La balade du 5 mars était prévue avec mon amie...
Finalement, j'ai pensé que j'avais fait beaucoup de choses depuis plus d'un mois, et que ça serait bien que je vous en parle... J'ai fait toutes les choses que j'avais décidé d'abandonner avant mes bonnes résolutions du premier janvier.
Fabrique de sacs : depuis plusieurs années, je réalise des petits sacs en tissus, et un jour j'ai cessé d'en faire, j'ai tout rangé, le sac de galons et rubans, le sac de tissus, le sac des cordelières, les fils et les aiguilles, la machine à coudre, les épingles, la craie de couleur, les ciseaux, le mètre en ruban, les perles à gros trous, j'ai cessé d'assembler les couleurs, j'ai tout fermé. je n'en ferai plus jamais, marre de me piquer les doigts... J'ai jeté des chutes de tissus, j'ai jeté, j'ai jeté, mais mon amie m'a dit : arrête, garde les beaux tissus, tu vas regretter, mets-toi au travail... Attends-moi pour décider... J'ai attendu, je n'ai rien jeté du tout que des petites choses sans importance... Heureusement que mon amie était là pour assagir mes élans jeteurs...
Fabrique de pompons en perles : depuis plusieurs années, je fais des pompons, pour suspendre aux clés des portes des armoires. avec des perles qui viennent de partout et surtout de Venise... Comme avec les tissus, je cherche des assemblages de couleurs, je compte et je recompte les perles, le pompon grimpe lentement, monté sur du fil assorti à la couleurs des perles, pour les pompons aussi j'ai rangé les perles, les fils, la colle, les aiguilles, la pince, le fil de laiton, j'ai tout fermé, marre, marre de compter et de recompter...
Fabrique de confitures : tous les ans je fais des confitures, les premières de l'année sont celles faites avec les oranges Maltaises, les secondes avec les abricots et les troisièmes avec les mûres mûres de l'Indre...
Fabrique de poudre de citron bergamote : comment est-ce possible, tu as trouvé des citrons bergamote (croisement de citron vert et d'orange amère) ? J'en veux, j'en veux tout de suite, pas de problème mon amie, allons par ici, plus de citrons dans ce magasin, et par-là : un plein panier, nous en avons achetés presque un kilo chacune, mon amie voulait même en manger un tout de suite, mais ils étaient un peu acides, elle qui rêvait de la douceur de ceux de son enfance... Tu sais, ma mère les épluche tout d'un seul tenant, comme les pommes, tu enfiles les écorces sur un fil et tu laisses bien sécher, après tu peux les réduire en poudre, et parfumer ton thé, tes gâteaux et tes crèmes... Quelle bonne idée, merci mon amie, je vais m'y mettre en rentrant ! En attendant, elle a acheté un gros paquet de bonbons à la bergamote qu'elle adore...
Le paquet de bonbons à la bergamote
Mon amie me donnait cette recette le cinq mars 2013, le jour de notre rencontre... Et ce jour-là nous avons fabriqué des petits riens qui donnent beaucoup de joie... Elle m'a dit : viens, on va se balader, retrouvons-nous à Arts-et-Métiers bien sûr, tout le monde connaît ma station de prédilection... Déjeuner au resto vietnamien, bobun délicieux et poisson chinois dans l'aquarium, un instant magique pour la conversation, comment vas-tu ? Comment fais-tu ? Comment va l'avenir ? Et le passé, et le présent défilaient dans nos paroles, sur l'avenir aussi nous avions beaucoup à dire... L'air était si pollué sur Paris que nous avons pris les passages, bu le café à l'abri de la terrasse fermée, la promenade a été moins longue que d'habitude à cause la pollution, mais l'anecdote des citrons et de toutes les belles choses que nous avons vues ou faites, nous les avons faites avec bonheur.
Au premier janvier, j'avais donc pris de bonnes résolutions : je ressors tout, les tissus, les perles, les fils et les aiguilles et je réalise au moins un sac et au moins un pompon dans l'année, il ne faut pas perdre la main, il faut créer, me remettre à l'ouvrage, j'ai encore une multitude de perles, beaucoup de tissus, je sors la machine à coudre, la pince, je reprends l'ouvrage de A jusqu'à Z au moins pour une fois... Je refais des confitures d'oranges que je n'avais pas refaites depuis deux ans, j'en avais bien assez pour l'année, j'ai sauté une année, puis deux...
Ce sont les perles qui sont arrivées les premières sous mes doigts, au coin de la lampe, je me suis dit, je n'ai jamais fait de pompon blanc, blanc comme neige avec quelques perles rouges, je l'avais en tête au fur et à mesure que j'enfilais les perles, j'ai retrouvé tous les gestes les uns après les autres, j'ai retrouvé le plaisir de palper les perles, de mesurer, de tordre le fil de laiton, de choisir la grosse perle qui ferme le pompon, j'ai tout retrouvé... J'en ai aussitôt commencé un autre avec des perles bleues et blanches, je ne l'ai pas encore terminé, mais j'y songe... Voyez déjà le blanc :

