samedi 25 janvier 2020

Christian Boltanski à Pompidou "Faire son temps" ! J'aime ? Non, j'adore !




Hall du centre Pompidou, l'arrivée sur les lieux, toujours enthousiasmante !


Départ - 2015 - C. Boltanski (1944)

Préparez-vous à réfléchir sur la vie, les souvenirs, les traces, les hommages... Faire votre temps !

Allez, allez, on se dépêche, le centre Pompidou annonce Christian Boltanski, pas question de le louper une très grande expo, des œuvres datées de 1967 à 2017, au moins 50 ans de travail d'art ! Du grand Art ! Christian Boltanski est un artiste de ma génération, qui se bat contre l'oubli, je l'admire depuis des années. Lui travaille sur les traces laissées par les gens, pour Christian Boltanski, même morts, les gens sont vivants, et tellement vivants ! Il nous les montre en photos, en boîtes, suspendus, illuminés, encadrés, alignés ou en désordre, en tas, en totems, en ombres chinoises, et même les coeurs battants sur une île japonaise... Chaque fois il me surprend, m'émeut, me bouleverse, Monsieur Boltanski, merci pour votre art des disparus, merci pour les Archives du coeur, les battements des cœurs (volontaires, dont le mien, en 2010) de l'humanité archivés dans cette île japonaise de Teshima, ouverte au public en juillet 2010. J'ai fait don des battements de mon coeur à l'artiste. Dans cette île s'accumule les battements des cœurs, comme les Mormons accumulent les noms des gens du monde entier. L'oeuvre de Boltanski ne se résume pas à des registres, non, ses propositions sont des images, des lumières, des bruits, des couleurs, des sons, des battements de cœurs, des montagnes de vêtements, ses œuvres m'accompagnent profondément... Les codes de ces œuvres sont : la beauté et l'émotion, rencontre des cœurs pour le spectateurs... Pour moi, c'est comme ça !


Mon cœur battant (2010) donné à monsieur Boltanski

Il y avait une file d’attente impressionnante, non pas pour l'expo Boltanski, mais pour l'entrée de la bibliothèque publique, ce lieu de lecture est toujours saturé. Chemin faisant, je vois monsieur Boltanski qui pressait le pas comme moi pour aller à son expo, ni une ni deux je lui adresse la parole : excusez-moi, monsieur Boltanski, je suis si contente de pouvoir m'adresser à vous, si contente de pouvoir vous dire combien votre oeuvre me touche depuis si longtemps, je vous avais vu à Venise, sur l'exposition de Louise Bourgeois que vous admirez, et aujourd'hui j'ai encore la chance de vous revoir... Il était ému et toujours aussi gentil, humble, il me proposa de rentrer avec lui à l'expo... Nous nous retrouverons au dernier étage, chacun allait à son pas...




Les regards - 2011 - Christian Boltanski (1944) 
Cette oeuvre réunit des photographies d'anonymes... 
Chacune de ses œuvres évoque le temps qui passe... Indéniablement !

Subjuguée par la beauté des voiles aux regards : des ventilateurs les agitent, et une lampe les éclaire,  les larmes viennent vite aux yeux... J'aperçois l'artiste en grande conversation avec une caméra, il y a peu de monde, l'heure est propice aux confidences, toujours aimable monsieur Boltanski se plie à tout, interwiew, commentaires et sourires, puis-je vous prendre en photo ? Mais bien sûr...


Portrait souriant, monsieur Boltanski pose pour moi, il a reconnu mon cœur de fan, merci !!! 

Et la visite continue dans l’éblouissement et la grande émotion, comment ne pas vibrer à tous ces regards, lumières, couleurs, dévoilements et sonorités... Ces œuvres ne répondent pas aux questions que nous nous posons sur notre vie, elles interrogent...


