lundi 21 mai 2012

Le plein d'histoires... Au marché, dans l'ascenseur !



Le cri, d'Edvard Munch (1893)


Au marché...

Ben, ben, ben, te voilà avec ta canne, ta sciatique ne va pas mieux ? Non, ça dure, dure, voilà déjà 15 jours que j'endure ces douleurs, j'ai vu le médecin, j'y suis allée pour vider mon sac, lui dire ce que j'avais sur le coeur, faire un peu le vide de mon âme, je me disais : il faut que je lui parle de tout, depuis quelques mois je ne vais pas bien, tu vois, des tas de trucs qui restent, qui m'embêtent...

J'ai été déçue, ah ! bon, il t'a dit quoi pour te décevoir ? Il m'a dit : on verra ça la prochaine fois ! Moi tu sais, j'avais tellement besoin de lui maintenant, aujourd'hui, à l'instant même, il m'a dit : on verra ça la prochaine fois. Je vais lui dire quand on se reverra tout ce qu'il m'a laissé sur les bras, dans le corps... Je ne comprends pas pourquoi il t'a fait ça, pourtant il est très écoutant d'habitude (je le connais très bien), bizarre qu'il t'ait répondu si évasivement, ce n'est pas bien du tout, il avait sans doute des problèmes personnels, c'est peut-être lui qu'il aurait fallu écouter, il n'était pas disponible ? Nous avons souri, tu aurais dû lui demander : alors docteur, comment allez-vous aujourd'hui, racontez-moi vos malheurs ? Il se serait mis aussitôt à pleurer sur son sort, ou sur celui de l'humanité ? Nous avons encore souri. Il est comme nous tu sais, agacé par la vie, par la maladie, par tous les problèmes du monde, personne ne rajeunit, même pas lui, il n'a pas pris le temps, n'a pas pu entendre ta voix, c'est inimaginable. Nous savions bien toutes les deux que ce médecin était très bien, d'habitude il chouchoute ses patients, toujours plein d'humanité, mais quand même il avait raté le rendez-vous de mon amie, l'avait laissée choir le jour où elle était résolue à lui parler, ses paroles avaient pris l'eau, noyées dans l’indifférence, coulées, disparues, dématérialisées, avec sa "prochaine fois", il l'avait jetée par dessus bord,  elle avait crié dans le désert de son cabinet... Il aurait dû lui rembourser la consultation pour cause d'oreilles bouchées, de coeur sec, pour une fois !

Les yeux bleus de mon amie disent parfois le contraire de ses paroles, elle les a apprivoisés pour qu'ils ne la trahissent jamais,  ils restent rieurs quand elle dit : rien ne va, j'en ai assez,  il faut que l'on m'écoute, je ne suis pas bien en ce moment... Moi je prends le temps, depuis le temps, de les regarder bien en face ses yeux,  je vois tout de suite la petite lumière qui vacille, le petit silence impersceptible qui attend une parole de réconfort... Nul n'est de marbre, des yeux qui brillent à ce point, c'est le chagrin !

Courage mon amie, 15 jours déjà avec ta sciatique, tu as fait le plus gros, prends patience, tu vas aller très vite beaucoup mieux, passe un bon, très bon dimanche et nous nous embrassons par amitié, pour renforcer l'espoir.


Le jardin du marché (pris sur internet)
Dans l'ascenseur...

Je vous en prie, passez donc, et voilà qu'ils me tiennent la porte, trop gentil merci, nous montons tous dans l'ascenseur, je me mets au fond car je descends la dernière, ils avaient fait le marché, les sacs, il y en avait partout, à moitié pleins mais en nombre, le père, la mère et les enfants, ça faisait du bruit dans la cabine mais on s'entendait très bien quand même.

Vous êtes bien chargés ce matin, oui, nous avons fait les courses pour la semaine, enfin une petite semaine, car il n'y aura jamais assez... Pour les enfants il ne manque rien, des petites choses par-ci par-là pour le plaisir, mais il faudra y retourner, écoutez, moi je trouve que la vie devient de plus en plus chère, l'ascenseur était à leur étage, j'avais bloqué le bouton pour qu'ils déchargent tranquillement, et sur le palier, elle se met à compter les sacs, voyez, on en a eu pour presque 100 euros... Et il faudra y revenir, vous vous rendez compte, je trouve que tout augmente, je ne sais pas comment faire autrement et encore, nous, il ne faut pas qu'on se plaigne, on ne manque de rien, nous pouvons le faire...  Aujourd'hui c'est elle qui a parlé, d'habitude c'est lui qui disserte sur la pluie, le froid, le vent... Et le beau temps, souvent il me raconte les fleurs qu'il met sur son balcon, des persistantes qui durent tout l'été, bien solides, forcément exposées plein sud, elles dépassent bien vite ses espérances pour retomber en cascade de l'autre côté de la balustrade, il a les pouces verts... J'ai vu son visage quand sa femme a parlé, il était entièrement d'accord, et faisait oui avec sa tête, sans cesser de sourire...

Allez, bon dimanche, bon appétit ! L'ascenseur s'est refermé avec un bruit métallique et je suis montée plus haut...

Les petites histoires de ma tour tournent en rond, pas moyen de sortir de là, des ritournelles en somme, des mots de tous les jours de marché, un jour il fait beau, un jour il pleut, pas que des ennuis mais beaucoup de soucis...

Justement, aujourd'hui, c'est comme en été, le soleil va faire pousser l'abricotier du mini jardin du rez-de-chaussée, pas de vent, pas de disparus, les fruits resteront bien accrochés... Chic !

