mardi 24 septembre 2013

L'Indre... Pas plus loin que le bout de mon nez...



La "routine" verte (petite route en berrichon)


Vous le savez, quand la pluie est tombée pendant plusieurs jours sur la campagne, les couleurs et les parfums deviennent plus intenses.... Ils suffit de faire une petite promenade à pieds dans n'importe quel chemin creux pour être assailli par la diversité des odeurs.

J'ai beaucoup de chance car ici je suis très loin de de la civilisation "agitée" je ne parle qu'aux canards et aux carpes, quand je suis sur les marches de "mon" étang ma conversation est très limitée : un bruit d'ailes, un clapotis dans l'eau et on se comprend parfaitement, pour communiquer avec ce que je vois j'ai juste besoin de mes jumelles et de mes yeux, rien à dire, juste regarder, écouter...



Les vaches...


Les figues...


La vigne...


Le futur petit feu d'herbes...


La terre labourée...


Le grand noyer et la petite loge... En ruine...


Mais pour les parfums de la terre, il faut que je mette des mots pour vous, car je n'ai pas de photo à vous montrer... Dès les premiers pas de la balade, si petite soit-elle je suis chez le parfumeur. Comme j'habite près de deux fermes, c'est d'abord l'odeur des vaches qui me parvient au cerveau, puis le purin, et les réserves d'herbes enrubannées dans des grands rouleaux de plastiques pour l'hiver, c'est de l'ensilage, les vaches en raffolent. Puis viennent les odeurs des végétaux, l'herbe, les arbres, le figuier éclatant, les buis, la paille, le foin, la vigne, le petit feu de bois dans le jardin... Les fleurs des champs son beaucoup plus discrètes...

Souvent je me suis dis comment vais-je faire pour emporter tout ça ? Respirer chaque odeur, la mémoriser... Quels parfums !

Quand il fait  beau il faut attendre  le soir pour respirer ces airs-là... Un par un ils composent les couleurs d'un arc-en-ciel invisible...

Le matin je me parfume souvent à la rose, une fragrance que j'achète à Venise, trois petits flacons, juste assez pour passer l'année, ainsi je suis obligée d'y revenir... Trois gouttes de rose tous les matins, trois petites giclées, battues à plate couture par mes amis les bêtes des fermes d'à côté...


L'étang...

L'odeur de l'eau est très compliquée, mais je sens le mouillé, la vase, les ajoncs, je ne peux pas vous la montrer non plus, juste l'image de l'étang...

Après une semaine de mauvais temps, le moindre rayon de soleil s'achète à prix d'or, j'ai glissé quelques écus dans cette photo...



C'est ici que le soleil mettait son or...

J'ai décidé de reprendre mon vélo, j'avais assez d'odeurs de septembre qui collaient à mes souliers. En passant devant le grand noyer j'espérais bien ramasser quelques noix, mon rendez-vous avec la nature était loupé, elle était en retard. Je persiste, secoue, guette, sur leurs branches, les noix sont encore emberlificotées dans leurs bogues, les mûres sont embrouillées avec les insectes et les toiles d'araignées, elles baissent du nez, trop tard, trop tard. Hier, j'ai pu en grappiller un kilo, sitôt cueilli, sitôt transformé en quatre pots de confiture, j'avais rajouté de la vanille pour améliorer l'extraordinaire, mais ce n'est pas probant... L'extraordinaire n'a pas besoin de plus que de lui-même.

Hier, Le vieux monsieur que j'ai rencontré sur le chemin de l'étang travaillait dans son petit jardin en plein air... Pas si petit que ça, le jardin qui pouvait nourrir tout un régiment, il m'avait dit en me voyant chercher des mûres : j'crois bien qu'il n'y en a pas par là, allez donc voir là-bas des fois, et le long du champs du voisin, des fois... Après recherches approfondies, dans le coin qu'il m'avait dit, il fut étonné de voir mon sac rempli : ben vrai, ben c'est inouï dites-donc... Ici, personne ne les ramasse... Ce que personne ne ramasse ne fait pas mystère, je suppose qu'il ne m'aurait pas indiqué des coins à champignons si facilement... Exactement comme moi à Venise, je ne donne aucune adresse, je garde presque tout pour moi, maintenant avec Internet, vos plates-bandes sont vite piétinées... Je renseigne le touriste ça oui, tournez à gauche où à droite, bon séjour à Venise, n'oubliez pas de vous perdre...

Aller :

Cet après midi, après avoir bien  respiré mes odeurs préférées, je filais sur mon vélo, doucement, vers l'étang. En passant devant le jardinier, mon appareil photo en bandoulière, j'ai mis pied à terre devant lui : bonjour monsieur, déjà à travailler dans vos terres, quel courage, je cherche quelques noix... Ben c'est trop tôt, tout est en retard, les noix tombent pas, faut attendre encore ! C'est sûr monsieur, mais moi je pars bientôt, j'espère bien qu'elles vont se décider... Ah ! Les plus belles sont en haut, quand elles tombent maintenant elles sont véreuses, vous croyez ? Je n'ai aucune chance ? Ben je ne sais pas, tout est en retard...

Pourtant les mûres étaient déjà passées, aussi vite que l'éclair, mes échantillons de confitures je vais les cacher, chasse gardée, bien gardée, au fond de mon placard...

Je le laissais à sa culture, en plein soleil, sous sa casquette...

