mardi 11 juin 2019

Avignon, Venise, S. Zweig, El Anatsui, et mon genou gauche...


Un air d'Avignon

Je file dans le sud, à petit pas, je rage, j'y vais avec précaution, je peste, je ne digère pas le fait que mon genou gauche m'a rappelée à l'ordre ! Je ne supporte pas bien de devoir faire attention, avaler des pilules, glacer l'articulation, et même mettre une genouillère pour marcher droit...

Ce n'est pas trop grave, m'a dit le médecin, nous n'aurons pas à vous couper la jambe ! Vous pouvez partir en Avignon...

Me voilà prévenue, pas la peine de courir partout, ça ne va pas marcher... Quelle chance ! Ma (grande) petite-fille m'a dit : mamie, je t'accompagne à la gare, si nous arrivons bien en avance, nous prendrons un café. Ça commence très bien, ma voisine m'a dit : à l'heure où tu vas partir, tu auras le temps de prendre deux cafés, nous avons toujours tellement de choses à nous dire avec ma petite-fille... Il vaut mieux en rire qu'en pleurer...

Je ne fais donc pas de planS sur la comète, va comme je te pousse, le soleil et l'affection environnants suffiront largement...

Le printemps aura fait son affaire de tout ce qui pousse dans la ville et aux alentours, j'ai hâte de voir les feuilles au bout des platanes... Le ciel bleu, la douceur ambiante, les terrasses bourrées à craquer, les marchands de glaces en poste, les restaurants au garde à vous, les bistrots toutes portes ouvertes, et vive les apéros ! Dans quelques jours s'ouvre le Festival, avec sa grande parade des mots et merveilles !

Ma famille m'a dit : pas question de ne pas venir, tu as dit que tu venais, tu viens, on t'attend !

À pied, à cheval, en voiture, voire en train : me voilà !


Le livre !

J'avais été le raconter à ma voisine, celle que tout le monde aime dans ma tour, sa porte est ouverte à tous, un vrai tourniquet... Entre, assieds-toi, raconte ! Je viens de finir un livre de S. Zweig : La pitié dangereuse. Ah oui, raconte ! Et voilà que je lui résume les 348 pages de cet auteur magnifique, au moment fatidique de la résolution de l'énigme, je la fais languir : va faire bouillir l'eau du thé, je t'attends ! Nous rions...

Voilà, notre héros constate que sa faute personnelle : la "pitié dangereuse", a été dissoute dans le marécage sanglant de la "faute générale" (première guerre mondiale). "J'étais comme un assassin qui a enterré le cadavre de sa victime dans un bois."

Mais rien peut remplacer la lecture de ce livre exceptionnel, pour pénétrer les arcanes d'une pitié dangereuse que développe un jeune homme pour réparer la gaffe faite à une jeune fille, qu'il invite à danser au cours d'une soirée, ignorant que celle-ci est infirme, paralytique... Bien sûr, l'histoire se termine mal ! La dernière phrase du livre est celle-ci : "Mais depuis ce moment, je sais qu'aucune faute n'est oubliée tant que la conscience s'en souvient."

Ma voisine me dit : voilà, c'est formidable, j'ai lu un livre, avec son sourire resplendissant... Comment nous sommes passées de là à Venise, je n'en sais rien, mais vous les connaissez, les méandres de la conversation, un mot en entraîne un autre, et on tourne les pages avec entrain...

Tu sais, j'ai beaucoup appris à Venise ! Et bras dessus, bras dessous, nous nous sommes promenées dans les petites rues inconnues du grand tourisme, ma chère voisine avait les yeux couleur de l'eau qui coulait dans le Grand Canal, nous étions à l'unisson. Elle connaissait Venise depuis longtemps, nous n'avons pas eu de mal à tenir les amarres... Les églises, les tableaux, les histoires, m'ont élevée pendant vingt ans, je suis intarissable sur Venise... Nous sirotions notre thé les oreilles grandes ouvertes, les yeux qui ne demandaient qu'à voir et revoir...


