vendredi 5 juillet 2019

Les bons mots, mais lesquels ?


Les dernières fleurs

Pour moi, l'expression : "J'ai vécu un enterrement", est souvent mieux appropriée que : "J'ai suivi un enterrement" !

J'avais retrouvé un tas de personnes que je n'avais pas vues depuis longtemps, éloignées par le temps, la vie, le périmètre géographique. Les "Italiens" avaient choisi sans se concerter leur code couleur : le noir, c'était très impressionnant. Je retrouvais le grandeur du noir, malgré ma tenue qui était claire, dans le ton ambiant, sans code précis. Petit à petit les gens se massaient devant la petite église, on attendait le corps de celui qui était parti, sans crier gare !

Le défunt était encore dans un bel âge, la cinquantaine, pas du tout l'heure de mourir, pas du tout dans l'ordre des choses que de décéder avant ses parents... 

Dans ces rencontres : la famille, les amis, les voisins, les proches de près et de loin, je voyais une grande marque de tristesse, on se rapprochait les uns des autres, on se serrait la mains, on s'embrassait, on se regardait : tiens, c'est qui, lui, déjà, et elle ? Nous avons tous tellement changé, les visages ne me disaient plus rien, un vague souvenir, il fallait remettre les pendules à l'heure, repenser l'arbre généalogiques à la minute, c'est ce que nous faisions avant la cérémonie religieuse. Moi, je connaissais le défunt depuis son enfance, il avait joué sur mon palier avec mes enfants, nous en avions fait du chemin, ensemble puis séparément... Beaucoup plus séparément... De loin en loin, l’ascenseur nous servait d'antichambre pour rebattre nos cartes de visites...


Les dernières fleurs

Comment est-ce possible, si jeune, si brusquement, les langues allaient bon train, mais avec affection, attachement, regrets, où habitait-il déjà ? Ah oui, bien sûr, je le voyais souvent dans l'ascenseur quand il venait voir ses parents, toujours le sourire, un boute-en-train, un optimiste. Souvent je lui disais : alors, comment va la vie pour toi ? Elle allait bien le plus souvent, à ce qu'il en disait, mais nous savons bien que les mots de ces rencontres occasionnelles sont aussi légers que la météo, beau temps, mauvais temps...

La famille est petite, mais les amis, les amis des amis nombreux... L'église est remplie !

Sur le cercueil, il y a le portrait du défunt, beau, souriant, ensoleillé, c'est lui que je regarde, il a l'âge d'un de mes fils. J'en ai vécu d'autres, des cérémonie d'adieux, mais celle-ci était plus touchante.

Je connais sa maman, elle me serre le cœur, elle regarde tout ce monde, tant de monde qui est venu pour son fils, je n'ai pas encore pu la serrer dans mes bras, la cajoler, lui parler lui dire des mots, mais lesquels ?


Les dernières fleurs

Dans ma ville, il y a énormément de familles d'origine italienne, il y avait même une association qui regroupait des volontaires, des bénévoles, ils organisaient de belles fêtes avec des pâtes et des gâteaux à tomber, l'ambiance était toujours chantante. Moi aussi j'étais un peu italienne, depuis le temps que j'allais à Venise, à l'association je me sentais encore sur le vaporetto. Dans notre chorale, nous avons beaucoup chanté, nous chantons encore, de magnifiques chants traditionnels italiens, ces chants qui parlent du travail, de la vie quotidienne, de l'amour, de l'immigration, de Dieu. Nous les adorons, et comme il y a plusieurs bilingues italiennes, c'est épatant, nous ne faisons jamais de fautes de prononciation. Avec l'âge, il y a des choses qui deviennent plus évidentes, le sens s'épaissit... Nous ne traitons pas les chants italiens comme les autres, ils sont à nous ! Les polyphonies naturelles sont merveilleuses à chanter, elles nous parlent, nous les comprenons... L'humanité transparaît dans toutes les langues, un ton au dessus, un ton en dessous, la petite musique des cœurs...

Les italiens étaient en noir, j'ai eu un coup au cœur, j'avais envie de pleurer. Un homme jeune qui meurt, ça fait peur !

J'en avais vus, des enterrements italiens à Venise, ils étaient tous en noir, le cercueil voguait sur l'eau, avec les fleurs, sur le quai les gens attendaient que leur défunt mette pied à terre, entre dans l'église sur les épaules des plus costauds...

Dans ma ville, près de l'église, les mains se serrent, les bras étreignent, les regards fuient, certains de ceux qui pleurent beaucoup ont mis des lunettes de soleil, d'autres guettent un visage connu ou reconnu...

Moi aussi je cherche... Le temps a passé, depuis longtemps il a fait son ouvrage de sculpteur de nouveaux visages... Que nous est-il arrivé ? Nous avons pris de l'âge et chacun mesure peut-être mieux son parcours...

Mes amis, avant le festival d'Avignon, il se passait des choses étranges... J'ai fais un tas de photos pour saisir la préparation du plus grand théâtre du monde... À très vite mes passagers, mes lecteurs...

6 commentaires:

ELFI a dit…

on joue toute une vie ...et à la fin il y a 'parfois' des applaudissements... bises

Danielle a dit…

Merci Elfi de ta fidélité...

Je t'embrasse fort. Bon WE à toi.

Marie Claude a dit…

Comme tu l'écris si bien pas "normal" que les enfants s'en aillent avant les parents,mais aussi quand ces derniers partent laissant des enfants encore bien jeunes,trop jeunes!!
La vie comme on dit souvent est ainsi faite, bien "cruelle" parfois....

Ensuite essayer de trouver les mots,les gestes de réconfort!!

Ton prochain billet sera plus léger j'en suis sûre,nous attendons des nouvelles d'Avignon,comme tu sais si bien les narrer.
Grosses bises "chaudes" du matin,un peu marre de cette chaleur excessive,même si nous sommes en été,je n'aime pas les "extrêmes"...

Danielle a dit…

Oui Marie Claude la vie est souvent rude !

Oui, oui, oui, le prochain post rdv en Avignons, surtout en photos..je te bises fortes du soir.

(Pour conjurer la chaleur du jour je suis allée au cinéma 3h de film chinois So long, My son...un peu long mais passionnant...)

Brigitte a dit…

Toujours difficile un enterrement ,la mort fait pourtant partie de la vie, mais pourquoi trop jeune ou si jeune … Elle n'est pas toujours un long fleuve tranquille ,nous le savons et l'occultons aussi pour mieux vivre notre vie .
Moi, je suis allée voir le dernier Lelouch au ciné "Les plus belles années d'une vie" :un excellent film, émouvant et touchant. Et puis Honneur et Gloire d'Almodovar ,j'ai beaucoup aimé .
Belle semaine Danielle . Je t'embrasse

Danielle a dit…

Oui Brigitte, toujours difficile un enterrement !

Non, Brigitte je n'ai pas vu le film de Lelouch mais Gloire et Amour oui, j'ai adoré !

J'ai regardé sur la 5 la retransmission de la pièce "Architecture" de Pascal Rambert qui ouvrait le festival d'Avignon, j'ai beaucoup aimé, un grand moment de théâtre même à la télé... (3h) commencée assez tard, et terminée à 2h du matin !!! Mais quand on aime on ne compte pas...

Toi aussi Brigitte, passe une bonne semaine, je te bises fortes.