samedi 5 février 2011

Mais revenons au Cambodge... La photo !

Vous partiriez si loin sans appareil photo ? Sans la pochette complète ? Le cordon ombilical qui donne vie à vos souvenirs via votre ordinateur ?... Il ne s'agit pas de le laisser sur le buffet avant de partir celui-là, ça non. Un jour, j'avais fait un truc comme ça avec mon ordinateur, j'avais oublié le cordon d'alimentation, tout simplement, là, même plus question de rien, ni mail, ni petit coucou, ni stockage de photos... Le drame, la tension, l'oubli impardonnable, il fallait que je cherche un point Wifi, une connexion d'urgence, l'air allait me manquer, asphyxiée... J'étais comme un chercheur d'or qui aurait oublié son tamis, je vais les trouver comment, mes pépites?

Pour faire des photos, je vais être drôlement limitée... Pour les coucous, les tout va bien, il fait beau, on peut attendre un peu, il y a les points Internet, avec le café serré, sauvée !

Mais les photos ? Il faudra donc que j'ajuste mes envies à la capacité de ma carte mémoire, si j'en réduis le nombre de pixels, j'vais pouvoir en faire un peu plus, mais la qualité sera moins bonne, quel désastre. Quand on fait de la photo, on ne réfléchit pas comme tout le monde, il faut ouvrir l'oeil et le bon, avoir le doigt souple, qui ne tremble pas, avoir la science du cadrage, repérer rapidement le détail époustouflant qui va étonner vos amis, faire de vous, qui sait, un artiste... Vous pouvez passer directement dans la cour des grands, on risque même de parler de vous à la prochaine soirée crêpes, tu as vu ses photos ? Superbes, oui, très sympa, penser à l'art oui, mais il faut avoir de la tête, penser à tout... Et je n'en suis pas là... Il me manque encore beaucoup de métier, je joue petit, mais je m'applique, quand je n'oublie pas quelque chose.

On regarde, on vise, on ajuste, on déclenche, comme une mesure à quatre temps, la photo c'est très musical.

J'ai remarqué avec des touristes asiatiques, sur le site d'Angkor, tout comme à Venise, qu'on ne peut pas faire de mauvaises photos quand le paysage est tellement beau, même tremblé le point de vue est adorable, quel beau flouté, quels beaux reflets, quel effet poétique, c'est vraiment comme ça ? Magnifique, la petite musique est en marche sur le bon rythme, mes touristes sont contents, ils abordent un large sourire, l'image est belle par tous les temps.


Devant les temples, ou le Pont des soupirs, les amateurs de photo m'amusent, enfin, pas tout le temps : vous savez, ceux qui veulent absolument avoir leur tête sur tous les plans. Il faut attendre que tout le groupe y soit passé, un par un devant l'objectif, pas question de ne pas y être, ils prennent leur temps, il faut être à son avantage, avoir l'air joyeux, quand c'est à mon tour de déclencher, seule enfin, devant la beauté, il y a un gros nuage qui fait une ombre portée juste sur l'endroit que j'avais choisi... L'appareil est prêt, ouvert depuis longtemps, la pile va se décharger, zut, mais non, pas de panique, j'ai de quoi recharger la batterie, faut pas trop traîner quand même, l'obturateur est bien dégagé, le doigt sur le déclencheur, comme sur la couture du pantalon, attention, là, vous y êtes, c'est parfait, juste ce qu'il faut de lumière, superbe. Tout à coup, à 5 mètres, un autre groupe de touristes asiatiques arrive, tous en tee-shirt jaune, pour ne pas se perdre, bien se reconnaître, se voir de loin, des jeunes, très jeunes, des scolaires, des étudiants, ça parle, ça crie dans tous les coins, ils investissent les gradins, juste à l'endroit, pile, où je me tiens, le petit doigt en l'air, les deux jambes solidement plantées, les bras tendus, alors celle-là, elle est pour moi, étonnant, fascinant, quand je vais leur montrer ça... Raté !

Le moment est mal choisi, ils sont nombreux dans le nouveau groupe qui arrive et chacun veut se faire tirer le portrait devant la racine énorme qui a fait écrouler le mur de ce temple extraordinaire. Dans les escaliers de pierre, qui mène au lieu de prière, c'est pareil, pour un instant d'instabilité, la photo ne se fera pas sans un sourire, on se met à deux ou à trois, mais le groupe est tellement grand qu'il faudra attendre un bon moment pour libérer le plateau.

La lumière a changé d'intensité, il reste encore deux ou trois portraits à faire, il faut attendre, attendre... J'ai bien le temps. Je regarde le spectacle, les jeunes enthousiastes, presque des aventuriers qui veulent compter dans l'histoire, et puis cette manie de vouloir à tout prix faire celle qui est toute seule dans une île déserte... C'est drôle cette idée de fixer le temps uniquement quand il n'y a personne à l'horizon, la vie n'est pas du papier glacé... Il faudrait peut-être voir autrement...

De bougonner je m'arrête, et je prends la photo, à mon tour.