Vista di Venezia  (2016)

Pourquoi, comment sommes-nous arrivées à l'artiste ghanéen El Anatsui, je n'en sais toujours rien, mais l'essentiel est d'y arriver. Je disais à mon amie : tu sais, cet artiste ressemble à Mandela, Obama, même classe ! Un artiste de très, très grand talent, nous avons regardé des photos de ses œuvres sur son téléphone... C'est sans doute en évoquant le Palais Fortuny à Venise, où j'ai eu la chance de voir une de ses œuvres, un énorme rideau paradisiaque fait avec des petites capsules de bouteilles, une merveille !


Au palais Fortuny en 2016 (ma dernière visite)


Oeuvre visible au Centre Pompidou




Quelques sublimes œuvres empruntées sur Internet...

Je me souviens de la toute première fois où j'ai vu les brocards de El Anatsui, j'ai eu les larmes aux yeux. Ce grand artiste était déjà visible à la Biennale de Venise en 1990, ma rencontre s'est donc faite 25 ans plus tard ! Il faut aux artistes beaucoup de patience pour être connus du monde entier, mais surtout de moi... Hélas !

L'amie de ma tour s'y connait en brocards de toutes sortes, elle a travaillé 30 ans dans les ateliers de chez Dior, elle a des doigts de fée et une âme d'artiste... Quand nous avons eu bu le thé, ri, plaisanté, même à propos de mon genou, elle me dit sur le pas de la porte : je suis fatiguée, j'ai tant lu, tant marché dans Venise avec toi, et puis ces brocards, quelles merveilles... Fais attention à toi, ne t'inquiète pas, j'arrose tes fleurs, j'adore ça !

Comme j'ai commencé par mon genou, je termine par un petit au revoir...

Avignon m'attend, pressé de me présenter sa saison d'été, ses touristes, son petit train, ses marchands de glaces à tous les parfums, sa préparation du Festival, je suis tranquille, dans ses belles églises et ses musées, il n'y a pas foule...

Mes amis, à très bientôt ! Portez-vous le mieux possible...



8 commentaires:

Gine a dit…

Un billet qui conte des merveilles! Je me suis régalée, merci! Bon festival!

Danielle a dit…

Merci Gine, je suis si contente que vous preniez du plaisir avec les petites merveilles que je glane...

Le festival commence d'ici une quinzaine de jours, je serais partie... Hélas... Mais déjà il y a du monde sur la ville, tout le monde sent les levées de rideaux et les trois coups en coulisses...

bonne fin de semaine et bises du,matin avec ciel bleu.

Marie Claude a dit…

Bon séjour en famille dans cette belle ville qui sera bientôt en effervescence,dommage tu seras revenue.
J'espère que les médicaments seront actifs pour ton genou et que tu profiteras pleinement,je n'en doute pas.
Bises du matin

Brigitte a dit…

Alors tout d'abord, j'espère bien que ton genou va tenir le coup !
Hâte encore que tu racontes Avignon que je connais mais que je redécouvre à chaque fois avec toi ..;
A petits pas tu feras ton chemin. bon séjour donc
Je t'embrasse

siu a dit…

Merci Danielle pour ces belles images, aussi bien de Venise que des oeuvres de ce superbe Artiste ghanéen... alors que le récit du papotage avec ta voisine est bien sympa et savoureux ;-))
Je fais de très grands calins à ton genou, et te souhaite de profiter quand meme super bien de ton séjour avignonnais!!

Un gros bisous!!

Danielle a dit…

Merci Marie Claude, j'échappe au festival nous verrons l'année prochaine...

Mon genou se calme, je suis prudente...

Il fait beau, doux, bleu.

Je t'embrasse.

Danielle a dit…

Oui chère Brigitre mon genou tient bon...😃

Oui, à petits pas, tout ira bien pour ramasser des images...

Moi aussi je t'embrasse.

Danielle a dit…

Merci Siu, les câlins je les prends, tout ira bien...

Je suis heureuse de faire connaître ce grand artiste :-))

Ma voisine est une providence !

Je t'embrasse avec affection.