Un monde fou, les bras chargés des courses du week-end, allez, ne
poussez pas, tout le monde rentrera, c’est comme ça dans mon bus aujourd’hui... Quelque fois j'entends les soupirs d'impatience, les demi-mots de rage, je sens les coudées franches, les coups de sac dans les jambes, pardon, excusez-moi, avancez un peu, dans le fond il y a des places, mais rien ne bouge... Des fois, comme je suis petite, disons pas très grande, je sens les haleines aigre-douces, les mauvaises odeurs des temps chauds...
Par chance, j'ai trouvé une place, juste en face de moi, je ne pouvais pas les louper, deux dames
étaient assises, une plus jeune enfourladée coquettement et pantalon noir, moi je dirais la
petite cinquantaine, toute sourire, l’autre dame paraissait plus âgée, en
cheveux blonds, longs et teints, les bras à l'air et bien dodus, une canne au bras... Elles
parlaient, je les regardais et je cherchais à les entendre, j’avais vite
compris qu’elles parlaient de leur vie d’aujourd’hui : pendant deux ans, quand
mon ami vivait chez moi, pendant tout ce temps j’ai pris des médicaments,
j’étais en dépression et il ne voulait toujours pas partir, je pleurais, j’étais triste, je voulais qu'il s'en aille... La dame avec le foulard lui
tapota le haut de la cuisse qui était à la hauteur de sa main, un geste
glissant et affectueux, elles se sont regardées dans les yeux, une regard
émouvant, de découverte et d’attention, ah ! Comme c’est triste, je vais
mieux maintenant, vous savez j’ai 82 ans... Pas possible, vous ne les faites pas
du tout ! Alors la vieille dame a souri et mis sa tête sur l’épaule amicale
qu’elle venait de trouver, un petit câlin furtif... Totalement touchant et
inattendu...
Le printemps dans la vitrine
En fait, elles étaient voisines et habitaient la même
tour : vous savez je ne connais plus personne, voilà 40 ans que j’habite ici, je
dis bonjour, bonsoir aux gens que je connais juste un peu, je ne m’occupe de
personne, je n’ouvre plus la télé, toujours des misères, des crimes, des
massacres, moi j’en peux plus de tout ça... Vous habitez où ? Elle voulait dire à quel étage... Ça fait longtemps
aussi que vous êtes ici ? Je suis au dessus de chez vous, je vais vous
laisser mon numéro de téléphone, si vous avez besoin de quelque chose n’hésitez
pas, je suis ici depuis 6 ans seulement... La vieille dame souriait, elle avait
trouvé une bonne voisine, attentive, et bienveillante, le geste sur la cuisse,
l’épaule prêtée pour pleurer, le n° de téléphone pour parler... Cette rencontre
la réconfortait.
Je me disais, quelle chance elles ont eue de se rencontrer
dans le bus... Une rencontre aussi puissante, aussi mystérieuse que l’envolée des
cloches d’une église qui carillonnent à
grand bruit par delà les vents dans le printemps... Un bruit, une rafale qui porte au
cœur, je ne sais pas pourquoi, j’ai toujours aimé les percussions, elle ont des répercussions sur mes émotions, les larmes me
viennent au moindre roulement de tambour... Les fanfares, le djembé, les tambours sur bidons métalliques, la batucada, le Kodo japonais me tétanisent de joie !
Et puis je suis descendue de ma belle histoire qui dura
quelques stations, je n’en perdis pas une miette, il y a des moments pris sur
le vif qui vous emmènent plus vite que vos pas... Je trouve qu'on apprend beaucoup plus à écouter qu'à parler mais souvent, quand ça se fait à parts égales, c'est un feu d'artifice, la vie paraît plus facile... Souvent un sourire est plus chaud qu'un rayon de soleil... Un regard bienveillant vous offre la clé des champs ! Je ne sais pas comment ça opère...
6 commentaires:
Bien attendu ce printemps, bonne semaine, bonjour belge.
Quel printemps resplendissant tu nous offres ...Tes photos sont superbes .
Et ton récit est plein d'écoute et de bienveillance .
Je te souhaite une belle semaine et je t'embrasse.
Merci Louisette (quel joli prénom)
Bon printemps à vous aussi...
Merci Brigitte de suivre mes pas, avec le printemps c'est plus beau...
Une belle semaine à toi également, plein de fleurs.
Beaucoup de bises du matin et 1/2.
Cette personne va se sentir moins seule à présent,c'est beau cette rencontre...
Elle sont magnifiques ces fleurs que tu nous présentes,par contre le prix est un peu élevé non ? je trouve toujours tout "cher" maintenant et j'ai la fâcheuse tendance à toujours convertir en francs....
Bisous du soir
Oui Marie-Claude, une belle rencontre pour ces deux femmes...
Ah ! Oui, je trouve que les fleurs sont chères, je ne les achète jamais ici...
Moi aussi il m'arrive de convertir en francs !!!
Bises du soir à toi.
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