Crépuscule - 2015 - C. Boltanski (1944) - L'installation en novembre 2019 (début de l'exposition)


Crépuscule - 2015 - C. Boltanski (1944) - Le Crépuscule advient petit à petit... 22 janvier 2020

J'adore le concept de cette oeuvre, dès l'ouverture de l'expo, toutes les ampoules sont allumées, les âmes scintillent, le temps a le temps de passer, les lumières sont aveuglantes, mais elles s'assombrissent avec les jours qui passent, et apportent une autre image, des réflexions sur le passage de la vie... Faire son temps... À mon deuxième passage, le 22 janvier, l'oeuvre était très assombrie, il faudra que j'y retourne le 16 mars, au dernier jour de l'expo... Cette oeuvre, me dit beaucoup du temps qui passe, j'ai presque envie de rester là... Pour voir toutes les lumières s'éteindre, cette version accélérée des jours qui passent fait beaucoup de bruit dans mon cerveau...


Réserves des Suisses morts - C. Boltanski (1944) - Photos anonymes des défunts parues dans les pages nécrologiques du journal suisse Le Nouvelliste 


Autel Chases - 1988 - C. Boltanski (1944) 



Autel Chases - détail - Photos, boîtes à biscuits rouillées, lumières


Repris mot pour mot du guide de visite de l'expo : "les Reliquaires ont pour origine la photographie de fin d'études d'un lycée juif de Vienne en 1937, le Gymnasium Chases. Pour la première fois, Boltanski se sert de documents ayant un lien direct avec la Shoah. Les lampes de bureau utilisées dans ces oeuvres éblouissent les personnages, rappelant les pratiques policières. Les boîtes à biscuits rouillées, utilisées par l'artiste à partir de 1968, représentent à la fois la boîte à trésors de l'enfance, et l'urne funéraire".


Reliquaire - 1988 - C. Boltanski (1944)


Reliquaire - 1988 - C. Boltanski (1944)


Reliquaire - 1988 - C. Boltanski (1944)

C'est vrai, on ne rigole pas beaucoup avec les œuvres de Boltanski, c'est la vie qui veut ça ! Fragile étoile filante... Dont il ne reste que la lumière...

Je n'avais pas encore remarqué, clouées au mur, des plaques qui représentent des vies entières : un trait d'union entre la date de naissance et la date de mort, un résumé simplissime d'une vie, et juste une lumière qui bat ! Cette oeuvre est un hommage à ceux que Boltanski a connus, et qui ne sont plus de ce monde...

Juste à côté, sur des portants, des tissus sur lesquels figurent de part et d'autre, le portait d'une victime  et celui d'un assassin, ces images sont tirées du journal Détectives... Qui est qui ?


Mes morts - 2002 - C. Boltanski (1944)  Les portants - 2000 - C. Boltanski (1944)



Il y a un nombre important d’œuvres dans cette exposition, je voudrais parler de chacune mais...




Le manteau - 1991 - C. Boltanski (1944) 


Boltanski s'est inspiré des attitudes des religieuses prostrées au sol, les bras en croix... Nimbées de lumière céleste ?






Animitas - Chili, 2014 - vidéoprojection avec son format 16/9, 13 heures 16 sec, foin, fleurs - 2017- Christian Boltanski (1944) 
Oeuvre inspirée des autels religieux chiliens édifiés au bord des routes, aux endroits des accidents... La vidéo fait entendre le son des petites clochettes, et voir tous les supports bouger au rythme du vent... Fascination très puissante... Réalisations in situ : au Nord du Québec, sur la Mer Morte, et sur l'île de Teshima... L'une en été, l'autre en hiver !


La visite se termine par une oeuvre monumentale, magnifique, très émouvante : Le terril Grand Hornu, et les registres du Grand Hornu, deux oeuvre qui font référence aux ouvriers qui travaillaient dans les mines du Grand Hornu en Belgique, de 1920 à 1940.


Les registres du Grand Hornu - 1977 - C. Boltanski (1944) 
Toutes les boîtes à biscuits renferment des archives relatives aux ouvriers travaillant dans les mines, des milliers de fiches comportant des noms et la date d'engagement, parfois accompagnées d'une photographie


Le Grand Hornu - détail -


Le terril Grand Hornu - 2015 - C. Boltanski (1944), composé d'un tas de manteaux noirs et d'une lampe...