Il ne me proposait jamais rien, ni salade, ni melon, ni poignée de mirabelles, son usine était fermée à double tour, il avait jeté la clé au loin... Notre conversation tournait autour du retard ou de l'avance de la nature, suivant l'année. Au bord de l'eau, je repensais à cet homme, souriant, attentif, méticuleux, travailleur, mais pas très généreux.

Retour :

Il faisait doux, rien, personne ne se bousculait à l'étang, j'ai vu l'épine dorsale d'une énorme carpe virer net à 180° à mes pieds, deux cygnes,  quelques poules d'eau, des bruits étranges, des ronds dans l'eau... Comme c'est beau ! Il faut rentrer...

Le berrichon du petit jardin, pas si petit que ça, terminait sa journée, il nettoyait ses outils avec soin, il avait ratissé tant et plus : les fraises, les salades, pas une seule mauvaise herbes ne dressait la tête, le mirabellier était tout secoué, bien net, ses branches étaient aussi propres que les os d'un poulet que vous auriez sucés.


Les pommes avant la compote...

Vos faites quoi avec tous vos fruits monsieur ? On fait des confitures, des compotes, des tartes, on en mange tous les jours... Je me demandais vraiment pour qui il secouait ses pruniers, ses pommiers, il fallait une sacrée famille pour venir à bout de la récolte, et même s'il se montrait partageux avec ses nombreux voisins, ses enfants, il devait en avoir de reste. Des melons traînaient encore sous leurs feuilles, je me disais comment font-ils pour manger tout ça, à moins d'aller les vendre au marché ? Il ne m'avait rien proposé, mais je ne lui avait rien demandé on plus.. Un petit sourire c'est tout ce qu'il m'a donné... Au revoir monsieur, bonne fin de soirée, alors seulement il me dit : j'vous donnerais bien un melon mais y sont passés, sont pas sucrés du tout, j'vais les donner aux poules, elles adorent ça, sans les pépins... Les pommes de terre nouvelles de novembre sont foutues aussi, tout est à jeter... Je vais arracher aussi les haricots, ils sont pourris, rien ne vient bien... Je souris, bonsoir monsieur à plus tard...


Gros plan sur les tomates...

Ainsi va la vie... Le partage, le don, ne se font pas n'importe comment, avec n'importe qui, il faut vraiment se rencontrer, avoir du plaisir à sourire, à parler, à être un peu heureux, ému, écouter ou parler, chacun fait ce qu'il peut pour faire fonctionner ou pas la rencontre...

10 commentaires:

Marie Claude a dit…

En effet il n'est pas très généreux ce monsieur....
Peut-être que la confiture de figues pourrat-elle se rajouter aux pots de mûres afin d'avoir une petite reserve pour cet hiver.
Magnifique description de ce paysage au cours de vos balades,je m'y voyais presque....

Les Idées Heureuses a dit…

Viens chez moi il y a de la figue sucrée; par contre tu vas rire ma culture sauvage de tomates s'est résumée à ....4 petits fruits rouges veinés de vert tendre, une merveille pour notre bouche gourmande. Ce n'est pas encore que nous allons faire fortune à Rungis!!!
Tu devrais mettre en livre tes historiettes, c'est une vraie gourmandise comme mes tomatines du sud.
Bientôt tu vas retrouver d'autres Aventures de la Vie
Si tout marche bien avec la santé de mon papa je cours à Venessia fin octobre pour une petite dizaine.
Bises
M de S

Fadette a dit…

Merci pour cette magnifique description d'odeurs...tout y est ! Et le voisin est plus vrai que nature. Très beau texte. Bravo.

amélie a dit…

Je suis assise devant mon bureau et pourtant je viens de faire une magnifique promenade aux arômes enchanteurs, j'ai foulé l'herbe humide et rencontré la faune berrichonnes.. merci

Danielle a dit…

Marie Claude merci de passer, des figues je n'en ai pas assez, trop hautes sur les branches :-((

Gros bisous du jour.

Danielle a dit…

M de S :-)) je t'envie avec tes figues... Les tomates par contre il y en a à revendre ici ...

Je croise les doigts pour ton papa...

Je t'embrasse très fort.

Danielle a dit…

Fadette je suis ravie de vous savoir dans mes lignes, merci.

Bises de l'Indre...

Danielle a dit…

Amélie, je suis contente de vous emporter dans mes virées.

Bises fortes du jour.

Brigitte a dit…

J'y étais et je respirais les odeurs avec toi ... J'habite à côté d'une ferme et souvent je ne les sens plus ou presque !!! Ce sont mes enfants lorsqu'ils reviennent qui retrouvent les odeurs de quand ils étaient petits .
Un billet aux odeurs entêtantes délicates,pleines de promesses ou pas ... Et ton voisin te donnerait bien que ce qu'il ne peut te donner ,c'est juste un travailleux.
Bonne fin de séjour dans ta chère campagne ,le soleil est certainement revenu .
Je t'embrasse

Danielle a dit…

Brigitte, oui ce que tu dis est tout juste pour le travailleur, nous parlons souvent ensemble quand je passe sur mon vélo, maintenant il me serre la main :-)))

Pour les odeurs de la ferme, je pense aussi que l'on doit s'y habituer à la longue...

Oui, le soleil est là, presque jusqu'au bout :-)))

Bises du jour à. Toi.