mardi 4 décembre 2012

Les émotions artistiques de la semaine...


L'émotion number one !

Celui-là je ne vais pas le louper, un documentaire comme je les aime, plein d'humanité, des témoignages magnifiques d'homosexuels, hommes et femmes, nés avant la guerre... Ils ont de la bouteille, que vont-ils raconter de leur vie ?

Des portraits émouvants de gens qui disent à l’unanimité : ça n'a pas été facile pour moi, ni dans ma famille, ni dans la société, l'exception n'est pas la règle, et quand tu es dans la marge, tu dégustes... Et puis après les choses s'arrangent un peu, mais pas toujours, non pas toujours... Dans la famille de ces temps-là, on n'était pas fier d'être homo, on dissimulait plutôt, ça va s'arranger tu verras, ça te passera, je ne veux rien savoir... On s'éloignait les uns des autres, quelque fois le plus loin possible... On se mariait pour faire comme tout le monde, et le naturel revenait au galop ou à la vitesse de l'escargot...

Heureusement, la plupart de ces personnes ont essayé de faire changer les mentalités, elles ont résisté aux discriminations, aux stéréotypes, certaines se sont engagées dans la bataille, elles témoignent avec bonheur du chemin parcouru, elles sont plutôt gais !

Je me disais en les écoutant : elles racontent si bien, elles partagent si bien, comme elles m'émeuvent, leurs paroles sont uniques, aucun discours savant ne peut se plaquer sur leurs histoires, psychologiser, psychiatriser, médicaliser l'homosexualité... Toutes ces voies restent des impasses, l'homosexualité est une composante à part entière du genre humain. Ce film qui dure 1h55 est trop court, tous les entretiens sont passionnants et jamais je n'ai éprouvé de lassitude à leur écoute, car chaque histoire est différente, comme celle de tous les êtres humains. Une illustration musicale mesurée intervient pour lier certains plans, la musique intensifie l'émotion qui parcourt les récits et les paysages, le réalisateur balaye avec énormément de talent les visages en gros plans, la campagne est admirablement filmée, un beau grand film, une vraie réussite.

Dans Télérama, Guillemette Odicino, qui a aimé le film, écrit néanmoins dans sa critique : "Aujourd'hui dans une société obnubilée par la jeunesse, qui s'intéresse aux vieux gays ?" Imaginez l'expression autrement : qui s’intéresse aux vieux hétéros ? La catégorie vieux gays serait-elle plus indicative, plus pertinente pour parler de la vieillesse ? Voyez comme on est encore loin du compte... Elle écrit aussi : "la tolérance, elles la trouvèrent chez les ruraux"... Je n'aime pas le mot tolérance quand il est employé, le plus souvent, dans le sens général : accepter ce que l'on désapprouve, là aussi il y a encore du chemin à faire pour accepter tout simplement, sans désapprouver, l'homosexualité...

Allez-y, jugez par vous même... Je vous souhaite beaucoup de plaisir...




Au théâtre de la Colline j'ai vu Tout mon amour de Laurent Mauvagnier, la pièce dure 1h, temps bien assez long pour vous transpercer le coeur, ou vous mettre mal à l'aise, comme disaient deux spectatrices derrière moi, à la fin du spectacle...

En prenant le métro pour me rendre au théâtre, j'ai rencontré Amélie Nothomb avec son grand chapeau haut de forme et sa livrée rouge et noir, tout naturellement elle est montée dans le wagon que je quittais... Dans la salle, arrivée juste à l'heure, Dominique Voynet cherchait une place... La dame du premier rang s'est poussée légèrement pour me laisser m'asseoir, le placement est libre dans cette petite salle, et il faut jouer des coudes pour être bien placée, et moi j'aime être au premier rang... Face à face avec l'oeuvre et les comédiens...

Cette oeuvre-là parle de toutes les vies de familles, à un moment ou à un autre vous y êtes, tous les sentiments y sont passés à  moulinette : l'amour, la haine, l’indifférence, l’incompréhension, le silence, l'aveuglement, le jugement, le mensonge, le besoin d'écoute... L'histoire est simple : la famille de Tout mon amour se compose du père de la mère, du fils, la figure du grand-père qui vient de mourir, la fille qui revient dans sa famille dix ans après sa disparition, semant le désarroi dans les esprits... Tour à tour, chacun des personnages essaye de raconter sa version de l'histoire, les règlements de comptes, les reproches, les faux-semblants, les chagrins, les désillusions, les interrogations, les attentes apparaissent dans chacune de leurs paroles ou de leur refus de s'exprimer, le spectateur tente de les comprendre mot après mot...

Au début, j'ai eu du mal avec les acteurs que je ne sentais pas du tout dans les personnages, me tenant un peu à distance de se qui se jouait, et puis l'oeuvre a fait le reste, je suis rentrée complètement dedans très vite... L'émotion et la curiosité étaient au rendez-vous. La mise en scène : création collective.

Comme dans la vraie vie, l'histoire d'une famille est bien compliquée à déchiffrer... Qui d'entre nous n'a pas hérité, fabriqué, détourné, des mots qui disaient la moitié de la vérité ?

Merci aux oeuvres d'art qui nous invitent aux retours sur soi, nous rendant ainsi un peu moins sûrs de nous-mêmes, plus humbles, plus ouverts aux autres, plus compréhensifs (Bertolt Brecht appelait ça la distanciation).... Combien je comprenais cette dame peut-être mal à l'aise... Dans son histoire... 

Légende : Une famille bouleversée par un secret qui se dévoile. 
© Jean-Louis Fernandez

Le fils, la fille, le père, la mère

4 commentaires:

Brigitte a dit…

Ahhhh tu me donnes envie de voir ce film!!!
C'est demain mon jour de ciné et il passe en ce moment, j'espère que mon amie sera pour ...Je te dirai si nous y sommes allées.
La pièce ,elle, je ne la verrai pas, mais tu racontes si bien .
Beaucoup d'émotions pour toi que tu transcris à merveille .
Bonne journée et bises

Michelaise a dit…

Ah j'avais très envie d'aller voir ce film dont j'ai entendu dire grand bien à la radio. Quant à la pièce, j'en retiens le nom et la troupe, sait-on jamais si elle devait passer à Avignon, cela pourrait être intéressant. Merci pour ces impressions Danielle

Danielle a dit…

Brigitte, allez il ne faut pas rater ce film, du bonheur pendant 1h55...

Merci Brigitte de passer entre mes lignes, merci.

Bises du soir.

Danielle a dit…

Michelaise, je suis sûre que tu vas aimer le film, sûre de sûre... Nous verrons :-)))

Quant à la pièce, pourquoi pas la voir en Avignon si elle passe...

En attendant je te bises fortes.