Christian Boltanski parle mieux que personne de son oeuvre : "Plus on travaille, plus on disparait, et plus on devient son oeuvre. Je pense que le désir d'un artiste, c'est de devenir son oeuvre. Finalement, on joue sa propre vie pour la vivre réellement : on joue la tristesse et on joue le bonheur... Je pense que dans mon cas, j'ai montré la vie sans jamais la vivre... On fabrique son temps, on fait son temps de vie...

Rien de peut être mieux dit ! Vous l'aurez compris, le temps de cet artiste, le montreur de vies, l'artiste exceptionnel qu'il est, me vont droit au cœur, chaque tableau respire en même temps la vie et la mort, la simplicité des matériaux employés : lumière, photos, vêtements, câbles électriques, boîtes à biscuits, vidéo... multiplient à l'envie la richesse de ses propositions, toutes différentes, toutes prenantes, toutes philosophiques... Toutes me touchent... Si vous habitez Paris, courez à grands pas, si vous êtes loin, je vous plains, j'ai des regrets pour vous...


Sortie de l'expo... Arrivée - 2015 - C. Boltanski (1944)-  ampoules et câbles électriques


Le départ et l'arrivée, (j'en ai intentionnellement intervertis l'ordre), en cartes postales sur mon étagère, une petite vue arrière de Venise qui a fait tellement partie de ma vie


Juste deux mots : pour symboliser la vie, le parcours d'une vie : Départ / Arrivée !! Entre le départ et l'arrivée, qu'avons-nous fait de nos vie ?

Mes chers amis, mes passagers, je vois par mes fenêtres que les jours commencent à rallonger... Nous donnant un peu plus de temps pour nous émerveiller, profitons-en... Je vous embrasse...


10 commentaires:

siu a dit…

Ah Danielle, j'avais écrit avec grand plaisir (et grande fatigue, à cause de la langue) un long commentaire mais une fausse manip, je n'ai meme pas compris laquelle, a tout effacé. Je ne sais pas si j'aurai encore l'envie et la force d'essayer de récrire, telle est la rage... et surtout je crois la conscience que mon écrit était finalement comme je le voulais et ne pourra plus l'etre. J'y avais mis vraiment beaucoup de temps à l'écrire, et je manque probablement d'humilité, mais ce qui me rend impuissante c'est ma colère à cause de cette fatigue pour zéro résultat, un résultat qu'en revanche je tenais beaucoup à te faire connaitre.

Pardonne-moi, et merci pour ton article... Bon dimanche!

Danielle a dit…

Chère Siu je comprends à 200% ton énervement, plus de courage, plus l'envie de refaire un autre commentaire, tellement le 1er correspondait à ce que tu pensais... NON ! il n'y a pas 0 résultat, toi qui es souvent si souvent présente entre mes lignes, je sais que nous nous rencontrons très souvent dans nos admirations et c'est là l'essentiel.

Repose-toi, sois heureuse, ne t'inquiète pas, je compte toujours sur toi...

Bon dimanche, très bon dimanche, chère Siu, je file à la répétition avec ma chorale d'une oeuvre que nous avions donnée il y a 8 ans, je ne me souviens plus de grand chose, mais je sais que ça va revenir très vite.

Je t'embrasse très fort. À très bientôt

ELFI a dit…

merci pour ton post... magnifique...moi aussi je suis fan! bon dimanche! bises

siu a dit…

Dans mon commentaire disparu (d'une manière si énigmatique que je n'arrive pas à comprendre comment cela a pu arriver, et pourtant ce n'est que moi qui ait pu provoquer ça, ce qui m'énerve encore davantage...;-)) je te racontais donc de l'immense admiration que j'ai pour Boltanski, cet artiste incontrournable qui mérite à jamais une place de titan dans le domaine de l'Art (et de la civilisation), sans oublier l'air si aimable et tendre qu'il a dans la photo que tu lui as prise... (bravo à tous les deux!)
Je te disais aussi que je ne sais pas combien de visites et peut-etre de journées il m'aurait fallu pour une expo si vaste, alors que meme l'article que tu lui as consacré est tellement dense que je devrai y revenir plus d'une fois... En effet, depuis quelques années, dès que j'arrive à la réception de n'importe quel musée ou exposition je demande quelles en sont les dimensions (combien d'étages, de salles etc.), pour envisager d'éventuellement intercaler avec une pause... un café... un repas... Et ça car avec l'age la combinaison de fatigue physique + fatigue mentale épuise malheureusement de plus en plus mes forces.
Pour l'anecdote je faisais aussi allusion au British Museum où j'étais, ça fait pas mal de décennies, avec une amie: visiteuses insouciantes, nous avions raté tout un étage et meme plus, étant restées bouche bée à l'heure de la fermeture car nous n'avions pas su maitriser le temps et surtout comprendre qu'il aurait fallu faire -évidemment- des choix... Aucune possibilité d'y revenir, en plus, car c'était notre dernier jour à Londres.

