Cueillies sur internet (photo de Larkeo)
Avec un printemps comme ça, je ne peux pas rester à la maison, je vais donc aux Puces de Montreuil, flâner sans souci de l'heure : le temps sur ce marché est différent, les aiguilles ne tournent pas, je ne sais pas pourquoi, elles s'arrêtent pile, aimantées par la nostalgie, la curiosité, le hasard... D'ailleurs, je ne mets jamais de montre, pas de rappel à l'ordre, pas d'ordre du tout, ici le spectacle est permanent, le désordre généralisé, les étalages présentent ce que personne n'a voulu garder... Ils proposent une deuxième vie, troisième peut-être, à toutes les affaires de la maison, les petites choses sans valeur, sans beauté particulière, souvent sans originalité, mais très utiles, donc indispensables, pour quelques euros seulement, le temps des bonnes affaires a sonné ! Tous les trente-six du mois, il vous tombe une petite merveille entre les mains, marchandage obligatoire, c'est le grand frisson, l'aura, l'aura pas à ce prix-là ?
Un grand sac en paille, de bonnes chaussures, le téléphone portable sagement rangé, la paire de gants pour éviter de me démolir les ongles, je fouille et je farfouille.
Du côté des vêtements, à la fripe, il y a des montagnes d'habits à remuer : là, comme avec les tableaux, les couleurs agissent comme des aimants, pas de noir, pas de rouge, pas de couleurs trop pétillantes, je préfère des aquarelles, uniquement la peinture à l'eau.
Autour des tas immenses d'affaires neuves ou portées mais étuvées, s'affairent des dames qui fouillent, qui essayent, qui soupèsent, qui s'interpellent : regarde donc ça comme c'est joli, et presque neuf, impeccable, non, moi j'aime pas, mais pour toi c'est magnifique... Les maris accompagnent rarement les dames, mais ça arrive, alors-là le langage change un peu : bon t'as fini ? Mais ça, tu l'as déjà en trois exemplaires, t'en as plein tes armoires, mais tu vois bien que ce n'est pas la bonne taille, allez tu viens, on va prendre un petit café...Oui, oui j'arrive... Et le tour est joué...
On entend parler toutes les langues, mais il faut se méfier, tout le monde comprend le français, pas question de se marcher sur les pieds, entre dames on se conseille, on donne son avis, mais ce n'est pas toujours aussi angélique, quelques fois ça vire au drame, à la bagarre, au pugilat, des cris, des vociférations, mais le plus souvent c'est d'un calme olympien, on n'est pas là pour se faire du mal...
Il faut juste faire attention à ses petites affaires, ne pas tenter le diable qui repère les têtes en l'air, il ne faut pas être naïf sur le marché aux Puces... Comme dans les lieux publics, il faut serrer son porte-monnaie avec précaution mais finalement pas plus qu'ailleurs... Se faire voler est ma grande spécialité, je suis première au hit parade des statistiques, volée dans la rue, dans l'autobus, dans le métro, en bas de chez moi, à l'arrachée comme on dit, sur mon lieu de travail, dans les grands concerts en plein air... Mais jamais aux Puces de Montreuil ! Je n'ai jamais compensé mes pertes avec les petites pièces que j'ai trouvées dans la rue tout au long des années...
J'allais donc d'un tas de vêtements à l'autre avec amusement, et là, je l'ai vue, haute comme trois pommes, très mince, le visage marqué par l'âge, pleine de rides profondes, un peu de rouge à lèvres, de beaux yeux bleus, elle avait posé sa canne dans un coin pour ne pas être gênée, elle parlait fort, riait, elle était tombée sur une jolie veste en textile moderne, un genre de doudoune avec un grand col, vert amande très doux, le tout parsemé de minuscules paillettes qui brillaient comme des étoiles dans le soleil... La veste lui allait comme un gant, allait-elle oser ?
Comme elle demandait son avis au vendeur, je le voyais gêné, oui, oui, elle vous va bien... Je sentais son hésitation, par contre une dame qui fouillait à côté d'elle n'a eu aucune retenue : mais voyons madame, ça ne vous va pas du tout, il faut prendre du noir, à votre âge, du noir c'est ce qu'il y a de mieux... Je n'en croyais pas mes oreilles, deux fouilleuses à côté de moi qui avait vu aussi le manège s’exclamaient : mais pas du tout, elle vous va très bien cette veste, et nous avons croisé le fer contre la dame en noir... Elle est géniale avec, c'est quoi cette idée du noir...
Je trouvais la vieille dame qui avait envie de vert et de paillettes adorable, et vraiment la veste lui allait divinement, elle était parfaite, faite pour elle, du sur mesure, aux Puces c'est rare... Malicieuse comme tout, elle essayait encore. J'espérais bien qu'elle n'allait pas se laisser convaincre par la dame en noir.
Devant l'urgence, nous nous sommes littéralement liguées contre l’ennemi... Madame, cette veste vous va admirablement, ce vert tendre est la couleur idéale, avec vos yeux bleus c'est superbe... Assez de noir, vous avez raison, c'est incroyable ça, de vouloir s'habiller de noir sitôt qu'on a dépassé l'âge... La dame en noir bougonnait, râlait, le noir c'est mieux, à son âge c'est le noir... Qui allait l'emporter ? Pour en remettre une petite couche et boucler l'affaire, avec élan je lui dis : Madame prenez-là, elle vous va à ravir !
La petite dame pétillante trancha dans le vif : je la prends, tiens, je la mets tout de suite, il faisait frais avec soleil, un jour de vieille dame décidée à ne pas se laisser faire, un jour de vert amande et de paillettes...
