mercredi 16 novembre 2011

La maigrelette du métro...

Image du Blog vanille63.centerblog.net


Quand elle est montée dans le wagon, je n'ai rien vu qu'une silhouette gracile, élégante et très jeune...

Elle s'est assise en face de moi. Elle avait de longs cheveux châtains, raides, qui lui tombaient sur les épaules, épais, bien rangés autour de son visage. Elle était penchée sur son téléphone portable, avec passion, les os de sa figure saillaient et comme elle mâchonnait un chewing-gum, à chaque coup de mâchoire, on les voyait bouger d'avantage, j'étais fascinée par sa maigreur.


Elle portait un jeans, et sur le siège, en face de moi, elle ne tenait pas beaucoup de place, elle croisait les jambes, celles-ci étaient si fines qu'elles semblaient n'en faire qu'une, aussi grosses qu'une cheville. C'était impressionnant, le vêtement qu'elle portait avait une coupe cintrée, mais comme il la dissimulait entièrement, il paraissait large, il ne laissait deviner aucune forme, quand elle remuait, il y avait de la place partout, on ne voyait rien de son corps.


Elle avait toujours le nez sur son portable, elle jetait de temps en temps un petit regard furtif autour d'elle, à travers ses longs cheveux qui lui servaient un peu de moucharabieh, et puis elle plongea sa main dans sa poche et en retira une pastille de chewing-gum qu'elle mit discrètement dans sa bouche. Une fois qu'elle l'eut mâchée quelques minutes, juste le temps d'en extraire le jus sucré, sans doute du faux sucre ?... Elle la saisit dans sa bouche, du bout des doigts et la glissa rapidement dans un petit papier d'emballage transparent qu'elle était allée chercher dans son sac à main. Ainsi de suite, j'ai vu disparaître dans sa bouche cinq ou six petits carrés blancs, mâchés et recrachés avec le même rituel.


Elle avait bien perçu que je l'observais, pas assez discrètement sans doute, je m'efforçais pourtant de regarder au loin, le plus possible,  mais mes yeux revenaient machinalement vers elle... Elle jeta vers moi un coup oeil, à chaque prise de carré blanc.

Rien ne bougeait de son corps, que ses mandibules, tous les os de son visage tressaillaient avec la mastication. Elle était une tête pleine d'os recouverts d'une peau très mince. Ses doigts fins, fins, longs, longs, s'agitaient sur le portable.

Nous sommes restées un bon moment, elle à me regarder furtivement,  moi à faire semblant de ne pas la regarder, un petit chassé-croisé de métropolitain...

À sa station, elle s'est levée d'un bond, elle était grande, ses jambes grosses comme des brindilles me rappelaient celles des échassiers que j'admirais sur l'étang de l'Indre... Les hérons blancs et gris qui venaient poser leurs pattes sans bruit sur le bord de l'eau, avec la grâce d'une feuille d'arbre qui volette en tournoyant au moindre petit vent, avant d'atteindre la terre.

Elle ne déploya pas ses ailes, elle disparut dans son grand petit manteau, elle n'avait pas de corps, juste quelques pastilles de menthe à mâcher. Je me suis dit, elle est peut-être anorexique cette jeune femme, pour être si maigre... Mais je ne saurais jamais si j'ai vu juste...

4 commentaires:

Michelaise a dit…

Va savoir mais ton regard, attentif quoique discret, ton récit, simple et plein d'humanité, tout cela nous l'a rendue plus proche, l'espace, comme toi, de quelques stations... que dis-je, le temps d'un billet de blog !

Danielle a dit…

Merci Michelaise de tes mots touchants... C'est vrai, va savoir pour cette jeune femme...

Bises du soir

Enitram a dit…

J'aime ton histoire de brindille ailée !
Bonne soirée !

Danielle a dit…

Merci Enitram, pour les petites histoires de brindille ailée, j'aime !

Bises du soir.