mardi 9 août 2011

Venise 2011... Les accompagnateurs.


Mon QG, acqua frizzante et sourire de la serveuse, sur le campo...

J'étais assise à la terrasse de mon café favori, sur le grand campo tout près de chez moi, j'avais sorti mon mini ordinateur, commandé un verre d'eau frizzante avec petite rondelle de citron et la serveuse, quasi une amie, m'a souri comme d'habitude. J'avais établi ici mon quartier général pour goûter au paysage, à l'eau avec bulles et fraîche, au sourire de la serveuse et avoir les nouvelles du jour via Internet... "Ma" serveuse appelle maintenant ma consommation « un classico » : arrivo subito ! Vous imaginez, commander un verre d'eau gazeuse à la terrasse d'un café parisien, pour un euro, avec cet empressement, cette gentillesse ?

Je regardais au loin venir un vieux monsieur qui marchait avec un peu de peine, appuyé sur une canne, costume bleu marine, impeccable, le regard un peu lointain.... Il était accompagné d'un homme jeune, grand et fort, qui avait l'air de veiller sur lui, ils choisissent tous les deux la table, le jeune homme fort invite le vieux monsieur à s'asseoir, tire la chaise, assisté de "ma" serveuse souriante, comme d'habitude, toujours prête à rendre service.

La commande fut prestement passée, deux cafés !

L'accompagnateur ne s'occupe absolument plus du vieux monsieur, ne lui adresse même pas la parole,  il sort son bel Iphone et commence une longue conversation en russe avec un correspondant. Laissant le vieux monsieur au regard lointain boire son café tout seul, dans le silence.

Arrive une jeune femme, souriante, qui salue en italien la personne âgée...  Elle s'installe à table et commande elle aussi un café.

Les deux jeunes parlent en russe et engagent avec entrain une conversation, le temps passe visiblement agréablement pour eux... Le vieux monsieur ne dit pas un mot, le regard fixé sur la ligne bleue des Vosges.

Moi, je m'activais sur ma machine, mais je n'en loupais pas une miette, je me disais : tiens, voilà bien la première fois que je vois un homme "accompagner" une vieille personne, il y a beaucoup d'emplois de cette nature qui sont tenus par des jeunes femmes d'origine de l'Est à Venise, beaucoup de Russes. J'entends encore chanter leur belle langue quand je vais au parc Savorgnan sur la Fondamenta Venier prendre un peu le frais, il y a toujours un petit groupe de femmes qui papotent en russe quand je passe...

Je m'active, lis la presse, je prends mon temps et je vois mes deux amis se lever, le vieux monsieur à qui nulle parole, nul regard n'avait été adressés, à part le bonjour à l'arrivée de la jeune femme, sort son portefeuille pour payer les consommations. Le jeune homme s'en saisit pour activer la manœuvre et paye tranquillement l'addition...

Je vois bien que le vieux monsieur, certes peu causeur, mais observateur, réclame de la main et des yeux avec quelques mots en italien, son portefeuille... L'homme jeune le lui redonne et notre Italien le remet aussitôt dans la poche intérieure de sa veste, et voilà nos trois personnages qui s'apprêtent à quitter la terrasse, les deux jeunes russes n'avaient pas cessé de converser, pas un regard à gauche, pas un regard à droite, l'homme à la canne sort comme il peut,  à cet instant "l'accompagnateur" prend une serviette en papier et essuie l'épaule droite du vieux monsieur, sans un mot, visiblement un oiseau qui passait par là avait baptisé le beau costume...

Les trois consommateurs quittent la terrasse, les jeunes continuent de causer et partent devant, le vieil homme continue son chemin, les mains derrière le dos, chacun pour soi, Dieu pour tous !

Le coup d'oeil curieux que j'avais depuis un moment sur ce trio intrigua la jeune femme qui, à plusieurs reprises, avait saisi mon regard...

Je n'ai rien su de plus, un employeur, un employé, un travail de routine, un rendez-vous, des consommations payées d'une façon naturelle par celui qui avait le portefeuille, j'avais échafaudé bien sûr une histoire d'accompagnement comme on en voit beaucoup par ici, je me disais quelle tristesse, quelle drôle de façon de terminer ses jours, comme un somnambule, sans parole, le regard lointain... Soutenu par tant d'indifférence, sans égard, sans regard... Simplement assez d'argent pour régler la note...

8 commentaires:

D'Art en Arts a dit…

Une histoire qui, hélas, doit être assez fréquente...

Danielle a dit…

Hélas oui Norma... Cette histoire, si triste, je l'ai aussitôt gravée dans ma mémoire et j'y ai repensé dans la journée, je finissais par regarder tous les accompagnateurs...

Bonne journée à toi Norma.

Aloïs a dit…

Je vais être un peu optimiste,il existe d'autre version des accompagnateurs,tout de même.
Tout le monde n'est pas aussi "détaché" j'en suis certaine

Danielle a dit…

Bien sûr Françoise, cet exemple vaut par ce que j'ai vu, uniquement, je sais que d'autres accompagnateurs ne font pas du tout comme ça.

Merci d'être passée.

Bises du sud.

Michelaise a dit…

Une intrigue qui n'a rien de policier mais qui est véritablement le fruit de ton regard attentif et tellement chaleureux. Belle histoire d'observation telle qu'on en vit parfois, et l'on reste avec ses interrogations.

Cathy B a dit…

Bonjour Danielle,
Rien à voir avec Venise, que je visite avec plaisir sur votre blog, mais inspirée par votre commentaire, je viens de compléter mes étiquettes "abricot" avec une confiture d'abricots à la vanille, si cela vous intéresse (http://champagne-balade.blogspot.com/2011/08/etiquette-confiture-abricot-sirop.html.
Très belle fin de journée

Danielle a dit…

Exactement ça Michelaise, plein d'interrogation c'est tout, c'est beaucoup...

merci à toi d'avoir cette attention-là, par ici.

Bises du soir

Danielle a dit…

Cathy merci beaucoup pour l'abricot et la vanille.... je suis très très contente...

Et puis Venise par chez moi, c'est pas tout à fait pareil qu'ailleurs :-)))

Merci d'être passée.