mercredi 8 octobre 2014

Venise juillet 2014... Mots doux sur Grand Canal...(4)



Je te fous à l'hôpital...

"La prochaine fois, je te fous à l'hôpital"... Ils avaient raté comme moi le départ du vaporetto, l'attente du suivant dura un moment, elle était dans un état d'énervement incroyable, lui ne bronchait pas, il s'appuyait tranquillement sur sa canne et écoutait sa compagne le menacer, il était en cire.


Elle avait des tas de colliers dorés qui faisaient des cliquetis chaque chaque fois qu'elle agitait la tête, son visage avait été un peu refait, rafistolé ici ou là, elle parlait fort, ne s'occupait pas du tout du public qui grossissait autour d'eux... "Mais c'est un monde ça, tu as fait exprès ou quoi ? Jamais prêt à temps, de mauvaise humeur, jamais content, c'est pas compliqué, les voyages, t'as qu'à les faire tout seul, j'ai pas demandé à venir à Venise, j'en ai rien à foutre de Venise, mais toi il faut que tu y viennes tous les ans, c'est monsieur qui décide, j'en ai marre je te dis, marre, tu m'emmerdes, tu comprends ?" Lui ne répondait pas, rien, pas un mot, il tripotait sa canne, regardait au loin, il prenait sa raclée en silence... "Je te préviens, c'est terminé tout ça, la prochaine fois, je te fous à l'hôpital !" Elle fumait avec frénésie une petite cigarette de princesse, blanche et rose... Ses grandes  lunettes de soleil de star dissimulaient son âge, illusion...



Tu me fais chier...


Elle labourait l'air ambiant de mots terribles, il faisait le gros dos, apeuré comme un petit garçon... "Arrête de crier, j'ai rien fait, je me dépêche, m'énerve pas", il parlait tout doux, ce qui l'agaçait encore plus... "Mais merde, il n'arrive pas ce foutu bateau... Monsieur veut voir des expos, dépense sans compter, j't'en foutrais, moi"...


J'ai cherché à comprendre ce qui se jouait entre eux, mais je n'ai rien su de plus... Ils allaient dans un sens, moi dans l'autre...

Je gardais longtemps dans ma mémoire du jour : "je te fous à l'hôpital"... Ce couple de Français se croyait seul au monde...

Venise reprit ses droits, le Grand Canal était royal, il faisait beau, l'air était très doux, pas trop chaud cette année, mais sur le bateau ça bardait... Des paroles méchantes, cruelles, coupantes, assassines, qui n'allaient pas du tout avec le bleu, le blanc, le rose, les couleurs de Venise continuaient leur travail de beauté sous mes yeux, j'avais envie de me boucher les oreilles...




Tu vas arrêter de m'emmerder...


Ce couple, qui devait additionner bien plus de cent vingt ans à eux deux, ne devait plus s'aimer depuis très longtemps, longtemps, ils n'étaient sans doute pas venus accrocher un cadenas d'amour sur le pont Accademia...


Après, bien après leur départ, j'ai oublié les cris, j'allais vers le musée Fortuny entièrement restauré, ce magnifique palais m'apporta toute la douceur, la beauté dont j'avais besoin après ce déluge de haine...



J'en ai rien à foutre de Venise...

Prochainement la visite au palais Fortuny, toute en douceur - épisode 5

12 commentaires:

Dominique a dit…

Qui est capable de beugler "J'en ai rien à foutre de Venise !" à l'arrêt d'un vaporetto devrait aussitôt être conduit à l'hôpital psychiatrique de Poveglia. Peut-être que la fréquentation prolongée de fantômes pleins d'imagination remettrait un peu d'ordre dans un sens de la beauté et donc des valeurs encore plus abîmé que le plus rongé des poteaux en bois de la Sérénissime !!!

ELFI a dit…

se foutre de fortuny? non, non , non!!!!:)))

Danielle a dit…

Dominique, oui, cette dame n'en avais rien à foutre de Venise, c'était comme ça, j'étais perdue dans des affres de perplexités...

Mais ça n'a pas empêché ma journée d'être toute à Venise, dans ses douceurs et ses beautés... Heureusement.

Bises Dominique à bientôt.

Danielle a dit…

Chère Elfi, incroyable en effet, cette dame aurait aimé être ailleurs, surtout je crois, loin de son mari :-))

Bises à toi.

Les Idées Heureuses a dit…

Il y a des vies-calvaire qui rendent aveugles certaines et sourds d'autres...
Histoire d'un invisible si fragile, où est passée la tendresse dans tout cela, l'amour du beau?
Ah! ma belle, heureusement Fortuny a du te réconforter.
j'y retourne dans deux semaines, belle expo sur "La Divina Marchese", une qui a su beaucoup aimer!
Bises dici
Mamina de S

Marie Claude a dit…

En lisant les "titres" des paragraphes,je me suis posée des questions....
Heureusement que tu as pu retrouver du réconfort dans ta visite.
"se foutre de Venise" avec de si belles images, incroyable.
A bientôt avec la visite de Fortuny.
Bisous du matin

Danielle a dit…

Quelle chance Martine de retourner très vite à Venise, bonne visite à Fortuny, bon séjour pour tout.

Prends du plaisir à chaque minute.

Grosses bises chère Martine.

Bises du jour.

Danielle a dit…

Marie-Claude, tu vois cette femme n'était pas à sa place là où elle était, à Venise comme ailleurs il y a des drames...

A bientôt pour la visite :-))

Bises du matin.

Brigitte a dit…

Magnifique vue ...Et la dispute s'estompe heureusement pour ta visite suivante .
Qu'elle ne soit pas contente d'être là surtout avec lui ,je pense, mais cette personne n'était pas obligée non plus de faire le spectacle !!!
Bises chaleureuses

Danielle a dit…

Merci Brigitte de passer par chez moi :-)

C'est vrai qu'elle en faisait des tonnes, elle s'en foutait en fait...

Moi j'ai passé une belle journée, j'ai poursuivi ma route.

Bises du soir.

VenetiaMicio a dit…

Quel gâchis, venir à Venise et s'engueuler !
Tu assistes à de drôles choses quand même !!!
Vite, vite on file on va au palazzo Fortuny, là tout est beau, tout est calme et magie
Je t'embrasse
Danielle

Danielle a dit…

C'est vrai quel gâchis tu as raison, mais que pense que dans toutes les villes ce genre de dialogue est pathétique...

J'ai, vu, j'ai entendu, et j'ai été stupéfaite par tant de haine...

Gros bisous Danielle, bonne journée.