Après les perles, c'est le sac qui est revenu, j'avais assorti les doublures et les cordelières, le tissu du côté pile et le tissu du côté face, c'était parfait, j'avais le flash qu'il fallait pour commencer, j'ai mis la machine à coudre sur la table et j'ai filé avec la première couture, l'entrée en matière, c'était parti... Là aussi les gestes, les étapes, il fallait les retrouver, une couture pour rien, zut, il faut redéfaire, il faut réfléchir avant d'agir, c'est toujours comme ça dans la vie, il ne faut pas aller plus vite que la musique, le sac venait très bien, en un tour de main il pendait à mon épaule, je le mets demain avec un foulard bleu, assorti au ciel de Paris... On verra bien... Depuis j'en ai fait deux dans la foulée, il y aura moins de tissu à jeter... Il faudrait que je fasse les sacs un peu plus grands pour y mettre le téléphone... J'ai changé aussi là-dessus, je suis devenue une adepte de la communication rapide, j'ai un téléphone comme tout le monde... C'est fait, j'ai réalisé un sac un peu plus grand, plus besoin de tasser pour faire rentrer mon téléphone portable, mes mouchoirs en papiers, mon porte-monnaie, mon porte-cartes, mes clés et ma carte de transport... Voyez les petits et le grand :

Un petit sac côté pile
Côté face
L'autre petit sac fait dans la foulée, re-pile
Re-face
Le sac plus grand...
C'est la saison, pas la peine de réfléchir avant d'agir, là il faut faire vite, les oranges Maltaises, le sucre, il faut sortir les pots, faire la grande lessive de la stérilisation, frotter, peler, couper, râper le gingembre, un doigt de cannelle, juste ce qu'il faut, il faut tout faire au nez, c'est l'odeur qui dit stop aux ingrédients, il n'en faut pas plus... Tiens, cette année je vais mettre moins de sucre, mais j'ai tout versé d'un seul coup de main, un kilo de sucre et un kilo d'oranges, quand on aime on ne compte pas, la nuit a porté conseil au mélange oranges, sucre, cannelle et gingembre, au matin, au vu de la marmelade délicieuse qui parfumait toute la cuisine, j'ai mis le chaudron (cocotte minute en français) sur le gaz et hardi petit ! Avec un kilo d'oranges je fais quatre pots et demi, il faut toujours que je cherche le petit pot, caché derrière les grands pots... Les étiquettes se décollent, c'est bien la première fois, dix fois j'ai appuyé mon doigt sur les bord, mais rien à faire, elles se décollent... J'ai mis un bout de scotch à chacune... Voyez celui dont l'étiquette est impeccable :

La confiture de l'année
J'ai fait exactement comme disait la maman de mon amie, bien frotté les citrons sous l'eau fraîche, découpé avec soin toutes les peaux, pris un fil et une aiguille pour faire la couture des citrons, je les ai suspendus dans la cuisine et j'ai attendu... Plusieurs jours, une semaine et même plus...Un jour j'ai décidé de tout réduire en poudre avec le petit mixeur à persil... Voyez dans ce petit pot presque un kilo de citrons bergamote.
Le citron bergamote
Les écorces
Séchage sur un fil
Après plusieurs jours
Re-séchage après réduction en poudre

Résultat final pour parfumer le thé et les gâteaux
Et puis je suis allée au cinéma :
J'ai eu la chance de voir en avant première le film de Guillaume Nicloux, La Religieuse, adapté du roman de Denis Diderot (une jeune femme est enfermée contre son gré au couvent et veut en sortir). Un film magnifique de bout en bout, images, lumière, mise en scène, originalité des plans, superbe interprétation de tous les acteurs, une Isabelle Hupper inattendue, une découverte avec la jeune Pauline Etienne... Mais l'émotion n'est pas au rendez-vous, sur aucun plan ! Deux scènes ressemblent beaucoup à celles réalisées par Alain Cavalier dans son film Thérèse, la coupe de cheveux de la religieuse, et la visite du médecin au couvent, Nicloux enseigne à la Fémis et doit connaître parfaitement le film d'Alain Cavalier, mais il n'en fait jamais mention, est-ce un oubli volontaire, ou un emprunt involontaire ?....

Je me souviens du film sublime d'Alain Cavalier : Thérèse (1986, 452 plans extraordinaires et irremplaçables, évocation très libre de la vie de la carmélite Thérèse de Lisieux, une jeune femme veut entrer pour l'amour du Christ au couvent et y meurt heureuse, qui m'avait profondément bouleversée, je l'ai vu et revu plus de dix fois, toujours avec la même émotion... Il fait partie de la douzaine de films dont je ne me lasse jamais, Alain Cavalier réalise aussi des images exceptionnelles riches d'intensité et d'une beauté fulgurante, chaque plan s'imprime pour toujours dans le coeur ! Thérèse est un grand film d'amour mystique, il a obtenu six Césars à Cannes en 1987 pour ses mérites incontestés.
La magnifique Catherine Mouchet dans Thérèse
Ainsi, va la vie, elle va son petit bonhomme de chemin, si rien ne se met en travers, la petite fabrique tourne rond...