16 commentaires:

Miss Lemon a dit…

Bonjour Danielle

D'avant d'arriver chez vous pour lire des histoires je venais de lire ceci...
http://psychoactif.blogspot.fr/2012/05/que-des-ennuis.html
qui pourrait nous faire tous méditer et sonne souvent comme vos chutes!
Amitiés.
Miss.

Enitram a dit…

Déjà un gros bravo pour ton blog et ton cinquantième membre !!!! Oui, oui, ça peut se fêter!!!!
"On a bien tous des petites misères" et on traverse dans la vie de drôles de périodes mais on y tient à la vie et c'est tant mieux !!!
Quelques fois, surtout en ce moment, je me dis "à quoi bon tout ça ?" Les avis des médecins, la radiothérapie, la morphine, la volonté de survivre ... Mais l'espoir est toujours là et pour eux je garde le moral!!!
Pas facile !
Tes petites histoires me réconfortent, continue!
Bonne journée Bises

Brigitte a dit…

Ce sont les p'tits soucis de la vie: les plus importants qui concernent la santé,les plus banals qui touchent au quotidien ,mais tu racontes tellement bien, que c'est un plaisir de te lire .
Allez demain il fera beau et la vie sera toujours belle .
Bises amicales du jour

Danielle a dit…

Miss, oui j'ai lu la petite histoire du psychiatre, intéressante, où nous voyons que le désarroi, la solitude et le partage sont bons pour tout le monde...

Bises du soir, fraîche.

Danielle a dit…

Enitram, pas facile pour toi en ce moment, d'abord je te fais des gros bisous d'encouragement et puis je te dis : tiens bon, car, bien sûr l'espoir est au bout, il faut y aller de toutes tes forces...

C'est injuste de demander toujours plus de courage, plus de moral aux malades, alors qu'ils ont déjà fort à faire avec le combat... :-))))

Je pense à toi fort.

Je suis contente de pouvoir participer à ton réconfort.

Je t'embrasse aussi fort du soir.

Danielle a dit…

Brigitte, merci d'être passée...

Oui, demain il fera beau, réconfortant-nous :-)))

Bises du soir.

Marie-Josée a dit…

C'est bien vrai que tu participes au réconfort des uns et des autres... Notre petite communauté virtuelle apporte un peu de chaleur dans un monde où tout se complique de plus en plus et le Québec est loin d'être en reste ces jours-ci!!!

Bises pour une meilleure semaine!

Bretonne a dit…

La vie n'est pas toujours facile, il est important de le dire, d'être entendu, écouté, souvent notre corps exprime les douleurs de l'âme.
J'apprécie ton blog, on y parle de la vie, la vraie , le quotidien ; trop souvent les médias à travers des événements ou des "people" font croire à certains que c'est la vie…. Lorsque les jours fériés apparaissent, à entendre les journalistes, tout le monde part, ce sont les vacances et hop c'est la même chose. Le quotidien est encore plus douloureux pour ceux qui souffrent, lorsqu'il fait beau, c'est pire encore. C'est d'ailleurs la période où le nombre de suicides est le plus élevé, je sais la Bretagne détient tous les records…

Avec ça si je n'ai pas plombé l'ambiance ! !

Danielle a dit…

Marie-Josée, je trouve aussi que notre petite communauté a une grande empathie pour le genre humain...

Je crois... c'est très réconfortant !

C'est vrai Marie-Josée, le monde est compliqué voire dangereux, ça saute dans tous les sens, et toi au Quebec tu es en première loge pour le constater en ce moment...

Merci de ta présence, je te bisess fortes.

Danielle a dit…

Bretonne, je parle de la vie, de celle que je connais au plus près de chez moi au plus près de moi... Au plus près de ce que je suis.


Je parle de ce qui me touche, j'essaye de réfléchir, d'être là quand il le faut, si je le puis...

Non, tu ne plombes pas l'ambiance, la vie c'est tout cela, les soucis, les pleurs les ennuis,les rires, les fleurs et la vie...

A bientôt, bises du soir.

Françoise a dit…

Le "souci de l'autre" transparaît souvent dans vos écrits et les commentaires sont tout aussi emprunts de chaleur, de partage...une belle chaîne d'amitié.

Bises.
Françoise.

Michelaise a dit…

Et deux petits éclats de vie, comme des éclats de noisette pour les écureuils qui te lisent ! on a envie de te souhaiter plein de soleil aujourd’hui Danielle, comme tu nous en donnes, en brassées

Danielle a dit…

Oui Françoise une belle chaîne d'amitié... Mon but est atteint si vous sentez l'autre aussi dans mes récits...

Passez une très belle journée avec bises.

Danielle a dit…

Merci Michelaise, je suis très touchée par ton commentaire, du soleil, moi aussi j'en souhaite à tout le monde ... Par chez moi, c'est gris, mais je sens que le soleil n'est pas loin, pas encore décidé à se montrer sous son vrai jour :-)))

Je t'embrasse fort.

Anonyme a dit…

Vos billets sont vrais, authentiques et paisibles.
De votre regard émerveillé et de votre plume très belle naissent ces histoires que l'on savoure avec tant de plaisir.
Avec un petit mot en retour pour chacun, c'est si agréable parce que rare.
Nous avons tant besoin de douceur.
M.17

Danielle a dit…

Merci M.17 moi j'aimerais mieux vous appeler Rose, ou Lilas, ou Amandine, ou encore Mirabelle... La prochaine fois peut-être ?

Le petit mot du retour, c'est tout naturel, vous qui prenez la peine de m'écrire... Je suis toujours touchée de toutes ces attentions.

A tout bientôt M...:-)))