Nous étions ravies de son choix, nous pouvions nous remettre à chercher notre bonheur avec toutes les autres couleurs...
Si un jour vous voyez une vieille dame, belle comme le jour avec une jolie veste à paillettes d'or, une canne, un sourire et des yeux rieurs, faites-lui compliments...
J'allais donc d'un tas de vêtements à l'autre avec amusement, et là, je l'ai vue, haute comme trois pommes, très mince, le visage marqué par l'âge, pleine de rides profondes, un peu de rouge à lèvres, de beaux yeux bleus, elle avait posé sa canne dans un coin pour ne pas être gênée, elle parlait fort, riait, elle était tombée sur une jolie veste en textile moderne, un genre de doudoune avec un grand col, vert amande très doux, le tout parsemé de minuscules paillettes qui brillaient comme des étoiles dans le soleil... La veste lui allait comme un gant, allait-elle oser ?
Comme elle demandait son avis au vendeur, je le voyais gêné, oui, oui, elle vous va bien... Je sentais son hésitation, par contre une dame qui fouillait à côté d'elle n'a eu aucune retenue : mais voyons madame, ça ne vous va pas du tout, il faut prendre du noir, à votre âge, du noir c'est ce qu'il y a de mieux... Je n'en croyais pas mes oreilles, deux fouilleuses à côté de moi qui avait vu aussi le manège s’exclamaient : mais pas du tout, elle vous va très bien cette veste, et nous avons croisé le fer contre la dame en noir... Elle est géniale avec, c'est quoi cette idée du noir...
Je trouvais la vieille dame qui avait envie de vert et de paillettes adorable, et vraiment la veste lui allait divinement, elle était parfaite, faite pour elle, du sur mesure, aux Puces c'est rare... Malicieuse comme tout, elle essayait encore. J'espérais bien qu'elle n'allait pas se laisser convaincre par la dame en noir.
Devant l'urgence, nous nous sommes littéralement liguées contre l’ennemi... Madame, cette veste vous va admirablement, ce vert tendre est la couleur idéale, avec vos yeux bleus c'est superbe... Assez de noir, vous avez raison, c'est incroyable ça, de vouloir s'habiller de noir sitôt qu'on a dépassé l'âge... La dame en noir bougonnait, râlait, le noir c'est mieux, à son âge c'est le noir... Qui allait l'emporter ? Pour en remettre une petite couche et boucler l'affaire, avec élan je lui dis : Madame prenez-là, elle vous va à ravir !
La petite dame pétillante trancha dans le vif : je la prends, tiens, je la mets tout de suite, il faisait frais avec soleil, un jour de vieille dame décidée à ne pas se laisser faire, un jour de vert amande et de paillettes...
Nous étions ravies de son choix, nous pouvions nous remettre à chercher notre bonheur avec toutes les autres couleurs...
Si un jour vous voyez une vieille dame, belle comme le jour avec une jolie veste à paillettes d'or, une canne, un sourire et des yeux rieurs, faites-lui compliments...
8 commentaires:
"la paire de gants pour éviter de me démolir les ongles" quelle organisation !!
en tout cas, ton combat pour la couleur au futur est passionnant ! pourquoi toujours du noir c'est vrai ça ? faut dire que je n'applique guère ce genre de philosophie étant plus portée pour les teintes neutres mais si cette dame avait envie de paillettes et de vert amande, pourquoi la condamner au neutre, au terne, au simple prétexte de son âge ! Diable, que c'était une juste bataille, et que je suis contente que tu l'aies gagnée !
Oui, Michelaise un peu organisée car en ce moment j'ai des gerçures aux doigts...
Oui, une juste bataille sur la norme et cette dame n'avait même pas besoin de nous en fait, elle a décidé d'acheter cette veste, bien sûr un peu confortée par nos avis :-)))
C'était un beau moment.
Je t'embrasse du dimanche.
C'est tout une organisation cette promenade, je me demande si le vendeur n'était pas tout simplement gêné qu'une mamie pimpante lui demande son avis ?
C'est comme si j'y étais ...je la vois la petite dame haute comme trois pommes et comme tu as eu raison de l'encourager dans son achat !!!
J'aime ces promenades aux puces ou le regard va et viens , aperçoit, découvre,flâne ...Par chez moi je prolonge ma balade par le marché aux fleurs.
C'est certain, cette veste lui va certainement à ravir .
J'imagine que ce fut un beau moment .
Bon lundi et bises amicales
Bravo Danielle! Haro sur le noir...Le seul petit problème que j'ai, en ce moment, c'est qu'il devient difficile de dire, dans ton pays à tout le moins, que j'affectionne...le marine...je viens de chuchoter ce dernier mot, tu l'as entendu? C'est comme ça! Tous les bleus, mais le marine, ma prédilection, avec du rouge bien pimpant pour mettre mes cheveux de plus en plus blancs en valeur! et je ne demande jamais l'avis des vendeurs!!!
Bonne semaine à toi dans toutes les couleurs de l'arc-en-ciel!!!
Bretonne, mais non pas d'organisation, juste une paire de gants quand mes mains sont un peu abîmées... Peut-être bien que tu as raison, le vendeur était timide devant cette belle vieille dame enjouée...
grosses bises.
Brigitte, si tu peux voir comme moi, alors c'est gagné :-))) Oui, un beau moment, les couleurs contre le noir !!
La dame était tout simplement à croquer.
A tout bientôt à toi.
Marie-Josée, moi aussi j'adore le bleu marine, oui j'ai entendu, chut !
Avec le rouge c'est toi qui est pimpante !
Pour les couleurs de l'arc-en-ciel, faudra attendre un peu ici, il fait gris moche !
Grosses bises à toi.
Enregistrer un commentaire