Mais à ce point-là j'ai quelque chose de bien plus important à te dire, car tu es quelqu'un de si cher que meme cette débacle de ma part du commentaire disparu s'est transformée grace à toi en une occasion précieuse et unique, telle celle de lire ces mots de réponse que tu m'a adressés et que j'apprécie infiniment car ils ont pour moi une très grande valeur, et je ne les oublierai pas... merci Danielle!

siu a dit…

C'était bien ta répétition avec la chorale? Je parie que oui...:-))

Marie Claude a dit…

Je te l'ai déjà écrit,en province nous avons rarement la chance de voir de telles expos et je le regrette!!
Que j'aurais aimé découvrir celle-ci,prenante ,bel hommage à travers ses oeuvres rendu à tous ces disparus qui ont tant souffert,vraiment poignant!!
Ensuite réflexion en effet qu'avons nous fait entre le départ et l'arrivée...
Quelle chance d'avoir pu t'entretenir avec l'artiste,nous le voyons sur la photo c'est une belle personne!!
Merci Danielle pour ce partage,tu feras certainement un billet sur la clôture.
Tout comme Siu,je pense que tu as passé un bon dimanche avec la chorale.
Belle fin de journée à toi avec de gros bisous du soir.

Danielle a dit…

Elfi grand merci pour ton commentaire de fan Boltanski, nous lui devons bien ça...

Je t'embrasse très fort chère Elfi.

Danielle a dit…

Siu, alors je suis contente si tu penses que nous n'avons pas râté ce rendez-vous, pas râté du tout, le rendez-vous avec Boltanski et avec moi !!

Je comprends ta fatigue quand l'expo est trop grande, mal évaluée, je comprends les poses, les petits cafés, et quelque fois même il n'y a aucun siège pour se reposer ! Tu vois, au British malgré le 1er étage loupé, tu te souviens de lui...

Pour Boltanski, ça t'aurait plu au maximum car l'expo est à taille humaine, très humaine, quelques sièges même, tu as le temps de te balader dans les vies qu'il met en scène... Au départ comme à l'arrivée ça bouleverse !

La chorale était parfaite, chanter, rire, manger et même boire, un programme de bonheur.

Nous n'avons pas vu le temps passer, un peu baillé vers la fin d'après midi après 3h de répétition non stop !

Je t'embrasse très fort, passe une bonne, très bonne semaine.



Danielle a dit…

Oui, Marie Claude c'est vrai, Paris concentre les événements culturels nous n'y pouvons rien !

Monsieur Boltanski a posé de façon si naturelle si gentille, il n'a pas de théorie artistique alambiquée, mais une pratique artistique tellement au dessus du lot !

Je vais y retourner j'ai programmé mon agenda je ne veux pas y manquer... Je vous raconte en rentrant, promis !

Bonne fin de dimanche Marie Claude, merci pour tout ! Voilà 30 ans que je chante dans un groupe, j'en ai vu de toutes les couleurs, nous nous aimons toujours autant !!!



Brigitte a dit…

Tu en parles avec tellement d'enthousiasme de cette magnifique expo ,tu es tellement fan de l'artiste ... C'est formidable !
Je ne la verrai pas c'est certain, mais ton reportage me va droit au coeur et c'est l'essentiel.
Merci pour tes mots et tes photos .
Je t'embrasse fort du soir et te souhaite une belle semaine
Alors elles te reviennent en tête les chansons que tu dois interpréter ?