exemple que les poètes parlent souvent pour ne rien me dire, aïe, je vais me faire mal voir, le langage poétique, c'est beau comme de la soie, du vent, de l'eau avec des poissons d'argent, mais le sens m'échappe, me glisse entre les doigts... Par exemple : "C'est un brin de verdure où chante une rivière, accrochant follement aux herbes des haillons d'argent... Ici tout est dans un ordre parfait, je suis au bord de la rivière, j'ai les larmes aux yeux... Et là : "J'allais sous ton ciel, muse, et j'étais ton féal..." J'entends que c'est beau, mais je ne vois rien, c'est comme de la musique et dans la musique, il n'y a pas d'image, ça doit être ça, la poésie c'est souvent de la musique de mots pour moi...
Je me suis rattrapée ?
Je fais quelques petites exceptions dans mon histoire, Shakespeare, Molière, je ne m'en lasse jamais, j'entends de la musique et je comprends les mots, ça me transporte, ça m'émeut, c'est grand, c'est fort, ça volcanise, ça éruptionne, ça frissonne... Vous voyez ce que je veux dire ou je parle pour ne rien vous dire ?
Parler pour ne rien dire, souvent ce n'est pas vrai du tout, car on est si peu prêt à écouter vraiment, à comprendre ?
Parler pour ne rien dire, c'est souvent une ruse pour passer au travers, pour fuir le coeur de la question, faire un petit tour et puis partir, une parade en somme, pour déjouer les sens.
L'essentiel, c'est de s'exprimer, finalement, parler et ne rien dire, c'est ne pas se priver de paroles...
On parle souvent à tort et à travers comme un jet d'eau qui sort du robinet, parce que la vie c'est compliqué, quelque fois il y trop de mots, quelques fois pas assez....
Bon, j'arrête là, vous allez vous dire, mais qu'est-ce qui lui prend, elle décortique, elle parle vraiment pour ne rien dire... Ça doit être le printemps qui lui tape sur la tête, il va lui sortir des tulipes, des jacinthes, des crocus par les oreilles, et elle va nous raconter que les mots ont des couleurs, c'est déjà fait, Arthur Rimbaud est passé par là... Salut les poètes !
7 commentaires:
il est très joli ton article, merci & bisous !
mais c'est à toi qu'il faut dire merci d'être passé(e) sur ma page.
Merci AL à bientôt.
Comme le disati Mallarmé, la poésie sert effetivement à dire l'absente de tout bouquet... Il suffirati autrement de se distribuer quelques jetons pour les messages minimalistes dont le quotidien a besoin : un jeton pour le sel, un autre pour ouvrir la femêtre, et voilà...
suffirait et fenêtre...
Aujourd'hui, j'ai passé quatre bonnes heures à corriger des copies qui étaient tout sauf de la poésie d'où le fait que ma vision est un tantinet altérée.
Mes excuses...
Chère Felice et un jeton pour ta fatigue...:-)))
La poésie c'est de la beauté en plus, on la trouve partout, pas seulement dans les mots... Aussi dans les coeurs...
Bises du jour Felice.
Moi j'aime bien l'idée qu'il te sorte des jonquilles par les oreilles. Et j'aime bien técouter "parler pour ne rien dire". Chose très différente de "parler pour parler", qui est beaucoup plus inutile. Parler pour ne rien dire, comme les poètes, comme tu le fais pour nous ici, c'est tenter par des détours inattendus, de soi-même puisqu'on part, la fleur au fusil, sans savoir exactement où l'on va, de trouver le chemin de ses pensées. Elles prennent forme, doucement, sans affectation, sans pédanterie, juste comme les jonquilles fleurissent !
Michelaise, oui, juste pour les jonquilles par les oreilles, la fleur au fusil comme tu dis... On cherche un chemin de pensée...
Bises du soir
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