Je n'ai pas décidé encore de voir autrement, j'attends toujours qu'il n'y ait plus personne à l'horizon pour prendre ma photo, je n'arrive pas à changer... Mais je vois que nous sommes beaucoup dans ce cas-là... La photo en somme, ne dit pas la vérité...

12 commentaires:

Maité a dit…

Il n'y a pas souvent de personnages sur mes photos, un chat parfois...Quant à la place Saint-Marc déserte, un régal...Je suis une vraie sauvage !
Je pars à Venise du 3 au 10 mai, quasiment demain ! Bonne journée, a presto !

Michelaise a dit…

Marrante ta conclusion (la photo de Venise !!) Il faut qu'il n'y ait personne parce que, sinon, on se doit de rajouter une mise en scène des personnages, un clin d'oeil, un trait d'humour, une réflexion... et ça, c'est encore plus un métier ! Car, as-tu remarqué, tout le monde "fait" de la photo, comme tout le monde "fait" du tourisme... et pourtant ce sont des activités qui demandent un (certain) talent.
Bref la photo habitée c'est plus difficile : il faut gérer la vitesse, la profondeur de champ, ajuster les données pour obtenir le net et le flou qu'on désire ! Et avoir l'oeil vif et réactif.

Enitram a dit…

J'aime ton billet encore une fois!!!
J'aime les deux procédés, la photo "habitée" avec des personnages mais surtout qu'ils ne posent pas et la photo vide de monde (tu peux comparer les photos de mes deux derniers billets, exemples flagrants !)
Une photo est une somme de ressentis, d'émotions aussi bien par son auteur que par son lecteur. Je dis bien lecteur, car il faut lire une photo, de A
jusqu'à Z. Tout dépend aussi de ce l'auteur a voulu dire !
Bon, j'arrête là, comme tu peux t'en douter j'aime la photo. Merci pour ce bon billet !

Danielle a dit…

Maïté quelle chance, au mois de mai, quand il fait encore doux... Presque demain en effet...

Mais ne nous pressons pas, rêvons...

A tout bientôt Maïté.

Danielle a dit…

J'ai vu, Enitram, elles sont magnifiques tes photos, avec ou sans monde... Pleines de lumières et de couleurs...

Oui, oui, tu as absolument raison, le lecteur est nécessaire pour la photo comme toutes les oeuvres qui n'existeraient pas sans lui...

Merci Enitram d'âtre passée.

Danielle a dit…

Oui Michelaise, la photo, c'est comme la vie il faut tout gérer, absolument tout...
Le coup d'oeil, le clin d'oeil, la profondeur, la vitesse, alors que nous savons que la vie passe comme un éclair :-)))

Passe une bonne journée, très bonne.

Marie-Josée a dit…

Mes parents m'ont offert mon premier appareil photo 35mm en 1977 : un Canon AE-1, le modèle de l'année, pour un voyage en Bretagne et en Alsace. J'ai pris mon premier rouleau de pellicule dans la jolie petite ville de Vannes. Ah ! ses lavoirs! Après 36 photos, il peut bien y en avoir une trente-septième, une trente-huitième, mais au-delà... cela devient étrange.
Arrêt chez un photographe qui s'enferme dans la chambre noire et vérifie : j'avais mal engagé l'amorce! Aucune de mes photos lentement cadrées ne s'était enregistrée...
Si quelqu'un a de jolies photos de Vannes, j'attends toujours d'y retourner...

Danielle a dit…

Ah zut ! pour la pellicule !! Jolie anecdote un peu triste !

Vivement ton prochain voyge en France... Mais je n'ai aucune photo de Vannes... Peut-être que quelques internautes...

Bonne journée Felice.

Aloïs a dit…

Voila le genre de billet que j'aurais pu écrire.
Et même encore plus long sous le titre aventures et mésaventures de la photo.
Et des cas de figures j'en connais!
Et rien ne m'énerve plus que les hordes de touristes qui veulent immortaliser leur bref passage avec pour toile de fond Notre Dame,la Tour.....
La photo cela doit se sentir,je me souviens d'une presque dispute avec une amie concernant une chapelle à Venise transformée en lieux d'habitation,dont elle me parlait à notre retour.
Je lui disais ne pas me souvenir,et elle de s'énerver et me dire que je l'avais forcément prise en photo.
Cette amie n'a pas compris que je n'ai pas pris de photo.
Tout simplement ce jour là l'émotion,la magie n'étaient pas au rendez-vous pour moi

Danielle a dit…

Parfaitement chère Françoise tu aurais pu...

Je comprends ton manque d'envie de prendre cette photo, il faut que ça vienne de l'intérieur...

Elle est restée ton amie quand même ? :-)))

Bises du demi soir.

Dominique a dit…

L'an dernier j'ai pris à peu près 7 000 photos à Venise, sans touriste devant... C'était fin Mai-début Juin. Oui, j'ai une patience de vieille chatte et des ruses de sioux !

Danielle a dit…

D'accord Dominique, on peut prendre des milliers de photos à Venise sans un touriste devant, mais comme tu le dis il faut une ruse de Sioux :-))))

Mais on y arrive, je vais voir cette année comment ça va se passer :-))))

Amicalement Dominique